Une voix qui détonne blesse l´auditeur et met la confusion dans le chœur

Catéchèse de Jean-Paul II sur le Psaume 149

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CITE DU VATICAN, Mercredi 23 mai 2001 (ZENIT.org) – Une seule voix qui détonne blesse l´auditeur et met la confusion dans le chœur: c´est en substance ce que dit le commentaire de saint Augustin sur le Psaume 149, cité par le pape dans sa catéchèse sur ce même psaume. Une illustration psalmique de la communion dans l´Eglise dont il est tellement question ces jours-ci, au cœur d´une catéchèse qui met en évidence la louange des « pauvres », ces ‘anawim que chante aussi le Magnificat.

Le pape Jean-Paul II a reçu quelque 13.000 fidèles à l´audience générale de ce matin, place Saint-Pierre, alors que les cardinaux réunis en consistoire travaillaient en groupes. Demain, Jean-Paul II présidera la célébration de la solennité de l´Ascension qui conclura le consistoire. Au Vatican, l´Ascension est en effet maintenue le jeudi (en Italie, la célébration est reportée à dimanche).

Reprenant son cycle de commentaires des psaumes, selon le projet annoncé dans Novo millennio ineunte (n. 34), le pape s´est arrêté aujourd´hui aux paroles du psaume 149, sous ce titre: « la fête des amis de Dieu », un psaume chanté aux laudes du dimanche de la première des quatre semaines sur lesquelles est réparti le psautier. Nous proposons ci-dessous une traduction rapide, de travail. Rappelons que chaque semaine, l´Osservatore Romano en langue française publie une traduction de la catéchèse du mercredi précédent.

Catéchèse du pape

1. « Qu´exultent les fidèles dans la gloire, qu´ils se lèvent, dans l´allégresse ». Cet appel du Ps 149, qui vient d´être proclamé, renvoie à une aube près d´éclore et voit les fidèles prêts à entonner leur louange matinale. Une telle louange est définie par une expression significative, « un chant nouveau » (v.1), c´est-à-dire un hymne solennel et parfait, adapté aux derniers jours, lorsque le Seigneur rassemblera les justes dans un monde renouvelé. Tout le psaume est traversé par cette atmosphère de fête, déjà inaugurée par l´alléluia initial, et rythmée ensuite par le chant, la louange, la joie, la danse, le son des tambourins et des cithares. La prière que ce psaume inspire est l´action de grâce d´un cœur rempli d´exultation religieuse.

2. Les acteurs du psaume sont appelés, dans le texte orignal de l´hymne en hébreu, par deux termes caractéristiques de la spiritualité de l´Ancien Testament. Par trois fois, ils sont définis avant tout comme des hasidim (vv. 1.5.9), c´est-à-dire des « les pieux, les fidèles », ceux qui répondent avec fidélité et amour (hesed) à l´amour paternel du Seigneur.

La seconde partie du psaume suscite l´étonnement, parce qu´elle est remplie d´expressions guerrières. Il nous semble étrange qu´en un même verset, le psaume mette ensemble « les louanges du Seigneur dans la bouche » et « l´épée à deux tranchants dans leurs mains » (v. 6). En réfléchissant, nous pouvons comprendre pourquoi: le psaume a été composé pour des « fidèles » qui se trouvent engagés dans une lutte de libération; ils combattaient pour libérer leur peuple opprimé et lui rendre la possibilité de servir Dieu. A l´époque des Macchabées, au IIe siècle av. J.-C., les combattants de la liberté et de la foi, soumis à une dure répression de la part du pouvoir hellénistique, s´appelaient justement hasidim, « les fidèles » à la Parole de Dieu et aux traditions des pères.

