, audience du 13 avril 2022 © Vatican Media

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Catéchèse : la paix de Dieu n’est pas « basée sur le pouvoir » (traduction complète)

Le pape dénonce la guerre et « l’idolâtrie du pouvoir »

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« La paix que Jésus nous donne à Pâques n’est pas la paix selon les stratégies du monde », a affirmé le pape François lors de l’audience générale du 13 avril, mettant en garde contre « la tentation d’une fausse paix, basée sur le pouvoir ». La paix obtenue par la force et les conquêtes, a-t-il insisté, « n’est qu’un intervalle entre les guerres ».

Dans sa catéchèse hebdomadaire, dans la Salle Paul VI mercredi 13 avril 2022, au coeur de la Semaine Sainte, le pape François a invité à réfléchir sur les « manières différentes » dont le monde, d’une part, et Dieu, d’autre part, donnent la paix. S’inspirant d’un récit de Dostoïevski, il a souligné combien la paix « douce et courageuse » offerte par le Christ était « difficile à accueillir ».

Les armes de l’Evangile, a rappelé le pape, sont la prière, la tendresse, le pardon et l’amour gratuit du prochain ». Voilà pourquoi, a-t-il poursuivi, « l’agression armée de ces jours-ci, comme toute guerre, est un outrage contre Dieu, une trahison blasphématoire du Seigneur de Pâques, une manière de préférer à son visage doux celui du faux dieu de ce monde. La guerre est toujours une action humaine visant à instaurer l’idolâtrie du pouvoir ».

Le pape a conclu en invitant à faire de ce temps de Pâques une « occasion bénie de passer du dieu mondain au Dieu chrétien, de l’avidité que nous portons en nous à la charité qui nous rend libres, de l’attente d’une paix apportée par la force à l’engagement à témoigner concrètement de la paix de Jésus ».

Voici notre traduction de la catéchèse donnée par pape François en italien.

HG

Salle Paul VI, audience du 13 avril 2022 © Vatican Media

Salle Paul VI, audience du 13 avril 2022 © Vatican Media

 

Catéchèse du pape François 

La paix de Pâques

Chers frères et sœurs, bonjour !

Nous sommes au centre de la Semaine Sainte, qui se déroule du dimanche des Rameaux au dimanche de Pâques. Ces deux dimanches sont caractérisés par la fête célébrée autour de Jésus. Mais ce sont deux fêtes différentes.

Dimanche dernier, nous avons vu le Christ entrer solennellement à Jérusalem, comme une fête, accueilli comme le Messie : et pour lui on étend des manteaux sur le chemin (cf. Lc 19, 36) et on coupe des branches d’arbres (cf. Mt 21, 8). La foule qui exulte bénit à pleine voix « celui qui vient, le roi » et elle acclame : « Paix au ciel et gloire au plus haut des cieux » (Lc 19, 38). Ces personnes-là sont en fête parce que, dans cette entrée de Jésus, elles voient l’arrivée d’un nouveau roi, qui devait apporter la paix et la gloire. Voilà quelle était la paix attendue par ces personnes : une paix glorieuse, fruit d’une intervention royale, celle d’un messie puissant qui devait libérer Jérusalem de l’occupation romaine. D’autre rêvaient probablement du rétablissement d’une paix sociale et voyaient en Jésus le roi idéal, qui allait nourrir de pain les foules, comme il l’avait déjà fait, et opérer de grands miracles, apportant ainsi davantage de justice dans le monde.

Mais Jésus ne parle jamais de cela. La Pâque qui l’attend est différente, ce n’est pas une Pâque triomphale. La seule chose à laquelle il tient, pour préparer son entrée dans Jérusalem, c’est de monter « un petit âne sur lequel personne ne s’était encore assis » (v. 30). Voilà comment le Christ apporte la paix dans le monde : à travers la mansuétude et la douceur, symbolisées par ce petit âne attaché, que personne n’avait monté. Personne, parce que la façon de faire de Dieu est différente de celle du monde. En effet, juste avant la Pâque, Jésus explique à ses disciples : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ; ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne » (Jn 14, 27). Ce sont deux manières différentes : une manière dont le monde nous donne la paix et une manière dont Dieu nous donne la paix. C’est différent.

