Cathédrale de Monreale @ sicile-sicilia.net

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Sicile: le grand art chrétien, preuve de la vérité de la foi, par le card. Parolin (traduction complète)

750ème anniversaire de la cathédrale de Monreale (Sicile)

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« La splendeur de la cathédrale nous fait remonter à la foi qui l’a rendue possible. Le grand art chrétien est vraiment, avec le témoignage du martyre et la charité active, la preuve la plus convaincante de la vérité de la foi », a déclaré le cardinal Pietro Parolin dans la cathédrale de Monreale, en Sicile.
Le cardinal secrétaire d’État a prononcé l’homélie de la célébration eucharistique qu’il a présidée, à l’occasion du 750ème anniversaire de la dédicace de la cathédrale de Monreale, le 27 avril 2018.
Cette splendeur, a poursuivi le cardinal Parolin, « invite à prendre au sérieux la Révélation chrétienne parce qu’une telle cascade de beauté renvoie à la source qui l’a inspirée, à des générations de croyants qui surent, à travers la pierre et la mosaïque, manifester la joie intérieure du disciple racheté par le Christ »
« Mais les splendides tesselles suggèrent quelque chose de plus important », a expliqué le cardinal, « comme les lectures de la messe d’aujourd’hui nous aident à le comprendre. Elles mettent en rapport l’édifice église avec le peuple de Dieu qui s’y rassemble. La beauté extérieure du temple trouve écho dans la beauté de l’âme de tous les fidèles, sanctifiée par la grâce grâce au baptême et aux autres sacrements qui font de nous les membres du Corps du Christ ».
Voici notre traduction de l’homélie que le cardinal Pietro Parolin a prononcée au cours de la célébration eucharistique, en italien.
HG
Homélie du cardinal secrétaire d’État Pietro Parolin
Éminences,
Cher Mgr Pennisi,
Chers confrères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers diacres,
Mesdames et Messieurs les Autorités civiles et militaires,
Chers frères et sœurs,
L’archidiocèse de Monreale fête aujourd’hui la conclusion des célébrations pour le 750ème anniversaire de la dédicace solennelle de sa splendide cathédrale, qui eut lieu le 25 avril 1267, par l’intermédiaire du cardinal français Rodolfo Grosparmi, évêque d’Albano et légat pontifical du pape Clément IV. Je vous remercie, Excellence, de m’avoir invité à participer à ce moment de joie pour toute la communauté diocésaine et je salue avec affection fraternelle toutes les personnes présentes, au nom aussi du pape François qui m’a chargé de vous exprimer sa proximité et de vous transmettre sa bénédiction.
À la gratitude à l’égard du Seigneur pour cette œuvre magnifique, expression de la foi et du plus grand génie artistique, s’ajoute un motif ultérieur de joie, cher Mgr Pennisi, pour le souvenir reconnaissant du cinquième anniversaire du début de votre ministère pastoral dans cette église.
La scène qui s’ouvre au regard du visiteur de cette cathédrale – fut-il même le plus distrait ou le plus éloigné de la foi – suscite émerveillement pour l’harmonieuse et radieuse concentration d’une parfaite beauté. La splendeur des ors et des figures attire l’attention sur le Pantocrator, le Christ tout-puissant et bénissant de l’abside, immense, serein, glorieux qu’on ne se lasse pas de contempler. De nombreuses personnalités furent touchées par cet enchantement, parmi lesquelles le théologien allemand Romano Guardini, rempli de gratitude pour l’existence de ce temple, le p. David M. Turoldo, qui appela Monreale « admirable trésor » et tant d’autres.
La cathédrale de Monreale suscite les mêmes sentiments que ceux éprouvés par les ambassadeurs du prince Vladimir de Kiev lorsqu’en 987, participant à une liturgie dans une église de Constantinople, ils rapportèrent au roi qu’il leur semblait avoir été enlevés entre ciel et terre. La magnificence des mosaïques et de la construction tout entière, en effet, devient plus vive et vivifiante lorsqu’on participe à l’action liturgique, quand le peuple chrétien et son pasteur célèbrent, unis, les louanges du Seigneur et renouvellent son sacrifice sur la Croix. Les énergies et le génie employés pour la construction du temple sont au service de l’action de la prière de la communauté chrétienne. À la splendeur du lieu, qui re-parcourt à travers des peintures l’histoire du salut, correspond au miracle quotidien qui nous fait goûter l’Eucharistie. Les merveilles crées par l’art inspiré de la Parole de Dieu deviennent le lieu idéal pour accueillir la présence du Seigneur devenu nourriture et boisson de vie pour son peuple.
