« Plus de 70 pour cent des victimes de la traite sont des femmes et des filles et un tiers d’entre elles sont mineures » : le cardinal secrétaire d’Etat, Pietro Parolin, a déploré ces chiffres dramatiques dans son homélie pour la messe de clôture de la première journée du congrès du « Groupe Sainte-Marthe », célébrée jeudi 8 février 2018 en la basilique vaticane, en présence de représentants de l’Église, des magistrats, des agents de police et des forces de l’ordre, du personnel humanitaire engagé dans la lutte contre cette forme moderne d’esclavage, rapporte L’Osservatore Romano en italien du 10 février 2018.
Les libérer
Faisant allusion à l’épisode de l’Évangile de Marc (7,24-30), le Secrétaire d’Etat a constaté que l’un des « nombreux démons qui affligent l’humanité de nos jours » c’est « le commerce cruel et brutal qui détient des millions de personnes dans un état d’esclavage, sans la moindre préoccupation pour les plus vulnérables ».
Le cardinal italien a évoqué à la situation des victimes « dans les heures horribles de l’exploitation, de la honte, de la souffrance physique et morale », et il a invité à se demander : « Comment pouvons-nous les libérer ? Comment pouvons-nous empêcher qu’elles soient à nouveau piégées ? Comment pouvons-nous prévenir ce phénomène abominable ? »
Aux yeux de Dieu
« Chacun d’eux est présent aux yeux de Dieu », a-t-il insisté: « les pêcheurs réduits en esclavage sur les chalutiers, les pères de famille contraints à faire des travaux inhumains après avoir espéré reconstruire une vie digne à l’étranger, et les enfants handicapés contraints à faire l’aumône », « les enfants abusés par des pédophiles, les femmes jetées dans les rues de la ville et exploitées pour la pornographie et la prostitution, les jeunes filles (…) obligées d’épouser des hommes bien plus âgés et les personnes à qui l’on vole les organes, par le mensonge, la fraude et la violence. Chacun d’eux, est présent aux yeux de Dieu ».
« On ne peut se résigner à cette situation », a déclaré le Secrétaire d’Etat: « Les chrétiens ne cèdent jamais, quelle que soit la taille des défis, parce que nous savons que le Christ a déjà vaincu le mal et la mort. Le Seigneur nous demande de prendre soin de ces « plus petits » dans notre monde, ces « produits » de la culture du rebut, comme aime le dire le pape François, une culture qui les exclut, comme des objets, de ce que l’on appelle la société « civile ». »
Le thème de la Journée mondiale contre la traite était cette année: « Migration sans traite. Oui à la liberté ! Non à la traite ! » Le cardinal Parolin a déploré que « tristement, trop souvent, dans des situations de guerre, de violence, de faim et d’impossibilité de survivre, l’unique espérance de salut pour de nombreuses personnes est de tenter sa chance à l’étranger, même si elles sont conscientes des risques encourus ». Et le premier de ces risques c’est d’être « trompés, y compris par des parents et des amis » ou de finir dans cette toile – « qui implique tragiquement presque tous les pays du monde » – tissée par des trafiquants « cyniques, insensibles et corrompus ».
Une source d’espérance pour beaucoup
Citant le premier Livre des Rois (11,4-13), il a fait observer comment Dieu agit: « Quand l’humanité s’égare et abandonne le Dieu vivant pour suivre et adorer d’autres dieux, qu’il s’agisse du pouvoir, de l’argent ou du plaisir comme une fin en soi », le Seigneur « cherche d’autres personnes : des personnes avec un cœur pur et fidèle, qui puissent réaliser, avec lui et avec sa grâce, le plan de salut qu’il a conçu pour le bonheur de ses créatures ». « Nous voulons être ces personnes, des hommes et des femmes au cœur pur et fidèle, qui travaillent avec le Seigneur pour la libération et le salut de son peuple », a déclaré le cardinal Parolin.
Il a évoqué l’itinéraire de sainte Joséphine Bakhita, qui a fait l’expérience de « l’horreur de l’esclavage ». Et il a fait cette confidence: « Il y a dix jours, j’ai eu la joie de prier devant lta tombe qui contient sa dépouille mortelle dans l’église des sœurs canossiennes à Schio. J’ai frémi en écoutant les passages de son autobiographie lue pendant la cérémonie qui commémorait le soixante-dixième anniversaire de sa mort. Et pourtant son histoire peut aussi devenir une source d’espérance pour beaucoup. »
Avec une traduction d’Hélène Ginabat