Rencontre au Stade Olympique de Rome - Journée mondiale des enfants, 25 mai 2024 © Vatican Media

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Méditations sur les lectures du 23e dimanche du Temps Ordinaire

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 Avec l’invitation à demander au Christ qu’il guérisse nos oreilles et notre langue afin que nous puissions l’écouter et lui dire « oui », humblement et joyeusement.

XXIIIème Dimanche du temps ordinaire – Année B – 8 septembre 2024

Rite Romain : Is 35, 4-7a ; Ps 145 ; Jc 2, 1-5; Mc 7,31-37

Rite Ambrosien : Is 63, 7-17; Ps 79; Hb 3, 1-6; Jn 5, 37-47

2ème Dimanche après le martyre de Saint-Jean le Précurseur 

  1. Effata = Ouvre-toi

Dans l’Evangile de ce Dimanche, Saint Marc nous parle d’un miracle fait par Jésus pendant qu’il accomplit son travail d’évangélisation dans la région païenne de Tyr. Le parcours décrit par l’évangéliste est imprégné de signification. En faisant une longue déviation, Jésus marche le long d’un chemin qui unit des villes et des territoires étrangers à la tradition religieuse d’Israël. Le Messie parcourt les frontières de la Galilée, à la recherche de cette partie commune à chaque homme qui vient avant chaque frontière, avant chaque division politique, culturelle, religieuse, raciale.

Le fait que le miracle ait lieu dans cette terre symbolise l’ouverture universelle de l’Evangile : chaque homme et chaque femme, partout où ils habitent et quelle que soit leur culture, peuvent être atteints par la Parole de Dieu et touchés par sa miséricorde. 

En vérité nous avons déjà faire face au miracle d’aujourd’hui, par lequel le Christ guérit un sourd-muet, le jour du baptême lorsque le prêtre a fait sur nous exactement la même chose que ce que le Christ a fait sur le sourd-muet. 

  Au centre du passage de l’Evangile d’aujourd’hui, il y a un petit mot qui résume tout le message et toute l’œuvre du Christ. Saint Marc le reporte dans la langue même qui a été utilisée par le Christ pour le prononcer : « Effata » qui signifie « Ouvre-toi ». Il existe une fermeture intérieure qui concerne le noyau profond de la personne, celui que la Bible appelle « cœur ». C’est cela que Jésus est venu « ouvrir » et libérer afin de nous rendre capables de vivre pleinement la relation avec Dieu, et avec les autres. C’est pour cela que ce petit mot, « Effata – Ouvre-toi », résume en lui-même toute la mission du Christ. Il s’est fait homme pour que l’homme rendu intérieurement sourd et muet par le péché, devienne capable d’écouter la voix de Dieu, la voix de l’Amour qui parle à son cœur, et pour qu’il apprenne ainsi à parler à son tour le langage de l’amour, à communiquer avec Dieu et avec les autres. Pour cette raison la parole et le geste de « l’Effata» sont insérés dans le rite du baptême, comme un des signes qui en expliquent la signification.  

En touchant notre bouche et nos oreilles pendant le rite du baptême, le prêtre nous a dit « Que le Seigneur te donne d’écouter sa parole et de proclamer ta foi ». Pendant ce rite de l’Effata, le prêtre a prié sur nous, enfants, pour que nous puissions vite écouter la parole de Dieu et proclamer la foi.

Dès le début de notre vie – quand il ne nous était pas encore possible de comprendre les mots – il nous a été dit que l’écoute de la Parole est pour nous le salut. Il n’est pas important de la comprendre entièrement et immédiatement. Les nouveau-nés ne vont pas comprendre la signification intellectuelle des mots, mais ils ressentent l’amour dont ils proviennent, ce qui fait qu’ils répondent par un sourire à la mère ou au père qui leur parlent avec une grande affection.

En grandissant, nous avons aussi compris avec l’intelligence ces mots que notre cœur avait toujours perçus et reçus. La première leçon à tirer de tout cela est que la pire des surdités est celle du cœur. Si nous sommes sourds, nous n’arrivons pas à parler : si nous sommes sourds vis-à-vis de l’amour que le Fils de Dieu nous a montré, nous n’arrivons à communiquer correctement ni avec Dieu ni avec les frères et sœurs en humanité qu’il nous a offerts. « Quelle vie est la vôtre, si vous n’avez pas de vie en communauté, et il n’y a pas de vie en communauté qui ne serait pas vécue dans la louange de Dieu ! » (T.S. Eliot, Le Roc). 

Par une prière constante et fréquente, demandons au Seigneur qu’il redise, aussi aujourd’hui, à chacun d’entre nous : « Effata – ouvre-toi », pour que nos esprits et nos cœurs soient ouverts à sa Parole de Vérité et de Vie pour bien marcher sur le Chemin. 

  1. On devient ce que l’on aime (cf. Saint Augustin)

La signification spirituelle de l’Evangile d’aujourd’hui réside dans le fait que Jésus guérit le mutisme de la bouche et du cœur qui est causé par des oreilles sourdes à la Vérité et à l’Amour infini de Dieu. 

