« La consolation authentique est une sorte de confirmation que nous faisons ce que Dieu veut de nous, que nous marchons sur ses chemins, c’est-à-dire sur les chemins de la vie, de la joie, de la paix », a expliqué le pape François dans sa catéchèse sur le discernement, ce mercredi 30 novembre 2022.
Le pape François poursuit son cycle de catéchèses sur le discernement, lors de l’audience générale hebdomadaire. Ce mercredi 30 novembre, Place Saint-Pierre, en présence d’une foule encore nombreuse malgré le rafraîchissement du temps, il a approfondi le thème de la « consolation spirituelle », abordé le 23 novembre dernier, en interrogeant sur ce qu’est une « consolation authentique ».
Le discernement ne concerne pas simplement « ce qui est bon ou le plus grand bien possible », mais « ce qui est bon pour moi ici et maintenant ». Une « consolation authentique », souligne François, permet de « ne pas se fourvoyer dans la recherche de notre vrai bien ». Comment alors la « reconnaître » ? En vérifiant que « le début, le milieu et la fin » des pensées soient « entièrement bons », c’est-à-dire « orientés vers le bien » et accompagnées « d’affection envers le Seigneur et le prochain », précise le pape jésuite.
Le « style de l’ennemi » étant « d’entrer secrètement, sans que personne ne s’en rende compte », il convient d’apprendre « de l’expérience, de ce qui nous arrive » à travers un « examen patient mais indispensable de l’origine et de la vérité de ses pensées ». Car plus on se connaît, encourage le pontife, plus on détecte les « mots de passe » du « mauvais esprit », les « portes d’entrée de notre cœur, qui sont les points auxquels nous sommes le plus sensibles », afin d’être davantage sur ses gardes.
Catéchèse du pape François en italien (Traduction intégrale)
Chers frères et sœurs, bonjour !
Dans notre réflexion sur le discernement, et en particulier sur l’expérience spirituelle appelée « consolation », dont nous avons parlé mercredi dernier, demandons-nous : comment reconnaître une consolation authentique ? C’est une question très importante pour un bon discernement, afin de ne pas se fourvoyer dans la recherche de notre vrai bien.
Nous pouvons trouver quelques critères dans un passage des Exercices spirituels de saint Ignace de Loyola. Il dit : « Si dans les pensées le début, le milieu et la fin sont entièrement bons, orientés entièrement vers le bien, c’est le signe du bon ange. Mais si le déroulement de nos pensées nous amène finalement à quelque chose de mauvais, ou de distrayant, ou de moins bon que ce que l’âme projetait d’abord, ou qui affaiblit, inquiète et trouble l’âme en lui enlevant la paix, la tranquillité et le repos qu’elle avait auparavant c’est un signe clair qu’il procède du mauvais esprit » (n° 333). Parce que c’est vrai : il y a une véritable consolation, mais il y a également des consolations qui ne sont pas véritables. Et c’est pourquoi il faut bien comprendre le chemin de la consolation : comme avance-t-il et où me porte-t-il ? Si elle me conduit vers quelque chose qui va moins bien, qui n’est pas bon, la consolation n’est pas véritable, elle est « feinte », pourrions-nous dire.
Ce sont des indications précieuses, qui méritent un bref commentaire. Qu’est-ce que cela signifie que le début est orienté vers le bien, comme le dit saint Ignace à propos d’une bonne consolation ? Par exemple, j’ai la pensée de prier, et je remarque qu’elle s’accompagne d’affection envers le Seigneur et le prochain, elle invite à accomplir des actes de générosité, de charité : c’est un bon début. D’autre part, il peut arriver que cette pensée surgisse pour éviter un travail ou une tâche qui m’a été confiée : chaque fois que je dois laver la vaisselle ou nettoyer la maison, j’ai une grande envie de me mettre à prier ! Cela arrive, dans les couvents. Mais la prière n’est pas une fuite de ses tâches, au contraire, elle est une aide pour réaliser ce bien que nous sommes appelés à réaliser, ici et maintenant. Voilà pour le début.
Il y a ensuite le milieu : saint Ignace disait que le début, le milieu et la fin doivent être bons. Le début, c’est cela : j’ai envie de prier pour ne pas laver les assiettes : vas-y, lave les assiettes et ensuite va prier. Puis, il y a le milieu, c’est-à-dire ce qui vient après, ce qui suit cette pensée. En restant dans l’exemple précédent, si je commence à prier et que, comme le fait le pharisien de la parabole (cf. Lc 18, 914), j’ai tendance à être content de moi et à mépriser les autres, peut-être avec un esprit rancunier et acariâtre, alors ce sont des signes que l’esprit mauvais a utilisé cette pensée comme une clé pour entrer dans mon cœur et me transmettre ses sentiments. Si je vais prier et qu’il me vient à l’esprit la pensée du fameux pharisien – « Je te remercie, Seigneur, parce que je prie, je ne suis pas comme ces gens qui ne te cherchent pas, ne te prient pas », – là, cette prière va mal finir. Cette consolation dans la prière est pour se sentir comme un paon devant Dieu. Et cela, c’est le milieu qui ne va pas.
