En 2024, Sr Florence de la Villéon a reçu l'Ordre national du mérite pour son action humanitaire auprès des personnes en déplacement © UISG

En 2024, Sr Florence de la Villéon a reçu l'Ordre national du mérite pour son action humanitaire auprès des personnes en déplacement © UISG

Sr Florence de la Villéon : « Les supérieures générales dans le monde ont besoin de soutien et de formation »

Interview de la religieuse française au siège de l’Union internationale des supérieures générales (UISG) à Rome

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La 23e Assemblée plénière de l’Union internationale des supérieures générales (UISG) s’est tenue à Rome du 5 au 9 mai 2025, en plein Jubilé ordinaire et en plein conclave. Convoquée tous les trois ans, cette Assemblée permet aux supérieures générales du monde entier de se rencontrer, d’échanger et de se former.

Après plus de dix années de service au sein de l’UISG, la religieuse française Florence de la Villéon termine sa mission et s’apprête à entamer une nouvelle étape à Paris. Ancienne provinciale de la congrégation des Sœurs du Sacré-Cœur, elle a travaillé au service des migrants, puis pour la formation et la communication de l’UISG. Zenit l’a rencontrée à Rome.

 

Zenit : Comment êtes-vous arrivée au sein de l’Union internationale des supérieures générales ?

Sr Florence de la Villéon : Le pape François a lancé un appel en 2015 pour que les congrégations s’investissent plus dans l’accueil des migrants. Suite à cela, l’Union internationale des supérieures générales a lancé des communautés intercongrégations en Sicile, et je suis venue à Rome pour soutenir ce projet. Depuis quelques temps, je travaille sur les supports techniques pour la communication ainsi que les formations données aux supérieures générales et aux religieuses dans le monde.

Zenit : Dans quel but a été fondée l’UISG ?

Sr F. de la Villéon : L’UISG fête cette année ses 60 ans ! Elle a été créée en 1965, à la fin du Concile Vatican II, pour répondre au besoin de représenter les congrégations féminines apostoliques dans les instances de dialogue avec le Vatican.

Formation en droit canonique, UISG à Rome le 2 mai 2025 © Anne van Merris

Formation en droit canonique, UISG à Rome le 2 mai 2025 © Anne van Merris

L’UISG est devenue aujourd’hui un organisme de communication relativement important entre le Vatican et les supérieures générales qui sont sur le terrain. Et ces deux dernières années, nous avons beaucoup développé des formations dans de nombreux domaines pour les religieuses vivant loin de Rome.

À ce jour, 1 900 congrégations religieuses sont représentées au sein de l’Union internationale des supérieures générales, qu’elles soient de droit pontifical ou de droit diocésain. L’idée d’installer les bureaux à Rome était d’établir un pont entre les supérieures générales et tous les dicastères au Vatican.

Zenit : Comment s’est passée votre Assemblée plénière début mai ?

Sr F. de la Villéon : 900 sœurs venant du monde entier ont participé à notre Assemblée plénière, et des traductions en 12 langues ont été nécessaires. Avec les invités, nous étions près de 1 000 participants. La petite difficulté, cette année, est que nous aurions dû avoir une audience avec le pape François, comme à chaque fois, mais elle n’a pas eu lieu en raison de son décès et du Conclave. Or, cette audience est habituellement très appréciée, car elle nous permet d’avoir une série de questions-réponses en direct avec le Saint-Père. En revanche, nous avons passé ensemble la Porte sainte à Sainte-Marie-Majeure, où nous avons terminé l’Assemblée.

Messe d'ouverture de la 23e Assemblée plénière de l'UISG, 3 mai 2025 © UISG

Messe d’ouverture de la 23e Assemblée plénière de l’UISG, 3 mai 2025 © UISG

Zenit : Constatez-vous une évolution dans la participation des supérieures générales aux Assemblées ?

Sr F. de la Villéon : Oui. Cette fois-ci, nous avons eu une forte participation de religieuses venant de tous les continents, et beaucoup d’autres supérieures ont suivi le meeting en ligne. Ce qui change aujourd’hui, c’est la répartition géographique qui a beaucoup évolué.

C’est pour cela que certaines langues ont été supprimées dans nos rencontres, notamment des langues européennes comme le néerlandais. Mais à la place, nous avons des langues asiatiques en plus. Cette année par exemple, nous avons reçu 21 sœurs d’Indonésie, alors qu’il n’y en avait pas autant à la dernière Assemblée. On voit donc que l’Asie prend peu à peu une place beaucoup plus importante, ainsi que l’Afrique.

