Le card. Pietro Parolin, Davos, 19 janv. 2017 © capture de Zenit

Le card. Pietro Parolin, Davos, 19 janv. 2017 © capture de Zenit

Pour prévenir les catastrophes, agir dans trois directions, par le card. Parolin

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Lettre au président du Mexique pour le sommet de Cancun (traduction complète)

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Dans la gestion des catastrophes, le cardinal Parolin recommande de « faire en sorte que la résilience aille de pair avec le développement d’une collaboration fondée sur le bien commun, réelle, responsable et fraternelle ». Une collaboration pour et avec les plus pauvres pour prévenir les risques.
Le cardinal secrétaire d’Etat Pietro Parolin  a en effet adressé une lettre au président mexicain, Enrique Peña Nieto, en tant que président de la Plateforme mondiale pour la réduction des risques de catastrophe, reconnue par l’Assemblée Générale des Nations Unies comme le principal Forum mondial de discussion, de partenariat, de mise en œuvre et d’évaluation des stratégies et des instruments internationaux pour la Réduction des risques de catastrophe. Il s’est réuni pour la cinquième fois, du 22 au 27 mai 2017, à Cancun (Mexique).
Il a appelé de ses vœux « un changement de mentalité et de modes de vie » : « Quand nous prenons en considération le futur de l’humanité, nous ne pouvons pas nous limiter à des aires techniques ou sectorielles: nous parlons de valeurs, de responsabilité, de solidarité partagé qui mettent en jeu le bien de la famille humaine entière. »
Il a dit espérer que l’année 2017 permette concrétiser les trois plans d’action de l’ONU adoptés en 2015: le cadre d’action de Sendai pour la réduction des risques de catastrophes, l’Agenda 2030 pour le développement durable et l’Accord de Paris sur le climat.
Voici notre traduction intégrale de la lettre du cardinal Parolin, publiée par le Saint-Siège en italien et en anglais.
Lettre du card. Parolin
Excellence,
La communauté internationale est en train de réaliser l’importance de la prévention et de la stabilité. En effet, l’année 2015 a été marquée par l’adoption de trois accords, trois Plans d’action, significatifs pour le futur de l’humanité, et fortement liés entre eux: le Sendai Framework pour la réduction des risques de catastrophe 2015-2030, l’Agenda 2030 pour le développement durable et l’Accord de Paris sur les changements climatiques. L’année 2017 constitue un virage important dans ce processus, pour déterminer et concrétiser les moyens les plus efficaces à mettre en œuvre pour qu’ils se réalisent.
Ce processus a deux grands défis devant lui : intégration des activités pour la réduction des dangers de catastrophe, et celles pour le développement intégral, pour l’éradication de la pauvreté, pour la lutte contre l’exclusion sociale, pour une adaptation aux changements climatiques et pour leur atténuation.
Face à ces défis, je voudrais souligner trois aspects qui touchent au thème de cette rencontre : la réduction des risques de catastrophe.
I. Le premier aspect porte sur la nécessité de renforcer les activités de prévention, d’éducation et de formation pour réduire les pertes humaines, physiques et économiques, causées par les catastrophes naturelles.
Celles-ci, reconnaissons-le, sont souvent le fruit d’incapacités humaines à les gérer et accentuées par des initiatives humaines mal calibrées, qui ne tiennent pas compte de l’ordre d’importance des priorités.
Développer la conscience des risques que posent les dangers naturels demande une véritable prise de conscience par rapport à ces risques et aux différentes possibilités pour les prévenir. Telle prise de conscience influerait sur une meilleure gestion des activités humaines dans tant de domaines. Je pense par exemple à la gestion de l’eau (cf. Discours au séminaire de l’académie pontificale des sciences sur le droit humain à l’eau, Vatican, 24 février 2017), précieuse ressource qui figure aussi parmi les causes principales des catastrophes naturelles.
Il existe désormais tant d’outils éducatifs et de « early warning » qui, bien utilisés, peuvent réduire d’un côté considérablement le nombre de vies perdues après une catastrophe naturelle; et de l’autre promouvoir au niveau mondial et local une véritable culture qui réduise les risques des catastrophes et pour la résilience, une culture  qui ne manque pas de répercussions positives sur la lutte contre la pauvreté et le changement climatique, sur la reconnaissance de la dignité humaine et la centralité de l’être humain.