Et puis il y a la fin. Le début, le milieu et la fin. La fin est un aspect que nous avons déjà abordé, à savoir : où me mène-t-elle cette pensée ? Par exemple, il peut arriver que je travaille dur pour une œuvre belle et méritable, mais cela me pousse à ne plus prier, parce que je suis pris par tellement de choses, je me retrouve de plus en plus agressif et en colère, j’ai l’impression que tout dépend de moi, au point de perdre la confiance en Dieu. Ici, c’est évidemment l’action du mauvais esprit. Je me mets à prier et puis dans la prière, je me sens tout-puissant que tout doit passer par mes mains parce que je suis le seul, la seule capable de mener les choses : évidemment, le bon esprit n’est pas là. Il convient de bien examiner le chemin de nos sentiments et le chemin des bons sentiments, de la consolation, au moment où je veux faire quelque chose. Comment est le début, comment est le milieu et comment est la fin.
Le style de l’ennemi – quand nous parlons de l’ennemi, nous parlons du diable, parce que le démon existe, il y a un démon ! – son style, nous le savons, consiste à se présenter de manière sournoise, masquée : il part de ce qui nous est le plus cher et ensuite il nous attire à lui, petit à petit : le mal entre secrètement, sans que la personne ne s’en rende compte. Et avec le temps, la douceur devient dureté : cette pensée se révèle pour ce qu’elle est vraiment.
D’où l’importance de cet examen patient mais indispensable de l’origine et de la vérité de ses pensées ; c’est une invitation à apprendre de l’expérience, de ce qui nous arrive, afin de ne pas continuer à reproduire les mêmes erreurs. Plus nous nous connaissons nous-mêmes, plus nous détectons par où entre le mauvais esprit, ses « mots de passe« , les portes d’entrée de notre cœur, qui sont les points sur lesquels nous sommes plus sensibles, afin d’y prêter attention à l’avenir. Chacun de nous a ses points plus sensibles, les points plus faibles de sa personnalité : et c’est par là qu’entre l’esprit mauvais et qu’il nous conduit sur un chemin erroné, ou qu’il nous détourne du chemin véritable et juste. Je vais prier, mais il m’éloigne de la prière.
On pourrait multiplier les exemples à volonté, en réfléchissant sur nos journées. C’est pourquoi l’examen de conscience quotidien est si important : avant de terminer sa journée, s’arrêter un peu. Que s’est-il passé ? Non pas dans les journaux, non pas dans la vie, mais que s’est-il passé dans mon cœur ? Et cet examen est important, c’est l’effort précieux pour relire l’expérience vécue d’un point de vue particulier. C’est important de prendre conscience de ce qui se passe, c’est un signe que la grâce de Dieu agit en nous, nous aidant à grandir en liberté et en conscience. Nous ne sommes pas seuls : c’est l’Esprit Saint qui est avec nous. Nous voyons comment les choses se sont passées.
La consolation authentique est une sorte de confirmation que nous faisons ce que Dieu veut de nous, que nous marchons sur ses chemins, c’est-à-dire sur les chemins de la vie, de la joie et de la paix. Le discernement, en effet, ne concerne pas simplement ce qui est bon ou le plus grand bien possible, mais ce qui est bon pour moi ici et maintenant : ainsi suis-je appelé à grandir, en fixant des limites à d’autres propositions, séduisantes mais irréelles, afin de ne pas être abusé dans la recherche du vrai bien.
Frères et sœurs, il faut comprendre, progresser dans la compréhension de ce qui se passe dans mon cœur. Et c’est pourquoi il faut faire un examen de conscience pour voir ce qui s’est passé aujourd’hui. « Aujourd’hui, là, je me suis mis en colère, je n’ai pas fait ceci… » : mais pourquoi ? Aller au-delà du pourquoi, c’est chercher la racine de ces erreurs. « Mais aujourd’hui, j’ai été heureux, mais cela m’ennuyait parce qu’il fallait que j’aide des gens, mais à la fin je me suis senti comblé en ayant aidé : c’est l’Esprit-Saint. Apprendre à lire dans le livre de notre cœur ce qui s’est passé pendant la journée. Faites-le, à peine deux minutes, mais cela vous fera du bien, je vous assure.
© Traduction de Zenit