Œcuménisme, émigration, Europe, relations avec Benoît XVI… le pape François a répondu aux questions de la presse, à son retour de voyage apostolique en Roumanie, ce 2 juin 2019.
Dans l’avion qui le ramenait de Sibiu à Rome, après trois jours de visite dans le pays, le pape a donné, comme de coutume, une conférence de presse, durant laquelle il a notamment évoqué la forte émigration des Roumains, dont il a vu la cause dans « l’ordre financier mondial » : après la chute du communisme, « tant d’entreprises étrangères ont fermé pour ouvrir à l’étranger et pour gagner plus… cela c’est aussi une injustice mondiale et générale, un manque de solidarité ». Il a au contraire lancé un appel à « la société mondiale », afin de promouvoir « des sources de travail ».
L’œcuménisme du pauvre
En s’arrêtant sur le dialogue avec les orthodoxes – majoritaires en Roumanie – le pape a salué la figure du patriarche Daniel, chef de l’Eglise orthodoxe roumaine, qu’il a rencontré le 31 mai : « un homme de grand cœur, un grand érudit qui connaît la mystique des pères du désert… un homme de prière ». « Nous avons parlé comme frères », a dit le pape.
Et d’encourager l’œcuménisme en plaidant pour « les relations de la main tendue quand il y a des conflits ». « L’œcuménisme se fait en marchant ensemble », a-t-il ajouté en citant « l’œcuménisme du témoignage… de la prière, du sang… puis l’œcuménisme du pauvre » qui consiste à réaliser ensemble des œuvres de charité. « On peut marcher ensemble, a encore assuré le pape : unité, fraternité, main tendue… ne pas médire des autres. Nous avons tous des défauts, tous ; si nous marchons ensemble, laissons les défauts de côté. »
Le pape est revenu également sur la prière du Notre Père qu’il a présidée dans la nouvelle cathédrale orthodoxe de Bucarest, au côté du patriarche Daniel. Bien que la prière ait eu lieu en deux temps – le pape l’a récitée en latin, puis le patriarche en roumain – il a estimé que l’unité était présente dans l’assemblée : « J’ai vu pendant le Notre Père, les gens – que ce soit en roumain ou en latin – priaient. Les gens vont au-delà… nous les chefs devons faire des équilibres diplomatiques pour s’assurer que nous allons ensemble. Il y a des habitudes, des règles diplomatiques qu’il est bon de protéger pour que les choses ne tombent pas en ruines. Mais le peuple prie ensemble, nous aussi quand nous sommes seuls nous prions ensemble. »
Tous responsables de l’Europe
« Nous sommes tous responsables de l’Union européenne », a insisté le pape alors que la Roumanie assurait durant encore un mois la présidence de l’UE : « Si l’Europe ne regarde pas bien les défis futurs, l’Europe souffrira, sera rabaissée. » Il s’agit de ne pas la laisser devenir « la grand-mère Europe » mais de « reprendre la mystique des pères fondateurs ».
« L’Europe a besoin d’être elle même, d’avoir sa propre identité, sa propre unité, a-t-il poursuivi… Il y a une mondialisation où se respectent les cultures de tous, mais tous unis. S’il vous plaît, que l’Europe ne se laisse pas vaincre par le pessimisme ou par les idéologies. L’Europe est attaquée non pas par des canons ou des bombes en ce moment, mais pas des idéologies, des idéologies qui ne sont pas européennes, qui viennent d’ailleurs, ou qui naissent dans de petits groupes. »
En signe de sa préoccupation, le pape a demandé aux journalistes croyants de « prier » pour que l’Europe « redevienne le rêve des pères fondateurs ».
Semer de l’espoir, pas de la peur
Sur ses relations avec son prédécesseur Benoît XVI, le pape a confié : « Chaque fois que je vais le voir je lui prends la main, je le fais parler. Il parle peu, il parle lentement mais avec la même profondeur et lucidité que toujours. Il a une grande lucidité. Son problème, ce sont les genoux pas la tête ! En l’écoutant parler, je sens les racines qui m’aident à aller de l’avant ; je sens cette tradition de l’Eglise qui n’est pas une chose de musée. »
« Jamais un politique ne doit semer la haine et la peur, jamais. Seulement de l’espoir, avec justesse, exigence », a déclaré le pape en répondant à une question sur une campagne du vice-Premier ministre italien Matteo Salvini. Pointant du doigt « la maladie de la corruption », « universelle », il a souligné : « Nous devons aider les politiques à être honnêtes, à ne pas faire campagne avec des bannières malhonnêtes, la calomnie, la diffamation, les scandales. »
Le pape François a aussi encouragé les journalistes à être des « témoins » de la communication : « Notre époque a tellement besoin d’un peu moins de contacts et un peu plus de communication. »