ROME, Lundi 26 avril 2010 (ZENIT.org) – De jeunes catholiques, protestants et musulmans d’Indonésie, veulent agir ensemble contre la pollution de l’eau indique « Eglises d’Asie » (EDA), l’agence des Missions étrangères de Paris (MEP).
Dans l’élan du World Water Day célébré le 22 mars dernier, des jeunes de la paroisse catholique de l’Assomption à Pakem, situé dans le kapubaten de Sleman (1), au centre de l’île de Java, ont monté avec d’autres jeunes protestants et musulmans, un projet baptisé « Care for the Water ».
La première Journée mondiale de l’eau (World Water Day), a été instituée par les Nations unies en 1993. Depuis, le 22 mars de chaque année, les Etats sont invités à consacrer une journée à sensibiliser la population et à proposer des actions concrètes pour améliorer la gestion des ressources en eau. Cette année, le thème choisi par les Nations unies portait sur la qualité de l’eau et s’intitulait « De l’eau propre pour un monde sain ».
« C’est notre droit d’utiliser l’eau pour vivre », a expliqué lors d’une célébration eucharistique le 18 avril dernier, le P. Stefanus Ardian Wicaksono à son groupe de jeunes paroissiens de l’Eglise de l’Assomption. « Mais nous devons nous rappeler que nous avons également le devoir de préserver cette eau, parce que nous n’en sommes pas les propriétaires , mais seulement les dépositaires » (2).
Durant la messe, de l’eau contenue dans des kendi (3) a été bénie par le P. Wicaksono avant d’être portée en procession jusqu’à la rivière Boyong, à 4 km de là. Les récipients ont alors été confiés à un artiste local, Jemek Supardi, qui a ensuite versé l’eau bénite dans la rivière en signe de purification.
« L’eau appartient à Dieu et il veut que nous en fassions usage pour nous-mêmes, nos enfants et nos petits-enfants ainsi que pour toutes les créatures vivantes sur la terre », a déclaré le P. Wicaksono. « C’est donc un péché si nous ne l’utilisons pas avec respect ».
Parmi les nombreux pays d’Asie confrontés aux difficultés de gestion des ressources en eau, l’Indonésie est particulièrement touchée par la détérioration de la qualité de l’eau, la pollution aquatique et les problèmes de santé publique dus au manque d’infrastructures sanitaires et de traitement des eaux usées.
A Jakarta, considérée comme l’une des villes les plus polluées de la planète, seul un réseau rudimentaire de caniveaux dessert les eaux usées, qu’elles soient d’origine domestique ou industrielle. Les nappes phréatiques sont elles aussi polluées et la capitale indonésienne doit faire face à de fréquentes inondations qui répandent dans les rues les eaux contaminées, inondations majorées par la déforestation intensive de l’île de Java.
Dans les quartiers pauvres, l’absence de traitement des eaux usées et le manque d’accès à l’eau potable détériorent chaque année davantage les conditions de vie de la population, régulièrement victime d’épidémies de choléra, de polio, de diarrhée aigue et d’autres maladies liées à l’hygiène et à l’eau. Ces dernières sont entre autres responsables d’une mortalité infantile anormalement élevée, aussi bien dans les villes que dans les campagnes où selon les statistiques officielles de 2006, 37 % des foyers n’auraient ni sanitaires, ni accès à l’eau potable.
Dans son édition du 16 janvier dernier, The Jakarta Post faisait état du rapport alarmant du département pour l’environnement de la province centrale de Java. Selon l’agence gouvernementale, toutes les rivières de la région du centre de Java étaient aujourd’hui polluées, avec des taux extrêmement élevés d’engrais chimiques, de fumier, des matières fécales humaines et de différents déchets industriels toxiques.
En Indonésie, de nombreuses usines déversent leurs déchets dans les rivières, provoquant une pollution telle que la vie aquatique y est devenue impossible et les risques sanitaires pour la population considérables, leurs eaux étant utilisées pour les besoins domestiques et la culture des rizières. Le Citarum, qui coule à l’ouest de l’île de Java, a été déclaré en 2009, le fleuve le plus pollué du monde. Plus de 500 usines y déversent leurs déchets toxiques et les ordures y forment un magma compact, véritable égout à ciel ouvert (4).
Lors de la réunion interreligieuse du 18 avril, l’accent a été mis sur l’éducation et la responsabilisation de chacun dans la lutte pour la préservation des ressources en eau. Hajj Sukamato, un responsable musulman, a fait remarquer aux quelque 150 jeunes catholiques, protestants et musulmans réunis pour le projet Care for the Water, que la région, pourtant très peuplée, avait beaucoup de chance d’avoir accès à une eau non contaminée.
Aloysius Heri Susilo, coordinateur du projet, a parlé quant à lui de l’importance des éco-systèmes. La session s’est achevée par une prière commune, menée par les différents leaders religieux dont le P. Ardian et Hajj Sukamto.
En Indonésie, la protection de l’environnement est une préoccupation récente, due en partie à l’impulsion de l’Eglise au sein de laquelle les jeunes n’hésitent pas à s’engager pour faire évoluer les mentalités et les comportements, formant souvent comme à Pakem, des groupes de travail interreligieux réunissant catholiques, protestants et musulmans (5).
(1) Le kabupaten (ou regency) est une subdivision territoriale indonésienne qui équivaut à peu près au département. Sleman est l’un des kapubaten du territoire spécial de Yogyakarta, seule province d’Indonésie a être dirigée par un sultan héréditaire.
(2) Ucanews, 20 avril 2010
(3) Le kendi est un vase traditionnel à bec verseur , utilisé surtout dans le cadre de rituels religieux, généralement de purification.
(4) The Jakarta Post, 22 mars 2010 ; The Jakarta Post, 16 janvier 2010 ; The Jakarta Post, 24 mars 2003 ; rapport ONU-eau 2010
(5) Voir EDA 503
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