ROME, lundi 28 novembre 2011 (ZENIT.org) – Un « voyage intérieur » qui permet « d’entrer dans le monde de l’autre », de se tourner « vers l’Autre, avec un « A » majuscule » : Benoît XVI a expliqué en ces termes l’effet sur l’auditoire de la musique espagnole entendue samedi soir au Vatican. Il a analysé en quoi consiste la « manière espagnole » de d’écrire la musique, y compris dans sa composante religieuse. Un quatrième voyage en Espagne, après ceux de Valence, Saint-Jacques et Barcelone, et Madrid…
C’était en effet le premier « concert espagnol » au Vatican, en la salle Paul VI, offert à un pape. Et Benoît XVI s’est adressé à l’assemblée au terme de l’exécution par l’orchestre des Asturies, ce 26 novembre (cf. Article ci-dessous pour les circonstances de ce concert).
Le voyage intérieur
En espagnol, Benoît XVI a remercié le gouvernement de la Principauté des Asturies et la Fondation María Cristina Masaveu Peterson – son président M. Fernando Masaveu – pour ce « splendide concert » qui a permis aux auditeurs de faire « comme un voyage intérieur, emportés par la musique, à travers le folklore, les sentiments et le cœur même de l’Espagne ».
Le pape a spécialement remercié l’orchestre symphonique de la Principauté dirigé par le maestro Maximiano Valdés, pour sa « magnifique exécution » qui transmettait « un peu du profond et riche caractère de la population espagnole et en particulier des Asturies ». Un autre merci est allé à l’archevêque d’Oviedo et tous ceux qui ont permis ce concert et y ont assisté.
Filant la métaphore du voyage intérieur Benoît XVI a ajouté, en italien : « Ce soir, un « morceau » d’Espagne a été pour ainsi dire transporté en cette salle. Nous avons pu non seulement écouter les musiques de certains des plus célèbres compositeurs de cette terre, comme Manuel de Falla ou Isaac Albéniz, mais aussi de l’Allemand Richard Strauss et du Russe Nikolai Rimsky-Korsakov, fasciné par ce qui est défini dans le livret du programme comme « more hispano », c’est-à-dire la « manière hispanique », [manière] d’être et aussi de composer et d’interpréter la musique. »
La « manière hispanique »
Benoît XVI a développé ce qu’il entendait par « manière hispanique » : « C’est justement là l’élément commun des morceaux si variés que nous avons entendus. Ils ont une caractéristique de fond : la capacité de communiquer musicalement les sentiments, les émotions, je dirais même quasi le tissu quotidien de la vie. »
Pour Benoît XVI en effet celui qui « compose « more hispano » est porté quasi naturellement à fondre harmonieusement les éléments du folklore, de la chanson populaire, qui viennent de la vie de chaque jour, avec ce que nous appelons la « musique cultivée ». »
Le pape a proposé cette lecture également « intérieure » du programme du concert, de la fête et de la danse au drame d’une vie: « Et c’est un ensemble de sentiments qui nous ont été transmis ce soir : la « alegría de vivir », la joie de vivre, le climat de fête, qui transparaît dans les compositions comme les trois danses de « El sombrero de tres picos » de de Falla, ou la lutte contre le mal décrite par la célèbre « Danse rituelle du feu » du même auteur ; la vie animée des quartiers de la ville, comme dans « Lavapiés », de « Iberia » d’Albéniz; le drame d’une vie qui ne trouve pas la paix, comme celle de don Juan, qui ne réussit pas à vivre l’amour de façon authentique et, à la fin, se rend compte du vide de son existence ; le chef d’œuvre de Strauss a rendu parfaitement le passage de l’euphorie qui anime le morceau à la tristesse du vide exprimée par la mélancolie finale ».
La composante religieuse
Mais l’analyse de Benoît XVI ne s’arrête pas là. Il indique un autre élément « constant » de ce « more hispano » dans les compositions musicales : l ‘élément « religieux » dont le peuple d’Espagne est « profondément imprégné ».
Et d’expliquer : « Rimsky-Korsakov l’avait bien saisi : dans le « Caprice espagnol », il a utilisé des chants et des danses folkloriques d’Espagne, incluant des thèmes variés de mélodies populaires religieuses comme dans la première partie du morceau où l’on reconnaît une antique invocation des Asturies par laquelle on demande la protection de la Vierge Marie et de saint Pierre, ou le second mouvement où apparaît un chant gitan à Notre Dame. »
« Telles sont les merveilles accomplies par la musique, ce langage universel qui nous permet de dépasser toute barrière et d’entrer dans le monde de l’autre, d’une Nation, d’une culture, et nous permet de tourner notre esprit et notre cœur vers l’Autre, avec un « A » majuscule, c’est-à-dire de nous élever vers le monde de Dieu ».
Le pape musicien est revenu à l’espagnol pour renouveler ses remerciements et pour confier toute l’assistance à la Vierge Marie : « Que la Vierge Marie « qui brille dans les hauteurs, plus belle que le soleil, et qui est Mère, et qui est reine », selon la prière de l’hymne à la céleste patronne de ces terres, vous protège toujours dans sa tendresse maternelle ».
Anita S. Bourdin
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