Caritas in veritate : Le développement des peuples et la technique

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Chapitre six de l’encyclique de Benoît XVI : L’amour de Dieu donne le courage d’agir

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ROME, Mardi 7 juillet 2009 (ZENIT.org) – « Le développement des peuples et la technique » : le 6e et dernier chapitre de « Caritas in veritate », aborde notamment la question de la « technique », ce qui constitue une des nouveautés du document. Et c’est pour mieux recentrer sur le bien de la personne  : « Le thème du développement des peuples est intimement lié à celui du développement de chaque homme ».

Rappelant l’importance de l’action libre et responsable de chacun, le pape rappelle en même temps la limite de la liberté humaine  : « Le développement de la personne s’étiole, si elle prétend en être l’unique auteur », car « il faut que l’homme rentre en lui-même pour reconnaître les normes fondamentales de la loi morale que Dieu a inscrite dans son cœur » (§ 68).

Une conception technique du progrès et de la paix

A propos du progrès technologique, le pape en reconnaît le bien fondé : « La technique permet de dominer la matière, de réduire les risques, d’économiser ses forces et d’améliorer les conditions de vie » et « technique s’inscrit donc dans la mission de cultiver et de garder la terre » et elle doit « tendre à renforcer l’alliance entre l’être humain et l’environnement appelé à être le reflet de l’amour créateur de Dieu » (§ 69).

Or, il n’en est pas ainsi. Là encore, il est question de la liberté : « Née de la créativité humaine comme instrument de la liberté de la personne, elle peut être comprise comme un élément de liberté absolue, liberté qui veut s’affranchir des limites que les choses portent en elles-mêmes », fait observer le pape. Il précise l’imopirtance du lien entre liberté et responsabilité morale : « Mais la liberté humaine n’est vraiment elle-même que lorsqu’elle répond à la fascination de la technique par des décisions qui sont le fruit de la responsabilité morale » (§ 70).

Benoît XVI déplore ainsi que le progrès des peuples soit envisagé uniquement comme une question technique : « Le développement des peuples est souvent considéré comme un problème d’ingénierie financière, d’ouverture des marchés, d’abattement de droits, d’investissements productifs et de réformes institutionnelles : en définitive comme un problème purement technique ». Les remèdes sont voués ainsi à la faillite.

De fait le pape affirme que « le développement est impossible, s’il n’y a pas des hommes droits, des acteurs économiques et des hommes politiques fortement interpellés dans leur conscience par le souci du bien commun » et que « la compétence professionnelle et la cohérence morale sont nécessaires l’une et l’autre ».

Benoît XVI applique ce qu’il vient dire d’une conception technique du progrès à la question de la paix elle-même  : « La paix, elle aussi, risque parfois d’être considérée comme un produit technique, fruit des seuls accords entre les gouvernements ou d’initiatives destinées à procurer des aides économiques efficaces ». Or, il souligne la nécessité « d’écouter la voix des populations concernées et examiner leur situation pour en interpréter les attentes avec justesse » (§ 72).

Le pape consacre également un paragraphe à la question des media et de leur rôle dans la mondialisation : « Conformément à ce que requiert une gestion correcte de la mondialisation et du développement, le sens et la finalité des médias doivent être recherchés sur une base anthropologique ».

Lorsque les media servent l’humanisation

Les media, fait remarquer Benoît XVI « peuvent être une occasion d’humanisation non seulement quand, grâce au développement technologique, ils offrent de plus grandes possibilités de communication et d’information, mais surtout quand ils sont structurés et orientés à la lumière d’une image de la personne et du bien commun qui en respecte les valeurs universelles ». Et ce n’est pas automatique.

En effet, ajoute le pape, pour favoriser « la liberté de tous » et « universaliser » le développement et la démocratie « pour tous », les media doivent avoir « pour objectif principal la promotion de la dignité des personnes et des peuples », être « expressément animés par la charité et mis au service de la vérité, du bien et d’une fraternité naturelle et surnaturelle » (§ 73).

