L’homme est fait « non pas pour des besoins mais pour des désirs vrais », a souligné dom Bernardo Francesco Maria Gianni, prédicateur de la retraite de carême du pape François et de la Curie romaine, en cours à Ariccia, au sud de Rome. Dans sa cinquième méditation ce 13 mars 2019 au matin, l’abbé bénédictin olivétain a encouragé à retrouver le désir de se tourner vers le cœur de Dieu.
Citant la Règle de saint Benoît qui parle du « désir de Dieu d’être désiré », le père abbé de San Miniato – à Florence – a expliqué que c’est ce désir qui pousse Dieu « dans ce mouvement de descente du ciel pour voir, comme le dit la règle, s’il y a quelqu’un qui désire voir des jours heureux ». Il s’agit alors « de nous redécouvrir cherchés et désirés par le Seigneur, une expérience… de toute l’humanité ».
Le Seigneur perd tout bon sens pour chercher l’homme
C’est une forme de folie de la part de Dieu, a fait observer dom Bernardo Francesco Maria Gianni dans sa prédication rapportée par Vatican News : « une folie qui le pousse à se vider afin de chercher le désir de l’homme… Le Seigneur perd tout bon sens pour chercher l’homme qui s’est égaré ».
Dans le monde actuel, a-t-il constaté, les jeunes vivent « une désaffection du désir, du désir des choses qui durent, importantes ». Il s’agit d’ « un état spirituel qui… se retire de l’histoire, s’enferme dans une sorte de paix, de nirvana, pour l’usage et la consommation de notre individualité de moins en moins invitée par la force de l’amour à se mettre en jeu sur les routes du monde ».
Le bénédictin a alors plaidé pour « une éducation qui mette en jeu la vie dans la dynamique de l’amour, de l’investissement, de la patience, qui est tout le contraire de la manière dont tant de jeunes italiens sont gâtés pour saturer immédiatement leurs nécessités et leurs besoins sans qu’on leur ouvre grand la porte étroite mais libératrice du désir ».
« On peut légitimement penser que l’avenir est entre les mains de ceux qui auront su donner aux générations de demain des raisons de vivre et d’espérer. », a-t-il poursuivi en citant Gaudium et spes. Et d’ajouter : « Alors, voici l’invitation à être une Église aux désirs ardents, dans une ville aux désirs ardents, dans un monde aux désirs ardents, réveillant le plus possible le désir de Dieu en tous ceux que nous rencontrons, leur rappelant la grâce et le mystère d’avoir été voulus, malgré les passages hors-piste, tortueux ou difficiles de leur vie peut-être encore jeune. »
Une parole nouvelle sur la dignité de tous les hommes
Dom Bernardo Francesco Maria Gianni a cité également Evangelii gaudium, invitant à annoncer l’Evangile « sans exclure personne », non pas comme « un nouveau devoir », mais comme « une joie… un bel horizon… un banquet désirable ». « Est-ce que nous pensons à ne pas trahir la dimension du désir que le Seigneur a inscrite dans son Évangile ? Est-ce que nous ne l’obscurcissons pas, nous ne l’atténuons pas, nous ne le rabaissons pas ? » a-t-il questionné.
« Aujourd’hui, a-t-il souligné, nous sommes tentés de réduire l’homme à une machine qui fonctionne tant qu’elle fonctionne, tant qu’elle produit, tant qu’elle est un motif d’intérêt, de gain, tant qu’elle a une mécanique qui, en fait, en assure le fonctionnement ». Il faut donc « dire une parole nouvelle sur la dignité de tous les hommes, de toutes les femmes, surtout des plus pauvres, de ceux qui… croient désormais que leur horizon n’est fait que de besoins et de nécessités ». L’Eucharistie « réveille, en eux aussi et surtout pour eux, la conscience d’être faits non pas pour des besoins mais pour des désirs vrais ».
L’abbé a conclu par cet avertissement : « Celui qui ne donne pas son corps et son sang pour ses frères, comme Jésus, ne vit pas de l’Eucharistie, et l’Église n’a pas d’autre manière d’être dans la société. »