« Qui vend des armes a sur la conscience la mort d’enfants »: le pape François n’a pas mâché ses mots en répondant spontanément aux questions des jeunes, des enseignants, des familles du collège San Carlo de Milan.
L’institution catholique fête ses 150 ans: le pape les a quelque 2 600 personnes du collège au Vatican samedi matin, 6 avril 2019, accompagnés de Mgr Paolo Martinelli, évêque auxiliaire de Milan.
Fondé en 1869, le collège accueille aujourd’hui quelque 1 950 étudiants, grâce à 220 professeurs. Il a eu parmi ses étudiants Achille Ratti, qui deviendra le pape Pie XI. Le recteur le p. Alberto Torriani, a rappelé dans son allocution que pendant l’Occupation le collège a été le refuge de persécutés.
Le pape François a rappelé la question de Dostoïevski: « Pourquoi les enfants souffrent-ils? » avant d’ajouter: « Il y a des questions qui n’auront pas de réponses. Il n’y a pas de réponses toutes faites (…). Les questions qui n’ont pas de réponses font grandir dans le sens du mystère. »
« Sur la conscience d’un peuple qui fabrique les armes et les vend, il y a la mort de tout enfant, de toute personne, il y a la destruction des familles », insite le pape qui déplore l’existence dans le monde de 900 millions de mines terrestres anti-personnel: « Quand un pauvre paysan ira travailler la terre, il mourra, ou il restera mutilé. Cel, ce n’est pas Dieu qui ‘a fait: tu l’as fait, nous, ma patrie, mon pays ».
Le pape a conclu: « Voilà les jeunes courageux dont nous avons besoin. »
Le harcèlement à l’école
Puis il a à son tour posé une question aux jeunes sur la paix, mais à l’école: « Parlons de l’école, de ta classe. Quand arrive un enfant, un jeune, peut-être un peu rond, qui ne sait pas jouer, qui est-ce qui invente et organise le harcèlement? C’est Dieu? C’est vous! Et à caque fois que vous faites du harcèlement, , à chaque fois, vous faites par ce geste une déclaration de guerre. Nous avons tous en nous la semence de la destruction des autres. Parce que nous avons toujours cette tendance à faire des différences et à nous enrichir de la pauvreté des autres? »
L’identité, le patriotisme
Le pape a ensuite répondu aux questions de professeurs et de parents. Notamment sur la capacité au dialogue: pas de dialogue possible si’ l’on n’a pas une « identité », des « racines », notamment grâce aux personnes âgées.
Il a encouragé l’éducation à la rencontre avec les autres qui sont différents: « Nous ne sommes pas des champignons nés tout seuls, nous sommes nés en famille, dans un peuple… et si souvent la culture « liquide » nous fait oublier que nous appartenons à un peuple. »
La mafia, ce n’est pas une invention des nigérians…
Faisant comprendre que l’éducation à la rencontre est importante, le pape François a fait observer que tous peuvent devenir délinquants et que dans tous les pays il y a des délinquants: la mafia, ce n’est pas une invention des nigérians… a fait observer le pape à propos de l’immigration. Il a invité à « ne pas avoir peur des migrants ».
Puis le pape évoque le racisme: « Si j’ai un coeur raciste je dois bien examiner en moi pourquoi et me convertir ».
Puis le pape a répondu à la question de « la tyrannie de l’indifférence » en pointant la cause: le « relativisme »: il y voit la racine des intégrismes et des fondamentalismes.
« La culture de l’indifférence, a dit le pape, est une culture qui n’est pas créative. Elle ne te fait pas grandir. Au contrire, la culture doit toujours s’intéresser aux valeurs, à l’histoire des autres. Cette culture de l’indifférence a tendance à éteindre la personne en tant qu’être autonome, pensant, pour la soumettre et la suffoquer. Faites attention à cette culture de l’indifférence. C’est de là que découlent les intégrismes, les fondamentalismes et l’esprit sectaire. Ce à quoi nous devons penser c’est à une culture ouverte, qui permette de regarder l’étranger, le migrant, celui qui appartient à une autre culture comme un sujet à écouter, considéré et apprécié. »
Puis le pape a recommandé aux enseignants et aux familles d’éduquer les jeunes non pas à « occuper des places » mais à mettre en route des processus dans le temps, avec cette règle que le temps « est supérieur à l’espace ».
Le pape a souligné l’importance d’éduquer les jeunes « ensemble », en groupes, pas « seuls »: qu’ils se soutiennent mutuellement.
Enfin, aux parents confrontés au départ des enfants avec la solitude du « nid vide », le pape leur a fait observer que cette solitude qui fait souffrir est cependant féconde: ils en verront les fruits, dans leurs enfants d’abord.