Mgr Gabriele Caccia © Vatican Media

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ONU : Position mitigée du Saint-Siège sur certains processus décisionnels

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Il rappelle l’approche « intégrale » de l’Agenda 2030

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Mgr Gabriele Caccia se félicite d’une décision adoptée « par consensus » à la deuxième Commission – qui traite des affaires économiques et financières – dans le cadre des discussions en cours sur la revitalisation de l’Assemblée générale de l’ONU. Mais il regrette les changements concernant la périodicité de certains projets de résolution, qui nécessitent des négociations longues et délicates.

L’observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies à New York, a fait une déclaration lors du débat général de la deuxième Commission, à la 75e Session de l’Assemblée générale des Nations Unies, le 9 octobre 2020. Il a souligné l’importance de « respecter la nature intergouvernementale » de la deuxième Commission et « de maintenir l’accent sur le sujet des points de l’ordre du jour ».

Mgr Caccia a également rappelé que « le développement ne se limite pas simplement aux domaines économique ou financier » et que l’Agenda 2030 repose sur une « approche intégrale ». L’éradication de la pauvreté et l’élimination de la faim, a-t-il dit, constituent une « obligation découlant de notre humanité commune et de notre appel à être des protecteurs responsables les uns des autres ».

Voici notre traduction du discours de Mgr Gabriele Giordano Caccia.

HG

Déclaration de Mgr Gabriele Giordano Caccia

 Monsieur le Président,

Permettez-moi de commencer par vous féliciter, ainsi que le bureau, pour votre élection et de vous assurer du soutien du Saint-Siège pendant les travaux de cette session principale. En guise de contribution à ce débat général, ma délégation souhaiterait faire des commentaires sur trois questions.

Les dialogues informels sur la revitalisation de la deuxième Commission au cours de la 74e session ont confirmé l’engagement des États membres à l’égard du mandat et de l’objectif de cet organe. Nous remercions l’Ambassadeur Cheikh Niang pour ses efforts inlassables pour faire avancer ces discussions. L’adoption d’une décision par consensus a fait honneur à toutes les délégations et c’est un signe d’espoir en un esprit de consensus renouvelé au sein de la Commission.

Le Saint-Siège a pris une part active aux discussions et a été très heureux de voir que la décision affirmait que les travaux de la Commission « doivent être mieux alignés sur l’Agenda 2030 et le Programme d’action d’Addis-Abeba, tout en reconnaissant que le champ de compétence de la deuxième Commission est plus large que celui de l’Agenda 2030 » (paragraphe 5). Un accord sur ce point fondamental permettra sans doute de faciliter la poursuite des discussions sur la revitalisation.

Le Saint-Siège est toutefois préoccupé par le fait que la décision susmentionnée a introduit des changements en ce qui concerne la périodicité de certains projets de résolution. La périodicité de chaque projet de résolution est le résultat de négociations intergouvernementales lors des sessions de la Deuxième Commission des années précédentes et reflète un équilibre délicat que les délégations ont atteint, dans un esprit de compromis.

En ce qui concerne les travaux futurs sur la revitalisation, ma délégation encourage la Commission à examiner l’impact de cette décision sur nos discussions sur des points particuliers de l’ordre du jour ainsi que sur les négociations de résolutions en général. Pour respecter la nature intergouvernementale de cet organe et la nécessité de maintenir l’accent sur le sujet des points de l’ordre du jour, il faut que les rapports du Secrétaire général soient présentés en temps voulu, que les réunions soient bien planifiées et que le temps nécessaire aux discussions soit suffisant. De même, pour que les négociations soient fructueuses, il faut faire circuler rapidement les projets (avec les sources et en format Word), prévoir suffisamment de temps pour consulter les capitales et mener des consultations informelles sérieuses, ouvertes, transparentes et inclusives.

