A Hiroshima, « véritable catéchèse humaine sur la cruauté», comme il l’a rappelé à bord de l’avion, le Pape s’était rendu au Mémorial de la Paix. Il y avait affirmé que la « vraie paix » est « le fruit de la justice, du développement de la solidarité, de la sauvegarde de la maison commune et de la promotion du bien commun ».
« Hiroshima, a dit le pape dans l’avion, a été une véritable catéchèse humaine sur la cruauté, je n’ai pas pu voir le musée d’Hiroshima pour des raisons de temps, parce que c’était une mauvaise journée (horaires très serrés ndlr) mais on dit que c’est terrible: des lettres de chefs d’État, de généraux expliquant comment on pouvait faire un plus grand désastre. Pour moi, ce fut une expérience beaucoup plus touchante. »
La folie d’un seul
Plus encore, le pape a exprimé la nécessité d’inscrire l’immoralité de l’arme nucléaire dans le Catéchisme de l’Eglise catholique: non seulement de l’usage mais de la possession de l’arme nucléaire: « Et là j’ai rappelé que l’usage des armes nucléaires est immoral, c’est pourquoi cela doit aller dans le Catéchisme de l’Église catholique, et non seulement l’usage, mais aussi la possession, parce qu’un accident, ou la folie d’un dirigeant, la folie d’un seul peut détruire l’humanité. Pensons à cette phrase d’Einstein: “La Quatrième Guerre mondiale sera menée avec des bâtons et des pierres” ».
Le pape a commencé son voyage par Nagasaki avant d’aller à Hiroshima. Il a expliqué, toujours dans l’avion: « Nagasaki et Hiroshima ont toutes deux souffert de la bombe atomique, ce qui les fait se ressembler. Mais il y a une différence. Nagasaki n’a pas eu seulement la bombe, mais aussi les chrétiens. Nagasaki a des racines chrétiennes, le christianisme est ancien, il y a eu des persécutions de chrétiens dans tout le Japon mais à Nagasaki, celles-ci étaient très fortes. Le secrétaire de Nonciature m’a donné un fac-similé en bois où est écrit le « wanted » de l’époque : les chrétiens étaient recherchés ! Si tu en trouves un, dénonce-le et tu toucheras beaucoup, si tu trouves un prêtre, dénonce-le et tu toucheras beaucoup. C’est frappant, il s’est agi de siècles de persécution, c’est un phénomène chrétien qui en quelque sorte « relativise », dans le bon sens du terme, la bombe atomique. En revanche, aller à Hiroshima, c’est uniquement pour rappeler la bombe atomique, parce que ce n’est pas une ville chrétienne comme Nagasaki. C’est pourquoi je voulais aller aux deux. Dans les deux cas, il y a eu le désastre atomique».
Un témoin de l’horreur
Le pape a ainsi redit clairement l’appel lancé à Hiroshima, le 24 novembre, au mémorial du bombardement atomique du 6 août 1945. Si la condamnation n’est pas nouvelle, la décision de l’inscrire dans le catéchisme l’est.
Conférence de presse, Tokyo-Rome @ Vatican Media
La "cruauté" et l'arme atomique: conférence de presse Tokyo-Rome (2)
La « folie d’un seul » pourrait anéantir l’humanité
A Nagasaki, bombardée trois jours après Hiroshima, le pape avait averti, le 24 novembre également, que « la peur de la destruction réciproque ou sur une menace d’anéantissement total » ne peut pas apporter la paix.
Il a dit sa conviction « qu’un monde sans armes nucléaires est possible » et « nécessaire ».
Le pape aussi confié, pendant sa visite au Japon, qu’il se souvient avoir vu ses parents pleurer à la nouvelle du bombardement d’Hiroshima, il n’avait pas huit ans.
Un autre témoin a pleuré: l’ancien général des jésuites, le p. Pedro Arrupe, espagnol, était présent à Hiroshima, en tant que maître des novices des jeunes jésuites, quand la bombe a été larguée.
Médecin, apparemment indemne, il s’est dévoué nuit et jour avec ses novices, pour soigner les blessés et les moribonds. Il a été un témoin de l’horreur, de la « cruauté », il en a témoigné.
Les Japonais, catholiques ou non se souviennent de lui « comme d’un saint » a témoigné à Zenit Shintaro Yuzawa, responsable de l’aumônerie catholique japonaise de Paris. Sa cause de béatification a été ouverte en février dernier.