La paix que Jésus nous donne à Pâques n’est pas la paix selon les stratégies du monde qui croit pouvoir l’obtenir à travers la force, avec des conquêtes et différentes façons de s’imposer. Cette paix, en réalité, n’est qu’un intervalle entre les guerres :  nous le savons bien. La paix du Seigneur suit la voie de la douceur et de la croix : elle consiste à prendre en charge les autres. En effet le Christ a pris sur lui notre mal, notre péché et notre mort. Il a pris tout cela sur lui. C’est ainsi qu’il nous a libérés. C’est lui qui a payé pour nous. Sa paix n’est pas le fruit de compromis, mais elle vient du don de soi. Mais cette paix douce et courageuse est difficile à accueillir. En fait, la foule qui acclamait Jésus est celle-là même qui, quelques jours plus tard, crie « Crucifie-le ! » et qui, parce qu’elle a peur et qu’elle est déçue, ne lève pas le petit doigt pour lui.

A cet égard, un grand récit de Dostoïevski, la fameuse Légende du Grand Inquisiteur est toujours actuel. C’est l’histoire de Jésus qui, après plusieurs siècles, revient sur la terre. Il est aussitôt accueilli par la foule en liesse, qui le reconnaît et l’acclame. « Ah, tu es revenu ! Viens, viens avec nous ! ». Mais il est ensuite arrêté par l’Inquisiteur, qui représente la logique mondaine. Celui-ci l’interroge et le critique violemment. La raison ultime de ses reproches est que le Christ, alors qu’il le pouvait, n’a jamais voulu devenir César, le plus grand roi de ce monde, préférant laisser l’homme libre plutôt que de le soumettre et de résoudre ses problèmes par la force. Il aurait pu établir la paix dans le monde, pliant le cœur libre mais précaire de l’homme, en vertu d’un pouvoir supérieur, mais il ne l’a pas voulu : il a respecté notre liberté. « Toi, dit l’Inquisiteur à Jésus, en acceptant le monde et la pourpre de César, tu aurais fondé l’empire universel et donné la paix au monde » (Les frères Karamazov) ; et il conclut par cette remarque cinglante : « Si quelqu’un a mérité plus que tous le bûcher, c’est toi » (ibid.) Voilà le mensonge qui se répète dans l’histoire, la tentation d’une fausse paix, basée sur le pouvoir, qui conduit ensuite à la haine et à la trahison de Dieu, et à une grande amertume dans l’âme.

A la fin, d’après ce récit, l’Inquisiteur aurait voulu que Jésus « lui dît quelque chose, fût-ce des paroles amères et terribles ». Mais le Christ réagit par un geste doux et concret : « il s’approche en silence et baise ses lèvres exsangues » (ibid.). La paix de Jésus ne menace pas les autres, ce n’est jamais une paix armée : jamais ! Les armes de l’Evangile sont la prière, la tendresse, le pardon et l’amour gratuit du prochain, l’amour de chaque prochain. C’est ainsi que l’on apporte la paix de Dieu dans le monde. Voilà pourquoi l’agression armée de ces jours-ci, comme toute guerre, est un outrage contre Dieu, une trahison blasphématoire du Seigneur de Pâques, une manière de préférer à son visage doux celui du faux dieu de ce monde. La guerre est toujours une action humaine visant à instaurer l’idolâtrie du pouvoir.

Avant sa dernière Pâque, Jésus dit à ses disciples : « Que votre cœur ne soit pas bouleversé ni effrayé » (Jn 14, 27). Oui, parce que, tandis que le pouvoir mondain ne sème que destruction et mort – nous l’avons vu ces temps-ci -, sa paix édifie l’histoire, à partir du cœur de chaque homme qui l’accueille. Pâques est alors la véritable fête de Dieu et de l’homme, parce que la paix que le Christ a conquise sur la croix dans le don de lui-même nous est distribuée. C’est pourquoi le jour de Pâques, le Ressuscité apparaît aux disciples et comment les salue-t-il ? « La paix soit avec vous ! » (Jn 20, 19-212). C’est la salutation du Christ vainqueur, du Christ ressuscité.

Frères et sœurs, Pâques signifie « passage ». C’est, surtout cette année, l’occasion bénie de passer du dieu mondain au Dieu chrétien, de l’avidité que nous portons en nous à la charité qui nous rend libres, de l’attente d’une paix apportée par la force à l’engagement à témoigner concrètement de la paix de Jésus. Frères et sœurs, mettons-nous devant le Crucifié, source de notre paix, et demandons-lui la paix du cœur et la paix dans le monde.

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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