Toute cette diversité, tous ces charismes et ces différentes spiritualités nous permettent de réaliser que la vie religieuse n’est plus uniquement concentrée sur l’Europe et l’Occident. On le voit aussi dans les visages : ils changent ! Ces dernières années, nous avons donc mis un accent très fort sur l’interculturalité. Nous essayons de respecter toutes ces cultures, qui étaient minoritaires jusqu’à présent et qui prennent désormais une place plus importante au sein de l’UISG.

Zenit : Comment fonctionne l’UISG dans le monde ?

Sr F. de la Villéon : À Rome, nous avons le conseil d’administration et un bureau. Nous avons mis en place des commissions qui travaillent sur des sujets cruciaux : commission éducation, commission œcuménique, commission santé, commission justice et intégrité de la création… Ce ne sont pas des supérieures générales qui animent ces commissions, ce sont plutôt des sœurs qui s’en chargent.

1 900 congrégations religieuses sont représentée au sein de l’Union internationale des supérieures générales © UISG

1 900 congrégations religieuses sont représentée au sein de l’UISG © UISG

Ensuite, il y a 36 « constellations » dans le monde. Ce sont des groupes de supérieures générales qui se retrouvent par continent ou par pays, de façon à ce que tout ne soit pas centralisé à Rome. Chaque constellation permet de donner un soutien fraternel et une formation essentielle aux supérieures générales, et organise ses propres rencontres. Là aussi, les constellations ont souvent à gérer les diversités de langues, mais quand les pays sont trop petits, ils sont associés à d’autres pays.

Nous sommes en revanche peu dans le domaine pastoral directement. Nous donnons des formations surtout sur les grosses questions que peuvent se poser les supérieures majeures comme le Synode, l’éducation ou la protection des mineurs, car elles n’ont pas forcément conscience de l’importance de ces sujets.

Mais il y a dans chaque pays des Conférences de religieux et religieuses, comme la Corref en France, qui ont leur propre mission et touchent beaucoup plus du doigt l’ensemble des sœurs qui travaillent sur le terrain pastoral.

Zenit : De quoi ont besoin principalement les supérieures de congrégations aujourd’hui ?

Sr F. de la Villéon : Leur plus grand besoin est de ne pas se sentir seules et de pouvoir dialoguer avec d’autres supérieures générales. On travaille également beaucoup sur le droit canon, car c’est un domaine qu’elles doivent absolument connaître lorsqu’elles sont nommées supérieures générales. Ce type de formations existe dans certains pays mais pas partout.

Les supérieures générales sont des femmes qui sont très occupées, très demandées et qui ont une charge de travail énorme. L’UISG leur apporte une possibilité de prendre du recul sur certains thèmes et sur leur fonction de supérieure, et facilite le dialogue entre les continents. C’est bon pour elles de pouvoir parler et de connaître les autres supérieures qui connaissent les mêmes problématiques qu’elles.

Zenit : Quel regard portez-vous sur la mission globale de l’IUSG ?

L'Assemblée plénière s'est terminée par une messe à la basilique Sainte-Marie-Majeure, devant la tombe du pape François © UISG

L’Assemblée plénière s’est terminée par une messe à la basilique Sainte-Marie-Majeure © UISG

Sr F. de la Villéon : Je crois que le regard qu’on porte ici, à l’UISG, est un regard plein d’espérance et très positif. Nous sommes témoins de tellement d’initiatives aujourd’hui, de la vie qui naît dans d’autres régions du globe ! Mais dans certains pays malheureusement, beaucoup de nos sœurs souffrent d’abus, sont persécutées ou exploitées. D’autre part, certaines congrégations sont situées dans des pays où il n’y a pas de liberté religieuse.

Nous sommes au carrefour de la détresse de certaines religieuses ou de certaines congrégations. De ce fait, nous ne travaillons pas seulement à la formation des sœurs, mais aussi à leur bien-être. Nous essayons d’être présentes sur ces deux dimensions. Donc, à la fois, il y a beaucoup d’espoir de voir ce partage possible entre supérieures générales ; et à la fois, il y a encore beaucoup de travail à faire.

Il y a aussi de la souffrance matérielle. Des tas de congrégations n’ont pas d’argent ou de quoi vivre, avec d’un autre côté des congrégations riches et prêtes à aider les plus précaires. Quand on a des appels, on essaie d’y répondre. Lors du Covid par exemple, un fond de solidarité s’est mis en place très concrètement. Ou bien lorsqu’il y a des pays en conflit, nous pouvons débloquer des fonds pour aider les populations souffrantes. En ce moment, nous sommes en train de monter un fond de solidarité pour les congrégations en difficulté avec leurs sœurs aînées.

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Anne van Merris

Journaliste française, Anne van Merris a été formée à l'Institut européen de journalisme Robert Schuman, à Bruxelles. Elle a été responsable communication au service de l'Église catholique et responsable commerciale dans le privé. Elle est mariée et mère de quatre enfants.

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