Ainsi l’écrivait Saint Augustin « Chacun est ce qu’il aime. Tu aimes la terre ? tu seras terre. Tu aimes Dieu ? qu’est-ce que je dois dire ? que tu seras Dieu ? Je n’ose pas le dire à moi tout seul. Ecoutons plutôt les Ecritures :  J’avais dit : « Vous êtes des dieux, Vous êtes tous des fils du Très-Haut ». Si donc vous voulez être des dieux et fils du Très-Haut, n’aimez pas le monde ni les choses qui sont du monde ».

Ouvrons donc le cœur à Dieu, dont l’amour brise le mur de notre égocentrisme qui nous empêche de l’écouter. Nous demandons au Christ, dont le doigt qui a écrit sur le sable le cumul des péchés de la pécheresse pour que le vent les emporte, de nous toucher avec sa miséricorde qui efface les tromperies et les péchés de nos oreilles et de notre bouche. 

Que l’amour de son cœur transpercé transperce la carapace d’orgueil qui nous rend sourds à son amour. Et que sa salive, sur laquelle sont imprimés les mots de sa même bouche, libère notre langue pour qu’elle chante son amour « exagéré » pour nous. 

Le chemin vers le Christ est lent et fatiguant. Laissons-nous guider par lui, comme le fait le sourd-muet de l’Evangile d’aujourd’hui. Identifions-nous avec ce miraculé et demandons à Jésus d’ouvrir les oreilles du cœur et de l’esprit à ses mots de vérité et d’amour. 

En accueillant la Parole du Christ « Effata – Ouvre-toi » nous allons acquérir la capacité d’écouter et d’écouter la vérité, la parole de vérité, celle qui nous met sur le chemin vers l’éternité, en faisant résonner dans nos mots la Parole. 

Seulement en écoutant la Parole, nous devenons capables de Parole, de réponse.

Cela demande d’aller au-delà du Shemà (écoute) d’Israël et d’être le nouvel Israël qui commence par l’écoute de la Vierge Marie, qui répond oui (= fiat) à son créateur.   Grâce à ce « oui », le Verbe, la Parole s’est fait chair et nous a mis sur la bouche la prière chrétienne par excellence : le Notre Père.

Au n. 85 de la lettre encyclique « Laudato Si’ », Pape François, en reprenant les mots de Jean-Paul II, écrit : « contempler la création c’est aussi écouter un message, entendre une voix paradoxale et silencieuse qui se rajoute à la révélation proprement dite, qui est contenue dans les Saintes Écritures. En faisant attention à cette manifestation, l’être humain apprend à se reconnaître lui-même dans la relation avec les autres créatures. Et je me demande, continue le pape, si Jésus « a bien fait les choses » (Mc 7,37) et Jésus est le Seigneur, le Dieu qui a créé et rendu chaque chose bien et belle, quand l’homme écoute son Seigneur et lui répond, peut-il faire devenir la création aussi belle que ce que Dieu l’avait pensée à l’origine ? ».

J’ai fait cette citation pour souligner que la prière de réponse à Dieu qui nous parle, n’implique pas seulement ce que Dieu dit dans la Bible. Il a également écrit le livre « de la nature » et celui-ci aussi doit être lu et respecté. 

  1. Les vierges consacrées : femmes de l’écoute et mères de la Parole 

Dans la vie de tous les jours, on a souvent l’habitude de dire beaucoup de mots, et de substituer la Parole avec du papotage. L’attitude et la vertu de l’« écoute » sont peu pratiquées.  En imitant d’une manière unique la Marie, Vierge de l’écoute, les vierges consacrées conduisent une vie qui les rend femmes de l’écoute et mères de la Parole. L’instruction « Ecclesia Sponsae Imago » nous enseigne sur la typicité de leur prière aux nn. 29 et 30: « Pour les consacrées, la prière est une exigence d’amour pour « contempler la beauté » de Celui qui les aime, et de communion avec l’Aimé et avec le monde où elles sont enracinées. 

Pour cela, elles aiment le silence contemplatif qui crée les conditions favorables pour écouter la Parole de Dieu et converser avec l’Epoux cœur à cœur. Désireuses d’approfondir la connaissance de l’Epoux et le dialogue de la prière, elles acquièrent une familiarité avec la révélation biblique, surtout par la lectio divina et l’étude approfondie des Ecritures. 

Elles reconnaissent dans la liturgie le lieu source de la vie théologale, de la communion et de la mission ecclésiale. Elles laissent leur spiritualité prendre forme à partir de la célébration des Sacrements et de la Liturgie des Heures en obéissance au rythme propre de l’année liturgique, de façon à ce que les autres pratiques de prière, le chemin d’ascèse et toute leur existence trouvent également unité et orientation ».

