ROME, Vendredi 31 juillet 2009 (ZENIT.org) – Il n’y aura pas de paix sereine entre les deux rives de la méditerranée (nord et sud) tant que le phénomène douloureux des migrations n’aura pas été résolu.
C’est ce qu’a expliqué Mgr Claude Rault, évêque du diocèse de Laghouat-Ghardaïa en Algérie, lors de la messe qu’il a présidée dans le cadre du pardon des sept saints dormants d’Ephèse, dans les Côtes d’Armor, en Bretagne, dimanche 26 juillet.
Depuis 1954, un pèlerinage islamo-chrétien y est en effet organisé, avec des conférences et des tables rondes sur les relations entre chrétiens et musulmans.
Mgr Rault, qui est religieux missionnaire d’Afrique (Père blanc) a développé le thème du pèlerinage : « Que pouvons-nous faire pour une paix sereine entre les deux rives ? » en commentant l’Evangile de la multiplication des pains.
Comme premier geste pour construire la paix, l’évêque de Laghouat-Ghardaïa a exhorté à « regarder ce qui se passe sur nos deux rives, d’un regard de voyant, à la façon du Christ ».
« Ce regard va d’abord vers les malades puis vers la foule, vers les plus démunis », a-t-il expliqué.
« Jésus guérit les malades. Il va d’abord vers les plus atteints », car il s’intéresse aussi « au corps », et il donne à manger aux foules qui le suivent.
Mgr Rault souligne aussi que Jésus « responsabilise ses disciples », en leur demandant de leur donner eux-mêmes à manger.
L’évêque de Laghouat-Ghardaïa a expliqué comment son diocèse tente de mettre cela en pratique.
Dans un diocèse « qui ne dépasse pas la centaine de chrétiens », Mgr Rault reconnaît qu’ils sont amenés à regarder autour d’eux, à poser sur les autres « un regard de compassion active », à « collaborer en partenariat » avec les autres, pour « une terre plus fraternelle », même si « cela ne va pas toujours de soi », et que « tout engagement pour la paix provoque l’adversité ».
« Nous découvrons que l’Esprit Saint est plus grand que notre coeur », a-t-il insisté. « Nous avons besoin de la différence de l’autre pour exister », les différences « nous enracinent dans la profondeur de notre foi ».
Il a expliqué que les échanges ne peuvent être vrais que s’ils visent à construire une terre qui est celle que Dieu veut pour nous.
« Jamais nous n’utilisons nos activités pour convertir l’autre à la foi chrétienne », car ce serait « dévoyer le message du Christ ». « La conversion est l’affaire de Dieu », a-t-il poursuivi.
Pour terminer, Mgr Rault a confié un « souci » à l’assemblée : le « drame douloureux » des migrations.
« Nous sommes démunis devant ces flux migratoires », « comme les disciples devant Jésus », avant la multiplication des pains, qui s’interrogent : « Où pouvons-nous leur trouver à manger ? », a-t-il reconnu.
« Pourquoi tant d’hommes et de femmes d’Afrique tentent-ils la double traversée du désert et de la mer pour rejoindre l’autre rive, au risque de leur vie ? », s’est interrogé Mgr Rault.
« Il faut que la réponse soit forte et profonde, vitale. Si nous ne leur donnons pas le pouvoir d’accéder au mode de vie auquel ils ont droit ils viendront chez nous chercher ce qu’ils n’ont pas chez eux et nous n’aurons pas le droit de le leur refuser. La question des migrations est un fait de notre temps », a-t-il affirmé.
« Cinq pains et deux poissons, qu’est-ce que cela pour tant de monde ? » s’est-il demandé, en revenant au texte de l’Evangile.
« C’est dans le partage de nos pauvretés que nous pourrons trouver une juste réponse à la question de Jésus, mais une chose est sûre : il n’y aura pas de paix sereine entre les deux rives tant que ce drame ne trouvera pas son issue », a-t-il conclu.
L’origine du pardon des Sept Saints remonte au 3e siècle, les Sept Saints de Vieux-Marché présentant une analogie avec les Sept Dormants d’Ephèse, explique Isabelle Maillet sur le site de la Conférence des évêques de France. En 250 ap. JC, afin d’affermir l’unité romaine autour de sa religion, l’empereur Dèce décréta une persécution contre les chrétiens qui refusaient de sacrifier aux dieux romains et ne reniaient par leur foi. Il envoya ses ambassadeurs à Ephèse pour faire renier leur foi et leur loi aux sept frères qui avaient de hautes charges. Devant leur refus, l’empereur leur fit enlever leurs fortunes et leurs charges, les réduisant ainsi à mendier leur pain pour leur fidélité à Jésus. Les découvrant cachés dans une caverne, il donna l’ordre de les emmurer afin qu’ils meurent de faim et de soif. Les sept frères furent alors pris d’un sommeil qui dura 177 ans et c’est ainsi que lorsqu’on ouvrit la caverne, on les trouva réveillé, Dieu les ayant ressuscités pour rendre témoignage de la résurrection des morts.
C’est la convergence islamo chrétienne sur la résurrection qui motiva la rencontre du Vieux Marché. La sourate 18 du Coran, qui rappelle le martyre, la dormition et le réveil des Sept Frères est en effet lue tous les vendredis dans les mosquées, explique-t-elle.
Gisèle Plantec