II. Le deuxième aspect appelle en cause l’importance que ces processus de conscientisation attachent une attention particulière aux populations les plus vulnérables. Les plus pauvres sont souvent les principales victimes des catastrophes naturelles, qui déstabilisent les économies et les sociétés les plus fragiles et frappent un habitat ou des milieux déjà précaires.
Une implication directe de ces personnes dans les processus d’éducation, de « knowledge sharing » et de conscientisation dans le domaine de la prévention et de la réduction des risques après une catastrophe, est souhaitable. Toutefois, en plus d’activités  préventives il faudrait s’arrêter attentivement sur les réponses aux impacts des catastrophes naturelles qui, il est bon de rappeler, exigent une assistance non seulement matérielle, mais également  humaine et spirituelle.
Les catastrophes naturelles provoquent également des dommages psychologiques que l’on ne saurait négliger: la souffrance de ceux qui ont perdu des proches ou ont vu s’envoler les sacrifices de toute une vie » (Discours aux populations victimes de tremblement de terre, Mirandola, 2 avril 2017). Dans cette perspective, il est bien de s’activer pour reconstruire les conditions d’une vie digne pour ceux qui ont été frappés par ce genre de catastrophe.
III. Le troisième aspect porte sur la conscience que les victimes et les populations plus vulnérables jouent un rôle essentiel dans les processus de prévention, de réaction et de reconstruction. Celles-ci sont les premières concernées dans la planification à long terme face aux risques provoqués par les catastrophes naturelles. La capacité de mobilisation des communautés locales ne devrait jamais être sous-estimée lors de catastrophes.
Dans ce contexte, les traditions religieuses et culturelles sont très importantes et représentent des sources d’enrichissement pour la résilience. Tout ceci demande une large participation, collaboration, intégration, et un dialogue de tous les acteurs, surtout des communautés locales, dont les populations indigènes. Ces aspects constituent le cœur de cette Plate-forme mondiale pour la réduction des risques de catastrophe, dont l’objectif est de déterminer et partager des solutions innovantes pour une approche intégrée à tous les niveaux, local et international.
L’application correcte des trois documents cités demande un changement de mentalité et de mode de vie. Quand nous tenons compte de l’avenir de l’humanité, nous ne pouvons pas nous limiter à des régions spécifiques techniques ou sectorielles: nous parlons de valeurs, de responsabilité, de solidarité commune qui mettent en cause le bien de toute la famille humaine entière. Comme l’a fait remarquer le pape François: «Quand les personnes deviennent autoréférentielles et s’isolent dans leur propre conscience, elles accroissent leur voracité. […] Ne pensons pas seulement à l’éventualité de terribles phénomènes climatiques ou à de grands désastres naturels, mais aussi aux catastrophes dérivant de crises sociales, parce que l’obsession d’un style de vie consumériste ne pourra que provoquer violence et destruction réciproque» (Enc. Laudato si’, 204).
Au nom du Saint-Père le pape François, j’espère que les travaux de la Plate-forme mondiale seront fructueux et capables de faire en sorte que la résilience aille de pair avec le développement d’une collaboration fondée sur le bien commun, réelle, responsable et fraternelle. Dans cette perspective, le Saint-Siège est toujours prêt à offrir son aide.
J’ai l’honneur de vous transmettre à tous, ainsi qu’à tous ceux qui prennent part à cette importante rencontre, les meilleurs vœux du Saint-Père afin que vos délibérations  soient fécondes, confiant que celles-ci porteront à de vrais efforts consistants dans la manière d’affronter, dans la solidarité et le partage,  les défis communs auxquels nous sommes confrontés.
© Traduction de ZENIT, Océane Le Gall

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Océane Le Gall

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