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« Lettre aux prêtres sur le chemin synodal » (texte complet)

Trois recommandations pour le processus synodal

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« Chaque fois qu’on s’écoute vraiment, qu’on apprend les uns des autres, que les dons des autres sont valorisés, qu’on s’aide et qu’on prend les décisions ensemble, la synodalité est déjà en acte »: le cardinal Mario Grech, Secrétaire général du Synode et Mgr Lazarus You Heung Sik, Préfet de la Congrégation pour le clergé, adressent une lettre, à l’occasion de la Saint-Joseph, à tous les prêtres du monde, à propos de la démarche synodale, ce samedi 19 mars 2022, en la solennité de saint Joseph.

Ils formulent trois recommandations pour la mise en oeuvre du processus synodal: « Tout faire pour que le cheminement s’appuie sur l’écoute et sur la mise en pratique de la Parole de Dieu », « faire en sorte que le cheminement se caractérise par l’écoute réciproque et l’accueil mutuel », et « veiller à ce que la marche ne nous amène pas à l’introspection mais nous incite à aller à la rencontre de tous ».

Ils encouragent les prêtres à ne pas avoir peur de « découvrir toujours plus l’égalité fondamentale de tous les baptisés et encourager tous les fidèles à participer activement à la marche et à la mission de l’Eglise ».

Le Document préparatoire du synode se trouve ici.

Voici la traduction officielle publiée par le Secrétariat général du synode.

AB

Lettre aux prêtres sur le chemin synodal

Chers prêtres,

Nous voici, deux de vos frères, prêtres nous aussi! Pouvons-nous vous demander un peu de votre temps? Nous voudrions vous entretenir d’une question qui nous touche tous.

« L’Eglise de Dieu est convoquée en synode« . C’est par ces paroles que commence le document préparatoire du Synode 2021-2023. Tout le Peuple de Dieu est invité pendant deux ans à réfléchir sur le thème Pour une Eglise synodale: communion, participation, et mission. Il s’agit d’une nouveauté qui peut susciter de l’enthousiasme mais aussi des questions.

Et pourtant, « pendant le premier millénaire, « cheminer ensemble », c’est-à-dire pratiquer la synodalité, était, pour l’Eglise, son mode habituel d’agir ». Le concile Vatican II a remis en lumière cet aspect de la vie ecclésiale, dont l’importance est telle que saint Jean Chrysostome a pu affirmer: « Eglise et Synode sont synonymes » (Explicatio in Psalmum 149).

On sait que le monde actuel a un besoin urgent de fraternité. Sans s’en rendre compte, il a soif de rencontrer Jésus. Mais comment faire pour que cette rencontre ait lieu? Nous avons besoin de nous remettre à l’écoute de l’Esprit, avec tout le Peuple de Dieu, afin de renouveler notre foi et de trouver les moyens et les mots nouveaux pour partager l’Evangile avec nos frères et nos soeurs. Le parcours synodal que le pape François nous propose a précisément cet objectif : nous mettre en route, ensemble, dans une écoute réciproque, dans le partage des idées et des projets, afin de montrer le vrai visage de l’Eglise: une « maison » accueillante, aux portes ouvertes, habitée par le Seigneur et habitée par des relations fraternelles.

Pour ne pas tomber dans les pièges pointés par le pape François – c’est-à-dire le formalisme qui réduit le Synode à un slogan vide, l’intellectualisme qui fait du Synode une réflexion théorique sur les problèmes, et l’immobilisme qui nous enchaîne à nos sécurités habituelles afin que rien ne change -, il est important d’ouvrir notre coeur et de nous mettre à l’écoute de ce que l’Esprit suggère aux Eglises (cf. Ap 2, 7).

Evidemment, face à ce parcours, nous pouvons être assaillis de peurs.

En premier lieu, nous nous rendons bien compte que les prêtres, en de nombreux endroits du monde, portent déjà une lourde charge pastorale. Et on peut avoir l’impression que s’ajoute maintenant une nouvelle chose « à faire ». Plutôt que de vous inviter à multiplier les activités, nous voudrions vous encourager à considérer vos communautés avec le regard contemplatif qu’évoque le pape François dans Evangelii gaudium (n. 71), de manière à découvrir les innombrables exemples de participation et de partage qui germent déjà dans vos communautés.

La phase diocésaine actuelle du parcours synodal se propose de fait de « recueillir la richesse concrète des expériences de synodalité vécue » (Doc. prép. 31). Nous sommes convaincus qu’il y en a beaucoup plus que ce qui paraît à première vue, peut-être même de manière informelle et spontanée. Chaque fois qu’on s’écoute vraiment, qu’on apprend les uns des autres, que les dons des autres sont valorisés, qu’on s’aide et qu’on prend les décisions ensemble, la synodalité est déjà en acte. Tout cela doit être pris en considération et apprécié, de manière à développer toujours plus le style synodal qui est « le modus vivendi et operandi spécifique de l’Eglise du Peuple de Dieu » (Doc. prép. 10).

Mais il peut exister encore une autre crainte: si l’on souligne autant le sacerdoce commun des baptisés et le sensus fidei du Peuple de Dieu, qu’en sera-t-il de notre rôle de guide et de notre identité spécifique de ministres ordonnés? Il faut sans aucun doute découvrir toujours plus l’égalité fondamentale de tous les baptisés et encourager tous les fidèles à participer activement à la marche et à la mission de l’Eglise. Nous aurons ainsi la joie de nous trouver à côté de frères et de soeurs qui partagent avec nous la responsabilité de l’évangélisation. Mais dans cette expérience que fait le Peuple de Dieu, le charisme particulier des ministres ordonnés de servir, sanctifier et animer le Peuple de Dieu pourra et devra aussi être mis en relief de manière renouvelée.

