Mgr Bernardito Auza @ Holy See Mission

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L’éducation est bien plus que l’instruction, par Mgr Auza

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Journée internationale de l’Éducation à l’ONU

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« L’éducation est bien plus que l’instruction », déclare Mgr Auza ; elle vise « non seulement à aider les gens à devenir plus intelligents » mais surtout « à devenir des personnes plus sages et véritablement bonnes. Il ne s’agit pas seulement de donner des informations, mais une formation. Le but n’est pas simplement de développer le cerveau, mais surtout le caractère ».

Mgr Bernardito Auza, observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies, est intervenu à la célébration inaugurale de la Journée internationale de l’Éducation, à New York, le 24 janvier 2019. Il a terminé en citant Haim Ginnott, rescapé des camps de la mort, qui écrivait aux enseignants : « Aidez vos étudiants à devenir humains ».

L’éducation est « un bien en soi » et un « élément crucial du développement intégral ainsi que de la construction et du maintien de la paix et de la sécurité ». Pour les Nations Unies, rappelle le nonce philippin, l’éducation est « un outil fondamental et essentiel à la réalisation des Objectifs de Développement durable », à laquelle la communauté internationale « s’est résolument engagée ».

Voici notre traduction du discours de Mgr Auza.

HG

Intervention de Mgr Bernardito Auza

Madame la Modératrice,

Excellences, Chers amis,

Je suis très heureux de représenter le Saint-Siège aujourd’hui, à la célébration inaugurale de la Journée internationale de l’Éducation. Avant l’adoption de la Résolution 73/25 le 3 décembre dernier, il existait 158 différents Journées internationales observées par les Nations Unies. Alors que certaines traitent de l’éducation, comme la Journée internationale pour l’Alphabétisation le 8 septembre et la Journée mondiale des Professeurs le 5 octobre, il convient de consacrer une journée au travail de l’éducation dans son ensemble, en tant que bien en soi et aussi en tant qu’élément crucial du développement intégral ainsi que de la construction et du maintien de la paix et de la sécurité.

Lorsque le pape François s’est adressé à l’Assemblée générale des Nations Unies en septembre 2015, s’exprimant juste avant l’adoption de l’Agenda 2030 pour le Développement durable, il a parlé trois fois de l’importance de l’éducation et a souligné que cela signifie l’éducation pour tous. Pour permettre aux hommes et aux femmes d’échapper à la pauvreté extrême, a-t-il dit, nous devons les aider à être des acteurs dignes de leur propre destinée.

Dans le langage des Nations Unies, cela signifie que l’éducation est un outil fondamental et essentiel à la réalisation des Objectifs de Développement durable (ODD). C’est la raison pour laquelle, en adoptant l’Agenda 2030, la communauté internationale s’est résolument engagée dans l’ODD 4 pour garantir qu’en 2030, toutes les filles et tous les garçons auront accès au développement du jeune enfant, aux soins et à l’éducation pré-primaire, à une éducation primaire et secondaire libre, équitable et de qualité, ainsi qu’à un enseignement technique, professionnel et universitaire abordable et de qualité.

Ces engagements découlaient du fait qu’il y a 120 millions d’enfants dans le monde qui n’ont pas accès à l’école primaire ou secondaire et 130 autres millions qui vont dans des écoles d’une qualité si pauvre qu’ils n’acquièrent même pas les bases de la lecture, de l’écriture ou du calcul.

La résolution 73/25 a explicitement invité les organisations confessionnelles à observer cette journée d’une manière appropriée. L’Église catholique est très fière d’avoir joué, tout au long de ses 2000 ans d’histoire, un rôle majeur dans l’essor des écoles, universités et autres formes d’institutions d’apprentissage dans tant de lieux. Des milliers d’ordres catholiques religieux ont été fondés dans le but explicite et avec le charisme d’éduquer les enfants, à une époque où seules les familles les plus riches avec tuteurs privés recevaient une éducation formelle.

Je suis reconnaissant envers Son Excellence Mary Robinson et Son Excellence la représentante permanente d’Irlande auprès des Nations Unies, l’ambassadrice Geraldine Byrne Nason, d’avoir rendu hommage aux missionnaires irlandais pour leur immense contribution à l’éducation dans de nombreuses régions du monde, notamment dans les zones défavorisées.

Aujourd’hui, l’Église catholique gère environ 220.000 écoles de niveau pré-universitaire dans toutes les régions du monde, éduquant plus de 65 millions d’enfants et de jeunes ainsi que des millions d’autres dans ses milliers d’écoles techniques et d’universités. Plus de la moitié de ces étudiants sont des filles et beaucoup d’entre elles ne sont pas catholiques, ni même chrétiennes ; elles appartiennent à d’autres religions ou sont sans confession. Dans tout cela, les écoles gérées par l’Église catholique ne cherchent à supplanter ni les parents ni l’État : elles assistent les parents qui sont les premiers enseignants de leurs enfants dans cette école irremplaçable qu’est la maison, leur donnant l’opportunité de choisir l’éducation de leurs enfants ; et elles aident l’État à offrir à leurs jeunes citoyens des possibilités éducatives beaucoup plus grandes.

Cependant, l’accès à l’école et à l’éducation de base, bien qu’essentiel, ne suffit pas. Pour que des enfants deviennent des adultes épanouis, il faut beaucoup plus. L’éducation est bien plus que l’instruction. Comme l’indique le terme latin edúcere, cela signifie faire sortir les gens des ténèbres de l’ignorance pour les conduire à la lumière du savoir, de l’immaturité à la véritable maturité. Son but n’est pas seulement d’aider les gens à devenir plus intelligents, mais à devenir des personnes plus sages et véritablement bonnes. Il ne s’agit pas seulement de donner des informations, mais une formation. Le but n’est pas simplement de développer le cerveau, mais surtout le caractère.

À cet égard, je ne peux m’empêcher de rappeler les paroles obsédantes de Haim Ginnott qui, ayant survécu aux horreurs de l’Holocauste, est devenu psychopédagogue et a écrit aux professeurs au sujet de la place indispensable d’une formation éthique appropriée dans l’éducation. « Cher professeur », a-t-il écrit, « Je suis un survivant d’un camp de concentration. Mes yeux ont vu ce qu’aucun homme ne devrait voir : des chambres à gaz construites par des ingénieurs expérimentés. Des enfants empoisonnés par des médecins instruits. Des nourrissons tués par des infirmières qualifiées. Des femmes et des enfants abattus et brûlés par des élèves diplômés du lycée et du collège. Je me méfie donc de l’éducation. Voici ma demande : Aidez vos étudiants à devenir humains. Vos efforts ne doivent jamais produire des monstres érudits, des psychopathes compétents, des Eichmann instruits. La lecture, l’écriture et l’arithmétique ne sont importantes que si elles servent à rendre nos enfants plus humains ».

Mesdames et Messieurs,

Aujourd’hui, nous célébrons et nous nous engageons encore davantage pour le bien, l’importance, le droit et la vocation élevée de l’éducation, qui forme des personnes à être plus humaines et plus compatissantes, prêtes à servir en tant qu’acteurs dignes de leur propre développement intégral et de celui du monde et en tant que bâtisseurs de paix, tels que chaque époque en a besoin.

Merci pour votre invitation à participer aux festivités de ce jour.

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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