Participant avec dévotion à une action liturgique dans ce temple et, tout particulièrement à la sainte messe, nous pouvons donc faire l’expérience d’un temps et d’un lieu où l’humanité accède à l’éternité, effleure le divin et dialogue avec lui, tout en en recevant grâces et consolation. Nous pouvons entrer dans une terre bénie de frontière, où Dieu communique avec nous et nous avec lui. Grâce à l’Eucharistie dont nous nous nourrissons, nous formons une véritable communauté qui chemine ensemble et dépasse les égoïsmes stériles et les personnalismes vides.
La splendeur de la cathédrale nous fait remonter à la foi qui l’a rendu possible. Le grand art chrétien est vraiment, avec le témoignage du martyre et la charité active, la preuve la plus convaincante de la vérité de la foi, du fait que le Christ n’est pas un personnage relégué dans le passé, mais qu’il est le Ressuscité vivant qui guide l’histoire. La cathédrale de Monreale invite à prendre au sérieux la Révélation chrétienne parce qu’une telle cascade de beauté renvoie à la source qui l’a inspirée, à des générations de croyants qui surent, à travers la pierre et la mosaïque, manifester la joie intérieure du disciple racheté par le Christ.
En raison de l’inestimable valeur spirituelle et ecclésiale, outre qu’historique et artistique, de votre cathédrale, vous êtes appelés – avec l’aide de tous – à faire tous vos efforts pour la conserver et la maintenir éclatante de lumière et de beauté, afin d’être à la hauteur de vos prédécesseurs qui l’ont élevée. La cathédrale de Monreale est l’orgueil et la fierté de la ville, de l’archidiocèse et de toute la Sicile, est un écrin de foi qui s’est fait pierre et mosaïque pour donner le témoignage pérenne de l’attachement des Siciliens à leur Église et elle demande un soin, une attention et une générosité particuliers.
Mais les splendides tesselles suggèrent quelque chose de plus important, comme les lectures de la messe d’aujourd’hui nous aident à le comprendre. Elles mettent en rapport l’édifice église avec le peuple de Dieu qui s’y rassemble. La beauté extérieure du temple trouve écho dans la beauté de l’âme de tous les fidèles, sanctifiée par la grâce grâce au baptême et aux autres sacrements qui font de nous les membres du Corps du Christ.
Au magnifique édifice matériel correspond celui, spirituel, qui se construit dans l’amour. Saint Pierre, à ce propos, nous rappelle que : « Vous aussi, comme pierres vivantes, entrez dans la construction de la demeure spirituelle, pour devenir le sacerdoce saint et présenter des sacrifices spirituels, agréables à Dieu » (1 Pt 2,5). Les âmes sauvées par le Christ, habitées par l’Esprit Saint, en chemin vers le Règne de Dieu, sont le plus grand chef-d’œuvre et la plus belle cathédrale à garder propre, lumineuse et ferme dans ses bonnes œuvres.
Les réalités les plus importantes ne sont donc pas les murs couverts de mosaïques, mais les personnes qui reconnaissent le Seigneur Jésus comme pierre angulaire et qui se reconnaissent comme « pierres vivantes » d’un édifice spirituel, qui présente une beauté de sainteté que les pierres ne peuvent pas exprimer.
Mais on ne peut pas être pierres vivantes si l’on reste dans l’isolement, déconnecté de la communauté qui nous transmet les dons du Seigneur. On ne vit pas dans l’Église comme des atomes indépendants et autoréférentiels, parce que chacun est en relation vitale avec Dieu qui l’a créé et racheté et avec ses frères. L’Esprit-Saint nous a rassemblés en un seul peuple dont nous sommes les membres vivants. Il est donc nécessaire de soutenir son souffle et de nous efforcer de créer de l’harmonie, de faire chœur, pour diffuser un concert mélodieux qui multiplie les énergies au service du bien.
Nous sommes aidés à comprendre cette dynamique fondamentale par le passage des Actes des Apôtres que nous venons de lire, où sont présentés les piliers fondamentaux de l’Église des origines et, indirectement, de toute communauté vraiment ecclésiale qui s’exprime dans la persévérance, vécue dans la concorde et dans le partage des biens spirituels et matériels.
Le premier pilier est l’enseignement des apôtres, témoins directs du Seigneur, à intérioriser avec un effort sérieux et continu. Le second pilier est la communion qui indique ici le libre partage des biens matériels, lequel rend visible l’union spirituelle des croyants, appelés à être « un seul cœur et une seule âme » (4,32). La communion garantit que chacun ne manque pas du nécessaire pour vivre et que les pauvres puissent compter sur la solidarité et la générosité de tous. Qui veut être disciple du Seigneur ne peut pas ne pas venir en aide à celui qui est dans le besoin.
