Le livre « Vice et vertus. Entretiens du pape François avec Marco Pozza » (Editions des Béatitudes), aumônier de la prison de sécurité maximale de Padoue (Italie), est inspiré par la fresque de Giotto de la chapelle des Scrovegni à Padoue représentant les sept vertus et les sept vices, et tiré d’un programme télévisé italien.
« Notre conversation, explique P. Pozza, est née d’une complicité de perspectives qui ne sont antithétiques qu’en apparence : ici, le centre de l’Église dialogue avec la périphérie d’une prison. »
L’attention et la compassion du pape François pour les prisonniers sont connues depuis le début de son pontificat. Hier, le 14 avril 2022, le pape a célébré la messe du Jeudi Saint de la « Cène du Seigneur », avec les personnes détenues du complexe pénitentiaire de Civitavecchia, à 80 km de Rome. Chaque année depuis son élection en 2013, le pape célèbre cette liturgie caractérisée par le rite du lavement des pieds et l’Évangile du commandement de l’amour dans une des prisons italiennes ou dans un centre pour réfugiés (2016) ou pour personnes handicapées (2014). Il était allé auparavant déjà eux fois dans une prison: à Rome (Rebibbia, 2015) et à Velletri (2019).
Le nouveau livre des entretiens du pape avec l’aumônier de la prison est né « à partir d’une interview télévisée » et est publié en français en 2021 par les Éditions des Béatitudes. Le livre est divisé en sept chapitres dont chacun est « consacré à une paire vice-vertu », enrichie « d’un texte du pape François », note l’éditeur.
Parallèlement, Don Marco raconte une journée typique d’un prisonnier en l’incluant dans un cercle des offices quotidiens de l’Église : « Office de Matines – La nuit en prison », « Office de Laudes – Le réveil », « Office de Tierce – L’école », « Office de Sexte – Le travail », « Office de None -L’expérience du mal », « Office de Vêpres – Le dîner-sans-famille », « Office de Complies – La nostalgie du bien ». Plusieurs témoignages de personnes détenues ainsi que de l’aumônier y sont présents.
« Réfléchir au vice et à la vertu » : pourquoi?
« Réfléchir au vice et à la vertu, expliquent le pape et l’aumônier dans une préface commune du livre, c’est donc réfléchir à la peine et à la beauté de la vie quotidienne. C’est exactement là … que le grand rêve de Dieu se greffe. »
Un peu plus loin, dans le chapitre sur L’injustice et la justice, le pape François explique pourquoi il est important de réfléchir à la vertu et au vice : « Pour bien comprendre où va notre vie, dit-il. …Car les vertus comme les vices entrent dans notre façon d’agir, de penser, de sentir…Il y a des gens vertueux, il y a des gens vicieux, mais la majorité d’entre nous est un mélange de vertus et de vices. »
Le pape rappelle que la vie de l’homme « est une prise de position, à chaque pas ». « Ne pas faire de choix est déjà une attitude qui n’est pas humaine, déclare-t-il. Pourquoi? Parce que ce n’est pas être libre! ». Un vice « nous pousse au confort, à être bien avec tout le monde », poursuit le pape : « ‘Je m’en lave les mains…’ Voilà une attitude qui n’est pas chrétienne! Un jour, j’ai dit : ‘Mais quel homme prudent, il ne fait jamais d’erreur… Un vrai spécialiste de Ponce Pilate.’ »
En réfléchissant sur le fait que le vice est souvent plus fascinant pour l’homme que la vertu, le pape note : « Les vices sont plus fascinants parce qu’ils semblent offrir les biens et les plaisirs, sans rien demander en retour ». « Le vice est une gratuité négative…c’est le plaisir, le ’bien’ tout de suite et sans effort, mais il nous mange de l’intérieur. »
L’espérance, de l’oxygène!
Si le pape pouvait demander à Dieu le don d’éviter un des sept vices, il choisirait « tous, tous! », répond-il à Don Marco en riant. Et s’il devait demander le don d’une des sept vertus, il choisirait « l’espérance, certainement! »: « L’espérance est comme l’oxygène pour respirer la vie, l’espérance donne un sens à la vie. C’est un cadeau pour aller de l’avant, pour regarder, pour faire tout fructifier, pour agir, pour tolérer, pour savoir souffrir… Mais c’est aussi un don de Dieu, nous devons la demander…et une fois que nous avons reçu ce don, en prendre soin. »
Marco Pozza termine son livre par le chapitre « La nostalgie du bien ». Garder l’espérance en prison est presque impossible, lui confie un des prisonniers : « résister, quand le présent est une souffrance, que l’avenir se profile dans la souffrance, que la vie te semble être une souffrance un peu trop longue ».
« Espérer, c’est résister, affirme Don Marco en reprenant ses paroles. Résister, c’est participer, lever la main quand le monde entier te demande jusqu’où tu es encore capable de résister. Se souhaiter une bonne nuit en disant : ‘À demain!’, c’est déjà l’espérance en actes. »