(CECC – Ottawa)… Au cours des 70 dernières années, jamais le Canada n’aura compté sur une aussi forte proportion de citoyens venus d’autres pays : près de 20 % de sa population. Dans une lettre pastorale sur l’immigration dévoilée aujourd’hui, les évêques catholiques révèlent cependant que de sérieuses lacunes minent les conditions de vie des personnes immigrantes et réfugiées.
Le document de la Commission des affaires sociales de la Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC) a été rendu public quelques jours avant la Journée mondiale des migrants et des réfugiés – un événement initié par le Saint-Siège il y a plusieurs dizaines d’années – qui sera soulignée partout au Canada et ailleurs dans le monde, le dimanche 15 janvier.
En conférence de presse aujourd’hui, le président de la Commission épiscopale, Mgr Roger Ébacher, archevêque de Gatineau, a fait part de nombreuses inquiétudes quant à l’intégration et à l’accueil des personnes immigrantes au Canada. S’il faut se réjouir qu’un pays aussi fortuné que le nôtre en accueille un nombre significatif – 235 000 résidants permanents accueillis au Canada en 2004 – les gouvernements fédéral et provinciaux doivent toutefois s’assurer de réduire les obstacles auxquels sont confrontés ces nouveaux arrivants.
« Nous voulons rappeler avec force que les lois et les politiques donnant la préséance à l’intérêt national sur la dignité humaine des personnes sont une inversion fondamentale des valeurs », a déclaré Mgr Ébacher en faisant entre autres référence au fait que les réfugiés sont souvent considérés comme boucs émissaires des préoccupations nationales de sécurité depuis le 11 septembre 2001.
Témoins de la souffrance humaine qu’entraînent ces situations intolérables, les évêques considèrent que leur travail pastoral implique aussi de se préoccuper des enjeux politiques qui ont un impact sur la vie des personnes. La lettre pastorale insiste sur un certain nombre de recommandations politiques, en solidarité avec d’autres intervenants de la société qui œuvrent dans ce domaine : l’abrogation de l’Entente sur les tiers pays sûrs entre le Canada et les États-Unis;
l’introduction d’un droit d’appel pour les demandeurs du statut de réfugié pourtant déjà prévu par la Loi d’immigration;
l’élimination des obstacles inutiles à une réunification rapide des familles;
la réduction des délais dans le processus de parrainage collectif;
le renforcement des lois concernant la traite des humains, particulièrement les mesures concernant la protection des victimes.
Les évêques du Canada demandent aussi aux différents paliers de gouvernement de concrétiser leur ouverture aux personnes immigrantes en leur offrant:
un meilleur accueil;
un meilleur accès à l’ensemble des services publics;
des conditions de vie décentes;
une reconnaissance de leur éducation et de leurs compétences professionnelles;
une plus grande ouverture au marché du travail;
une amélioration de la protection offerte aux travailleurs migrants.
« Nous voulons souligner le fait que ces recommandations s’adressent à tous les candidats de la campagne électorale qui aspirent à jouer un rôle dans la gouvernance de ce pays, indépendamment de leur allégeance politique, a indiqué Mgr Brendan M. O’Brien, archevêque de St. John’s et membre de la Commission. Nous invitons les chrétiens et les chrétiennes à profiter de la Journée du réfugié et du migrant ainsi que de la campagne électorale pour exprimer eux aussi leur refus de voir perdurer les injustices dont sont victimes les personnes réfugiées, mais aussi pour intervenir sur les causes des migrations. »
Cette lettre pastorale se veut également une source d’encouragement et un témoignage de reconnaissance pour les chrétiens et chrétiennes qui donnent déjà généreusement à ces causes. Pensons aux milliers de personnes qui s’impliquent au sein d’organisations qui assurent l’accueil, l’intégration et la défense de droits des personnes immigrantes; à ceux et celles qui ont parrainé plus de 180 000 personnes; à la Conférence religieuse canadienne (CRC) qui s’est engagée courageusement dans le difficile dossier de la trafic des femmes et des enfants. « Comme pasteurs, a ajouté Mgr Ébacher, nous nous adressons aux croyants et croyantes de notre Église pour souligner leur contribution remarquable envers les personnes réfugiées et immigrantes et inviter un plus grand nombre d’entre eux à s’engager dans cette voie au nom de leur foi chrétienne. »
« Les personnes immigrantes, a conclu Mgr O’Brien, enrichissent la société canadienne et elles nous aident dans notre ouverture au monde à une période où les défis à relever sont planétaires et reposent sur une solidarité de tous les peuples. Comme croyants, nous avons aussi la certitude que c’est dans l’accueil des personnes de toutes origines que Dieu se révèle et nous permet d’approfondir notre foi ».