3. Dans la perspective actuelle de notre prière, cette symbolique biblique devient une image de notre engagement, nous les croyants, qui, après avoir chanté à Dieu la louange matinale, nous mettons en marche sur les routes du monde, au milieu du mal et de l´injustice. Hélas, les forces qui s´opposent au Royaume de Dieu sont imposantes: le psalmiste parle de « peuples, nations, chefs et nobles ». Et pourtant, il est confiant parce qu´il sait qu´il a à ses côtés le Seigneur, qui est le véritable roi de l´histoire (v. 2). Sa victoire sur le mal est, par conséquent, sûre et sera le triomphe de l´amour. A cette lutte participent tous les hasidim, tous les fidèles et les justes, qui, avec la force de l´Esprit, conduisent à l´accomplissement de l´œuvre admirable qui porte le nom de Royaume de Dieu.

4. Saint Augustin, partant des références du psaume au « chœur » et aux « tambourins et cithares », commente: « Que représente un chœur? […] Le chœur est un ensemble de chanteurs qui chantent ensemble. Si nous chantons en chœur, nous devons chanter d´accord. Lorsqu´on chante en chœur, et même une seule voix détonante blesse l´auditeur et met la confusion dans le chœur lui-même » (Enarr. in Ps. 149: CCL 40,7,1-4).

Se référant ensuite aux instruments utilisés par le psalmiste, il se demande: « Pourquoi le psalmiste prend-il en main le tambourin et le psautier? » Il répond: « Afin que non seulement la voix loue le Seigneur , mais aussi les œuvres. Lorsque l´on prend le tambourin et le psautier, les mains s´accordent à la voix. Il en est ainsi pour toi. Lorsque tu chantes l´alléluia, tu dois offrir du pain à l´affamé, habiller qui est nu, accueillir le pèlerin. Si tu fais cela, ce n´est pas seulement la voix qui chante, mais les mains sont en harmonie avec la voix, dans la mesure où les œuvres concordent avec les paroles » (ibid., 8,1-4).

5. Il y a un autre terme définissant les priants du psaume: ceux-ci sont les ‘anawim, c´est-à-dire « les pauvres, les humbles » (v. 4). Cette expression est très fréquente dans le psautier et indique non seulement les opprimés, les misérables, les persécutés pour la justice, mais aussi ceux qui, étant fidèles aux engagements moraux de l´Alliance avec Dieu, sont écartés par ceux qui choisissent la violence, la richesse et la puissance. Dans cette lumière on comprend que la catégorie sociale des « pauvres » n´est pas seulement une catégorie sociale, mais un choix spirituel. Tel est le sens de la célèbre Béatitude: « Bienheureux les pauvres en esprit, parce que le Royaume de Dieu est à eux » (Mt 5,3). Déjà le prophète Sophonie s´adressait ainsi aux ‘anawim: « Cherchez le Seigneur vous tous, les pauvres de la terre, qui accomplissez ses ordres; cherchez la justice, cherchez l´humilité, pour être à l´abri au jour de la colère du Seigneur » (So 2,3).

6. Eh bien, le « jour de la colère du Seigneur », c´est justement celui qui est décrit dans la seconde partie du psaume lorsque les « pauvres » se rangent du côté de Dieu pour lutter contre le mal. Tout seuls, ils n´ont pas la force suffisante, ni les moyens, ni les stratégies nécessaires pour s´opposer au surgissement du mal. Pourtant, la phrase du psalmiste n´admet pas d´hésitations: « Le Seigneur aime son peuple, il couronne les humbles (‘anawim) de victoire » (v.4). Elle se réalise en image lorsque l´Apôtre Paul déclare aux Corinthiens: « Dieu a choisi ce qui n´est pas noble dans le monde et est méprisé et cela pour réduire à néant les choses qui sont » (1Co 1,28).

Avec cette confiance « les fils de Sion » (v. 2), hasidim et ‘anawim, c´est-à-dire les fidèles et les pauvres, se mettent à vivre leur témoignage dans le monde et dans l´histoire. Le chant de Marie dans l´Evangile de Luc – le Magnificat – est l´écho des meilleurs sentiments des « fils de Sion »: louange joyeuse à Dieu Sauveur, action de grâce pour les grandes choses réalisées en elle par le Tout-puissant, lutte contre les forces malfaisantes, solidarité avec les pauvres, fidélité au Dieu de l´Alliance (cf. Lc 1,46-55).

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ZENIT Staff

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