Développement humain intégral et soin de notre maison commune

Pour le Saint-Siège, les principaux aspects du mandat et de l’ordre du jour de la deuxième Commission sont la promotion du développement humain intégral et la protection de notre maison commune. L’éradication de la pauvreté sous toutes ses formes et dans toutes ses dimensions, la croissance économique et la politique macroéconomique, le financement du développement, la promotion du développement durable, le développement agricole, la sécurité alimentaire et la nutrition servent tous le bien de la personne humaine dans son ensemble (1). Le développement ne se limite pas simplement aux domaines économique ou financier, mais implique plutôt une unité des dimensions économiques, écologiques, sociales, culturelles, spirituelles, éthiques et humaines, puisque notre travail concerne la dignité et le développement des hommes, des femmes et des enfants ainsi que le bien commun de tous les peuples.

L’Agenda 2030, pour lequel la communauté internationale s’est réunie « affirmant sa volonté d’éradiquer la pauvreté sous toutes ses formes et dans toutes ses dimensions et de faire en sorte que tous les enfants, femmes et hommes du monde entier disposent des conditions nécessaires pour vivre dans une liberté et une dignité véritables » (2), repose sur cette approche intégrale.

Le bien de la personne humaine est lié au respect des droits de l’homme universels et de la dignité humaine. On ne saurait donc surestimer l’importance de la promotion et de la protection des droits fondamentaux de l’homme dans la lutte pour l’éradication de la pauvreté et la promotion d’un développement humain intégral. Cependant, il est inutile pour l’Assemblée générale que des sujets fassent double emploi dans différentes commissions ou que des questions controversées qui empêchent les progrès d’une commission soient introduites dans d’autres commissions ou forums, avec le même résultat prévisible. Par conséquent, les considérations spécifiques sur les droits de l’homme et les libertés fondamentales, y compris la signification du terme « droits », font partie des discussions de la Troisième Commission.

Décennie d’action

En ce qui concerne la Décennie d’action dans laquelle la communauté internationale s’est engagée, il est impératif qu’elle soit à la hauteur de son nom et qu’elle tienne ses promesses, à commencer par l’éradication de la pauvreté et l’élimination de la faim. Il ne s’agit pas d’une obligation fondée en fin de compte sur des documents ou des plans politiques, mais plutôt d’une obligation découlant de notre humanité commune et de notre appel à être des protecteurs responsables les uns des autres. Nous ne pouvons accepter que des centaines de millions de personnes survivent avec peine et soient privées de leur pain quotidien (3), que des millions de personnes continuent d’être privées des biens de première nécessité, que les inégalités économiques et technologiques détériorent notre tissu social et que la dépendance à l’égard d’un progrès matériel illimité menace notre maison commune (4).

Faire progresser la mise en œuvre de l’Agenda 2030 et d’autres engagements connexes, tels que ceux énoncés dans le programme d’action d’Addis-Abeba, ainsi que nos obligations de protéger l’environnement, est devenu encore plus difficile en raison de l’impact dévastateur de la pandémie de COVID-19. La pandémie a « mis en évidence la vulnérabilité et l’interdépendance de tous » (5) ; c’est pourquoi, comme l’a fait remarquer le pape François, « nous ne pouvons pas guérir le monde » si nous « ne prenons pas soin les uns des autres, en commençant par les plus petits, ceux qui sont les plus touchés, y compris la création elle-même » (6) ; c’est dans cet esprit que le pape François a lancé la Commission COVID-19 du Vatican. Grâce à l’activité de ses cinq groupes de travail, qui se concentrent sur des aspects spécifiques de la pandémie, la Commission aide les églises locales du monde entier à élaborer des réponses efficaces et adéquates aux besoins des personnes sur le terrain.

En conclusion, je tiens à assurer chacun de l’engagement constructif du Saint-Siège auprès de cette deuxième Commission au cours des prochains mois. Les questions débattues ont des conséquences concrètes et méritent toute notre attention et notre action commune.

Je vous remercie, Monsieur le Président.

____________

(1) Cf. Pape Paul VI, Populorum Progressio, n. 14.

(2) Note du Saint-Siège pour le premier anniversaire de l’adoption des Objectifs de développement durable, n. 15.

(3) Cf. Pape François, message préenregistré lors du débat général de la soixante-quinzième session de l’Assemblée générale des Nations unies, 25 septembre 2020.

(4) Cf. Pape François, Discours lors de l’audience générale, 26 août 2020.

(5) Cf. Pape François, Discours lors de l’audience générale, 12 août 2020.

(6) Cf. Pape François, Discours lors de l’audience générale, 12 août 2020.

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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