CITE DU VATICAN, Mercredi 31 octobre 2001 (ZENIT.org) – Lors de l´audience générale du 24 octobre, le pape Jean-Paul II a commenté le psaume du Miserere (Ps 50, 3-5.11-12.19). Voici la traduction de l´allocution du pape en italien, dans la traduction de L´Osservatore Romano du 30 octobre:
– Allocution de Jean-Paul II –
1. Nous avons écouté le Miserere, l´une des prières les plus célèbres du Psautier, le Psaume pénitentiel le plus intense et le plus répété, le chant du pécheur et du pardon, la méditation la plus profonde sur la faute et sur la grâce. La Liturgie des Heures nous le fait répéter lors des Laudes de chaque vendredi. Depuis de nombreux siècles, il s´élève vers le ciel du cœur de nombreux fidèles juifs et chrétiens, comme un soupir de repentir et d´espérance adressé à Dieu miséricordieux.
La tradition hébraïque a placé le Psaume sur les lèvres de David, invité à la pénitence par les paroles sévères du prophète Nathan (cf. vv. 1-2; 2 S 11-12), qui lui reprochait l´adultère accompli avec Bethsabée et d´avoir tué son mari, Urie. Toutefois, le Psaume s´enrichit au cours des siècles suivants par la prière de nombreux autres pécheurs, qui reprennent les thèmes du « cœur nouveau » et de l´ »Esprit » de Dieu communiqué à l´homme racheté, selon l´enseignement des prophètes Jérémie et Ezéchiel (cf. v. 12; Jr 31, 31-34; Ez 11, 19; 36, 24-28).
2. Les scènes que le Psaume 50 décrit sont au nombre de deux. Il y a tout d´abord la région ténébreuse du péché (cf. vv. 3-11), dans laquelle l´homme se trouve depuis le début de son existence: « Vois, mauvais je suis né, pécheur ma mère m´a conçu » (v. 7). Même si cette déclaration ne peut pas être prise comme une formulation explicite de la doctrine du péché originel, telle qu´elle a été définie par la théologie chrétienne, il ne fait aucun doute qu´elle y correspond: elle exprime en effet la dimension profonde de la faiblesse morale innée de l´homme. Le Psaume apparaît dans cette première partie comme une analyse du péché, effectuée devant Dieu. Trois termes hébreux sont utilisés pour définir cette triste réalité, qui provient de la liberté humaine mal utilisée.
3. Le premier terme, « hattá », signifie littéralement « manquer la cible »: le péché est une aberration qui nous mène loin de Dieu, objectif fondamental de nos relations, et par conséquent également loin de notre prochain.
Le deuxième terme hébreu est » ´awôn », qui renvoie à l´image de « tordre », de « courber ». Le péché est donc une déviation tortueuse de la voie droite; il est l´inversion, la distorsion, la déformation du bien et du mal, dans le sens déclaré par Isaïe: « Malheur à ceux qui appellent le mal bien et bien le mal, qui font des ténèbres la lumière et de la lumière les ténèbres » (Is 5, 20). C´est précisément pour cette raison que, dans la Bible, la conversion est indiquée comme un « retour » (en hébreu « shûb ») sur la voie droite, après avoir effectué une correction de la route.
Le troisième mot avec lequel le Psalmiste parle du péché est « peshá ». Il exprime la rébellion d´un sujet à l´égard de son souverain, et donc un défi ouvert lancé à Dieu et à son projet pour l´histoire humaine.
4. Cependant, si l´homme confesse son péché, la justice salvifique de Dieu est prête à le purifier radicalement. C´est ainsi que l´on passe dans la seconde région spirituelle du Psaume, la région lumineuse de la grâce (cf. vv. 12-19). En effet, à travers la confession des fautes s´ouvre pour l´orant un horizon de lumière, dans lequel Dieu est à l´œuvre. Le Seigneur n´agit pas seulement négativement, en éliminant le péché, mais il recrée l´humanité pécheresse à travers son Esprit vivifiant: il donne à l´homme un « cœur » nouveau et pur, c´est-à-dire une conscience renouvelée, et il lui ouvre la possibilité d´une foi limpide et d´un culte agréable à Dieu.
Origène parle à ce propos d´une thérapie divine, que le Seigneur accomplit à travers sa parole et à travers l´œuvre de guérison du Christ: « De la même façon que, pour le corps, Dieu prédispose les remèdes des herbes thérapeutiques savamment mélangées, il prépare également des médicaments pour l´âme, grâce aux paroles qu´il communique, en les transmettant dans les divines Ecritures… Dieu se livra également à une autre activité médicale, dont l´archiatre est le Sauveur, qui dit de lui-même: « Ce ne sont pas les personnes saines qui ont besoin de médecins, mais les malades ». Il était le médecin par excellence capable de soigner toute faiblesse, toute infirmité » (Homélie sur les Psaumes, Florence 1991, p. 247-249).
5. La richesse du Psaume 50 mériterait une exégèse soigneuse de chacune de ses parties. C´est ce que nous ferons, lorsqu´il recommencera à retentir dans les divers vendredi des Laudes. Le regard d´ensemble, que nous avons à présent donné à cette grande supplication biblique, nous révèle déjà plusieurs composantes fondamentales d´une spiritualité qui devrait se refléter dans l´existence quotidienne des fidèles. Il y a tout d´abord un sens très vif du péché, perçu comme un choix libre, possédant une connotation négative au niveau moral et théologal: « Contre toi, toi seul, j´ai péché, ce qui est coupable à tes yeux, je l´ai fait » (v. 6).
Le Psaume contient ensuite un sens tout aussi vif de la possibilité de la conversion: le pécheur, sincèrement repenti, (cf. v. 5), se présente dans toute sa misère et sa nudité à Dieu, en le suppliant de ne pas le repousser loin de sa présence (cf. v. 13).
Il y a enfin, dans le Miserere, la conviction bien enracinée du pardon divin qui « efface, lave et purifie » le pécheur (cf. vv. 3-4) et qui parvient même à le transformer en une nouvelle créature, qui possède un esprit, une langue, des lèvres, un cœur transfigurés (cf. vv. 14-19). « Même si nos péchés – affirmait sainte Faustine Kowalska – étaient noirs comme la nuit, la miséricorde divine est plus forte que notre misère. Il n´y a besoin que d´une chose: que le pécheur entrouvre un peu la porte de son propre cœur […] le reste c´est Dieu qui l´accomplira […] Chaque chose commence dans ta miséricorde et finit dans ta miséricorde » (Maria Winowska, L´icône de l´Amour miséricordieux. Le message de sœur Faustine, Rome 1981, p. 271) ».
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