Comme l’affirme l’apôtre Jean : « n’aimons pas en paroles ni par des discours, mais par des actes et en vérité » (1 Jn 3,18). Le christianisme est, à l’imitation du Christ, irradiation vers tous et, en particulier, vers les pauvres, de la charité. Qui ne le reconnaît pas oublie que Notre Seigneur « lui qui est riche, il s’est fait pauvre à cause de vous, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté » (2 Cor 8,9), oublie que l’amour du prochain que nous voyons est la preuve et la vérification de notre amour pour Dieu que nous ne voyons pas.
Le troisième pilier est le pain rompu avec les frères dans l’Eucharistie dans la joie et la simplicité du cœur. En exerçant la vertu d’humilité, en participant aux joies et aux douleurs de la communauté, en faisant de la liturgie la principale source de la charité pour ressembler de plus en plus au pain eucharistique dont nous nous nourrissons, la foi devient lumière qui diffuse la charité. Comme l’a récemment affirmé le Saint-Père François à Molfetta : « Celui qui se nourrit de l’Eucharistie assimile la mentalité même du Seigneur. Il est le pain rompu pour nous et celui qui le reçoit devient à son tour pain rompu, qui ne se gonfle pas d’orgueil mais qui se donne aux autres : il cesse de vivre pour lui-même, pour son propre succès, pour avoir quelque chose ou pour devenir quelqu’un, mais il vit pour Jésus et comme Jésus, c’est-à-dire pour les autres… après la messe, on ne vit plus pour soi-même mais pour les autres » (Homélie du 20 avril 2018). L’Eucharistie – source et centre de la communauté – génère une charité concrète, sur les pas du Christ qui s’est fait charité du Père envers nous.
L’assiduité aux prières dans le temple, surtout dans certains moments importants de la vie de la communauté chrétienne, est le quatrième pilier. Lorsque les fidèles se réunissent, Dieu fait des signes et des prodiges, raffermit et fait grandir la communauté et disperses les forces qui désagrègent. Il en naît une vie belle et joyeuse, qui sait affronter les événements humains, dans leur alternance de joies et de douleurs, à la lumière de l’Évangile, sans fuir la réalité, mais avec la joie pascale dans le cœur, qui irradie une espérance indestructible de vie sans fin, avec Dieu, avec la Bienheureuse Vierge Marie et tous les saints.
Le passage évangélique que nous venons de proclamer nous fait faire encore un pas en avant. Jésus, s’adressant à la Samaritaine, lui dit : « Femme, crois-moi : l’heure vient où vous n’irez plus ni sur cette montagne ni à Jérusalem pour adorer le Père… Mais l’heure vient – et c’est maintenant – où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et vérité  » Jn 4,21-23). Jésus déplace l’attention bien au-delà du lieu extérieur !
Il n’est pas important d’adorer Dieu dans un lieu déterminé. Il est important, en revanche, de l’adorer dans la docilité à l’Esprit-Saint, avec une conscience limpide, loin du mal parce que rachetée par le Christ. La splendeur du temple et de la liturgie s’adresse aux âmes pour qu’elles deviennent à leur tour splendides par l’action de la grâce en elles. Ainsi, la prière et l’adoration deviendront vie et charité. Elles ont besoin – avant la beauté du temple de pierres – de la beauté d’un cœur docile, qui aime le Seigneur et le prochain et fasse place à Dieu à tous les moments de l’existence.
En ce jour où Monreale exulte dans le souvenir de la dédicace de sa cathédrale et fait joyeusement mémoire de l’entrée de son pasteur dans l’archidiocèse, nous pouvons répéter les paroles de l’Exultet qui résonnent dans la nuit glorieuse de la résurrection du Christ : « Qu’éclate dans l’Église la joie des fils de Dieu ».
Que les innombrables grâces accordées par le Seigneur soient l’occasion d’une vive reconnaissance et le motif d’un engagement renouvelé, au niveau personnel et familial, comme ecclésial et communautaire. Que la Vierge Mère de Dieu, à laquelle est dédié ce temple, sous le titre de Marie Naissante, Saint Castrense et tous les saints de cet archidiocèse, avec sainte Rosalie, sainte Agathe et le bienheureux Giuseppe (Pino) Puglisi, soient vos puissants intercesseurs auprès du Père, afin qu’il vous donne tout bien, consolation et grâce. Ainsi soit-il.
© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat
 

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Hélène Ginabat

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