En ce sens, nous voudrions vous prier de donner, tout particulièrement, une triple contribution au parcours synodal actuel:

-Tout faire pour que le cheminement s’appuie sur l’écoute et sur la mise en pratique de la Parole de Dieu.  Le pape François nous a ainsi exhorté récemment : « Devenons des passionnés de l’Ecriture Sainte, laissons-nous creuser la Parole, qui révèle la nouveauté de Dieu et permet d’aimer les autres sans nous lasser » (François, Homélie pour le dimanche de la Parole de Dieu, 23 janvier 2022).

Sans cet enracinement dans la Parole vivante, nous risquerions de cheminer dans l’obscurité et nos réflexions pourraient se transformer en idéologie. Si au contraire nous nous basons sur la mise en pratique de la Parole, nous construisons la maison sur le roc (cf. Mt 7, 24-27) et, comme les disciples d’Emmaüs, nous pourrons faire l’expérience de la lumière et de la conduite surprenante du Ressuscité.

-Faire en sorte que le cheminement se caractérise par l’écoute réciproque et l’accueil mutuel. Le dialogue en profondeur et la rencontre authentique constituent déjà une valeur, avant même les résultats concrets. De fait, les initiatives et les potentialités sont nombreuses dans nos communautés, mais des personnes et des groupes courent trop souvent le risque de l’individualisme et de l’autoréférentialité. Avec son commandement nouveau, Jésus nous rappelle que « c’est à cela que tous sauront que vous êtes mes disciples: si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (Jn 13, 35). Nous pouvons faire beaucoup , comme pasteurs, pour que l’amour assainisse les relations et guérisse les blessures qui, souvent, atteignent aussi le tissu ecclésial. Nous pourrons alors retrouver la joie de nous sentir une seule et même famille, un seul peuple en marche, enfants du même Père, et donc tous frères, en commençant la fraternité entre nous, prêtres.

-Veiller à ce que la marche ne nous amène pas à l’introspection mais nous incite à aller à la rencontre de tous. Dans Evangelii gaudium, le pape François nous a partagé son rêve d’une Eglise qui ne craint pas de se salir les mains en prenant sur elle les blessures de l’humanité, une Eglise qui chemine à l’écoute et dans le service des pauvres et des  périphéries. Cette « sortie » dynamique vers les frères, avec la boussole de la Parole et le feu de la charité, réalise le grand projet initial du Père: « Que tous soient un » (Jn 17, 21). Dans sa dernière encyclique Fratelli tutti, le pape François nous demande de nous engager dans ce sens, avec nos frères et nos soeurs des autres Eglises, avec les fidèles des autres religions et avec toutes les personnes de bonne volonté: la fraternité universelle et l’amour sans exclusive qui doit enlacer tout et tous. En tant que serviteurs du Peuple de Dieu, nous sommes dans une position privilégiée pour agir de telle sorte que de la ne reste pas une orientation vague et générale, mais que cela se concrétise là où nous vivons.

Chers frères prêtres, nous avons la conviction qu’à partir de ces priorités vous trouverez le moyen de mettre en oeuvre des initiatives spécifiques, selon les besoins et les possibilités, parce que la synodalité est véritablement ce à quoi Dieu appelle l’Eglise du troisième millénaire. Nous mettre en marche dans cette direction ne nous évitera pas les questions, les fatigues et les arrêts, mais nous pouvons avoir confiance que nos recevrons le centuple en fraternité et en fruits de vie évangélique. Qu’il nous suffise de penser au premier Synode de Jérusalem (Actes 15). Qui sait quel travail cela a demandé dans les coulisses! Mais nous savons combien ce moment fut décisif pour l’Eglise naissante.

Nous concluons cette lettre avec deux passages du Document préparatoire qui pourront nous inspirer et nous accompagner quasi comme un vadémécum.

« La capacité d’imaginer un futur différent  pour l’Église et pour ses institutions, à la hauteur de la mission qu’elle a reçue, dépend pour une large  part du choix d’entreprendre des processus d’écoute, de dialogue et de discernement communautaire,  auxquels tous et chacun peuvent participer et contribuer » (n. 9).

« Rappelons que le but du Synode, et donc de cette consultation, n’est pas de produire des documents, mais de «faire germer des rêves, susciter des prophéties et des visions, faire fleurir des espérances, stimuler la confiance, bander les blessures, tisser des relations, ressusciter une aube d’espérance, apprendre l’un de l’autre, et créer un imaginaire positif qui illumine les esprits, réchauffe les cœurs, redonne des forces aux mains» » (n. 32).

En vous remerciant pour votre attention, nous vous assurons de notre prière et vous souhaitons, à vous et à vos communautés, un parcours synodal joyeux et fécond. Sachez que nous vous sommes proches et que nous cheminons avec vous! Et accueillez également, à travers nous, la gratitude du pape François qui vous sent très proches.

En confiant chacun de vous à la bienheureuse Vierge Marie, Notre Dame du Bon chemin, nous vous saluons cordialement dans le Seigneur Jésus.

 

Mario Card. Grech,

Secrétaire général du Synode

Mgr Lazarus You Heung Sik,

Archevêque-évêque émérite de Daejon, Préfet de la Congrégation pour le clergé

 

 

 

 

 

 

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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