Une conception technique de la bioéthique

Ce que le pape a dit du développent ou de la paix, il l’applique aussi au domaine de la bioéthique : « Un domaine primordial et crucial de l’affrontement culturel entre la technique considérée comme un absolu et la responsabilité morale de l’homme est aujourd’hui celui de la bioéthique, où se joue de manière radicale la possibilité même d’un développement humain intégral ».

Là encore, Benoît XVI souligne l’importance du rapport entre foi et raion : « Attirée par l’agir technique pur, la raison sans la foi est destinée à se perdre dans l’illusion de sa toute-puissance. La foi, sans la raison, risque de devenir étrangère à la vie concrète des personnes » (§ 74).

Une conception matérialiste et mécaniste de la vie

Plus encore, abordant la question des biotechnologies, Benoît XVI affirme que « la question sociale est devenue radicalement une question anthropologique, au sens où elle implique la manière même, non seulement de concevoir, mais aussi de manipuler la vie, remise toujours plus entre les mains de l’homme par les biotechnologies ». Et de citer les « scenarios inquiétants » d’une « culture de mort » : avortement (« plaie tragique et profonde »), « planification eugénique systématique des naissances », euthanasie…

Le pape pose le diagnostic : « Derrière tout cela se cachent des positions culturelles négatrices de la dignité humaine. Ces pratiques, à leur tour, renforcent une conception matérialiste et mécaniste de la vie humaine ».

Et voilà une conséquence sur le développement : « Tandis que les pauvres du monde frappent aux portes de l’opulence, le monde riche risque de ne plus entendre les coups frappés à sa porte, sa conscience étant désormais incapable de reconnaître l’humain » (§ 75).

Pas sans mon âme

Mais Benoît XVI approfondit encore la conception de l’homme nécessaire à la promotion d’un développement, intégral et durable : « Le problème du développement est strictement lié aussi à notre conception de l’âme humaine (…). Le développement doit comprendre une croissance spirituelle, et pas seulement matérielle, parce que la personne humaine est une « unité d’âme et de corps » et qu’il n’y a pas « de développement plénier et de bien commun universel sans bien spirituel et moral des personnes ».

Le pape esquisse les conséquences psychologiques de ce déficit spirituel : « L’aliénation sociale et psychologique, avec toutes les névroses qui caractérisent les sociétés opulentes, s’explique aussi par des causes d’ordre spirituel » (§ 76).

Benoît XVI décrit en ces termes une sorte d’aveuglement procuré par la domination de la technique : « Cet « absolutisme de la technique » tend, fait observer le pape, « à provoquer une incapacité à percevoir ce qui ne s’explique pas par la simple matière ». Au contraire, le développement intégral de la personne humaine requiert « des yeux et un cœur nouveaux, capables de dépasser la vision matérialiste des événements humains et d’entrevoir dans le développement un « au-delà » que la technique ne peut offrir » (§ 77).

« L’humanisme qui exclut Dieu est un humanisme inhumain », conclut le pape. Au contraire, c’est en Dieu que se trouve l’énergie pour s’engager pour le développement : « L’amour de Dieu nous appelle à sortir de ce qui est limité et non définitif ; il nous donne le courage d’agir e
t de persévérer dans la recherche du bien de tous ».

Un engagement qui s’enracine dans la prière : « Le développement a besoin de chrétiens qui ont les mains tendues vers Dieu dans un geste de prière, conscients du fait que l’amour riche de vérité, caritas in veritate, d’où procède l’authentique développement, n’est pas produit par nous, mais nous est donné ».

C’est que se puise « la force, l’espérance et la joie nécessaires pour continuer à nous dévouer généreusement à la réalisation du « développement de tout l’homme et de tous les hommes ». »

Anita S. Bourdin

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ZENIT Staff

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