Lecture patristique

Saint Laurent de Brindes (+ 1619)

Homélie, 1.9.11-12

Opera omnia, 8, 124.134.136-138

La Loi divine raconte les œuvres que Dieu a accomplies à la création du monde, et elle ajoute: Dieu vit tout ce qu’il avait fait: c’était très bon (Gn 1,31).  L’Évangile rapporte l’œuvre de la Rédemption et de la nouvelle création, et il dit de la même manière : Il a bien fait toutes choses (Mc 7,37). Car l’arbre bon donne de bons fruits, et un arbre bon ne peut pas porter de mauvais fruits (Mt 7,17-18). Assurément, par sa nature, le feu ne peut répandre que de la chaleur, et il ne peut produire du froid ; le soleil ne diffuse que de la lumière, et il ne peut être cause de ténèbres. De même, Dieu ne peut faire que des choses bonnes, car il est la bonté infinie, la lumière même. Il est le soleil qui répand une lumière infinie, le feu qui donne une chaleur infinie : Il a bien fait toutes choses.

Il nous faut donc aujourd’hui dire sans hésiter avec cette sainte foule : Il a bien fait toutes choses : il fait entendre les sourds et parler les muets (Mc 7,37). Vraiment, cette foule a parlé sous l’inspiration de l’Esprit Saint, comme l’ânesse de Balaam. C’est l’Esprit Saint qui dit par la bouche de la foule : Il a bien fait toutes choses. Cela signifie qu’il est le vrai Dieu qui accomplit parfaitement toutes choses, car faire entendre les sourds et faire parler les muets sont des œuvres réservées à la seule puissance divine. Et d’un cas particulier on passe à tous :  il a réalisé un miracle que Dieu seul peut faire, donc il est Dieu, qui a bien accompli toutes choses.

 
Il a bien fait toutes choses. La Loi dit que tout ce que Dieu a fait était bon, et l’Évangile qu’il a bien fait toutes choses. Or, faire de bonnes choses n’est pas purement et simplement les faire bien. Beaucoup, à la vérité, font de bonnes choses sans les faire bien, comme les hypocrites qui font certes de bonnes choses, mais dans un mauvais esprit, avec une intention perverse et fausse. Dieu, lui, fait toutes choses bonnes et il les fait bien. Le Seigneur est juste en toutes ses voies, fidèle en tout ce qu’il fait (Ps 144,17). Tout cela, ta sagesse l’a fait (Ps 103,24), c’est-à-dire : Tu l’as fait avec la plus grande sagesse et très bien. C’est pourquoi la foule dit : Il a bien fait toutes choses.
Et si Dieu, sachant que nous trouvons notre joie dans ce qui est bon, a fait pour nous toutes ses œuvres bonnes et les a bien faites, pourquoi, de grâce, ne nous dépensons-nous pas pour ne faire que des œuvres bonnes et les bien faire, dès lors que nous savons que Dieu y trouve sa joie ?

Vous demanderez : « Que devons-nous faire pour mériter de jouir éternellement des bénédictions divines ? » Je répondrai en une phrase : « Puisque l’Église est appelée l’Épouse du Christ et de Dieu, nous devons faire ce qu’une femme mariée, une bonne épouse, fait pour son époux, et alors Dieu nous traitera comme un bon époux traite son épouse bien-aimée. Voici ce que le Seigneur dit par la bouche d’Osée : Tu seras ma fiancée, et je t’apporterai la justice et le droit, l’amour et la tendresse ; tu seras ma fiancée, et je t’apporterai la fidélité, et tu connaîtras le Seigneur » (Os 2,21-22).
Ainsi, mes frères, nous serons heureux dès cette vie même, ce monde sera pour nous un paradis terrestre. Avec les Hébreux nous nous nourrirons, dans le désert de cette vie, de la manne céleste, si, en suivant l’exemple du Christ, nous nous appliquons, autant que nous le pouvons, à bien faire toutes nos actions, de sorte que l’on puisse dire à propos de chacune de nos œuvres : Il a bien fait toutes choses.

 

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Mgr Francesco Follo

Mgr Francesco Follo est ordonné prêtre le 28 juin 1970 puis nommé vicaire de San Marco Evangelista à Casirate d’Adda de 1970 à 1976. Il obtient un doctorat en Philosophie à l’Université pontificale grégorienne en 1984. De 1976 à 1984, il travaille comme journaliste au magazine Letture du Centre San Fedele de la Compagnie de Jésus (jésuites) à Milan. Il devient membre de l’Ordre des journalistes en 1978. En 1982, il occupera le poste de directeur-adjoint de l’hebdomadaire La Vita Cattolica. De 1978 à 1983, il est professeur d’Anthropologie culturelle et de Philosophie à l’Université catholique du Sacré Cœur et à l’Institut Supérieur des Assistant Educateurs à Milan. Entre 1984 à 2002, il travaille au sein de la Secrétairerie d’Etat du Saint-Siège, au Vatican. Pendant cette période il sera professeur d’Histoire de la Philosophie grecque à l’Université pontificale Regina Apostolorum à Rome (1988-1989). En 2002, Mgr Francesco Follo est nommé Observateur permanent du Saint Siège auprès de l’UNESCO et de l’Union Latine et Délégué auprès de l’ICOMOS (Conseil international des Monuments et des Sites). Depuis 2004, Mgr Francesco Follo est également membre du Comité scientifique du magazine Oasis (magazine spécialisé dans le dialogue interculturel et interreligieux). Mgr Francesco Follo est Prélat d’Honneur de Sa Sainteté depuis le 27 mai 2000.

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