« L’une de ses expressions les plus célèbres est devenue pour ainsi dire proverbiale: « L’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres, ou s’il écoute les maîtres, il le fait parce qu’ils sont des témoins » (Evangelii Nuntiandi, 41). Eh bien, cette phrase même semble être la biographie la plus authentique du Pape qui l’a prononcée : Paul VI, lui-même messager du Christ lumière et maître exceptionnel de la foi en Dieu et en l’homme », souligne le cardinal Becciu.
Le cardinal Giovanni Angelo Becciu, préfet de la Congrégation des causes des saints, a présenté la figure de Paul VI lors de la conférence de presse organisée par le Saint-Siège au Vatican, jeudi 10 octobre 2018, à 17h, en vue de la canonisation des bienheureux Paul VI et Oscar Arnulfo Romero y Galdámez qui aura lieu dimanche prochain, 14 octobre.
Il a souligné que la réforme de Paul VI était « une « réforme intérieure » de l’Église, orientée vers la sainteté ».
Le cardinal Becciu a aussi présenté 5 autres futurs saints et le cardinal Gregorio Rosa Chavez a présenté Mgr Oscar Arnulfo Romero, annonçant que le pape François envisageait un pèlerinage sur sa tombe, en janvier prochain, au Salvador, à l’occasion de son voyage au Panama pour la JMJ.
Voici notre traduction du texte écrit de son intervention, à propos de Paul VI.
AB
Paul VI sera canonisé le 14 octobre prochain par notre pape François. Il était le Pape du Concile Vatican II. Si Jean XXIII a eu le courage prophétique d’ouvrir la grande assemblée oecuménique, Paul VI a eu la mission de la guider, de la conclure et de la faire entrer dans la vie de l’Église et du monde. Avant son élection au suprême Pontificat, Mgr Giovanni Battista Montini a été le principal collaborateur du Vénérable Pie XII. Puis il fut très proche de Jean XXIII. Lorsqu’il devint Pape, c’est lui qui créa les cardinaux qui seront ses successeurs : Albino Luciani, Karol Wojtyla et Joseph Ratzinger. La figure et la mission de Paul VI sont donc à considérer dans cette continuité historique de la tradition vivante de l’Église.
Décédé le 6 août 1978, en la fête de la Transfiguration du Seigneur, le pape Montini fut un témoin héroïque et génial du Christ, lumière du monde. Ce christocentrisme profond et convaincu constitue la force motrice de son profil spirituel et de son magistère extraordinaire. L’amour de Jésus et de son Église, pour le renouveau duquel il s’est engagé au-delà de ses forces, a été mené ad finem. De ce point de vue, nous pouvons inscrire sa vie dans un cheminement continu de sainteté, depuis son enfance jusqu’à son ordination sacerdotale, de son engagement dans la Curie romaine à la Chaire Ambrosienne, de son travail pastoral au Siège de Pierre.
Giovanni Battista Montini a personnellement connu les grands drames du XXe siècle : les deux guerres mondiales, les systèmes totalitaires du fascisme, du nazisme et du communisme, et puis la violence extrême du terrorisme. Mais il y a eu aussi des questions épineuses au sein de la communauté chrétienne : les années qui ont suivi immédiatement le Concile ont été les plus difficiles et les plus douloureuses de son pontificat.
Mais dans tous ces événements, il a été constamment soutenu par cet Esprit du Christ qui a nourri sa vie intérieure et ses innombrables et courageuses initiatives. Parmi les plus saillantes, on a en mémoire : la réforme liturgique, l’internationalisation de la Curie romaine avec l’institution de nouveaux Dicastères, l’institution du Synode des Évêques. Une autre grande nouveauté, ses voyages apostoliques dans différentes parties du monde, au service de l’évangélisation et de la paix. D’un point de vue doctrinal, son magistère ne fut pas de reste. En raison de leur caractère d’immédiateté pastorale, ses audiences générales du mercredi (une autre de ses initiatives, qui sera poursuivie par ses successeurs), ont une originalité particulière. Elles sont une catéchèse continue pour le peuple de Dieu. Ses enseignements illuminent de nombreux aspects de la foi et de l’existence chrétienne et brillent d’un engagement parfois héroïque à défendre la vérité, la vie, la famille, la paix et l’authenticité de l’amour. Fidèle au programme de sa première encyclique, Ecclesiam Suam, Paul VI fut toujours le Pape du « dialogue avec tous » : au sein de l’Église catholique, avec les frères chrétiens des autres Églises, avec les non chrétiens et les non-croyants, et toujours avec la passion de l’évangélisation, pour apporter à tout homme la lumière du Christ, l’amour du Christ.
Comme synthèse et sommet de tout son cheminement, nous observons chez Paul VI, une manière vraiment prophétique, la grande ligne de la charité, soutenue et motivée par une foi vivante et solide. A un prêtre de Milan qui lui demandait ce qui était le plus important pour la formation des séminaristes, il avait répondu : « Apprenez-leur à traiter Jésus comme l’ami du cœur ; le prêtre doit être amoureux de Jésus ».
C’est de cet amour, vécu et témoigné, que jaillit la grande dynamique qu’il proposa universellement : le Christ, l’Eglise, le Monde. Nous devons aimer l’Église – dit le Pape Montini – dans sa réalité, simul sancta et semper purificanda (LG 8). C’est la plus grande « antinomie » que la charité doit savoir surmonter et résoudre. Le cœur de Paul VI débordait dans l’expression de la plus pure spiritualité du Concile : une « réforme intérieure » de l’Église, orientée vers la sainteté, qui unit prière et dogme, charité et vérité, et qui anime le peuple de Dieu dans la diversité des vocations, dans le dialogue oecuménique, dans sa véritable ouverture au monde pour mieux communiquer la lumière du Christ. Toute la vie de Paul VI était animée d’un grand amour pour le prochain, comme jeune laïc, puis comme prêtre, évêque et pape. C’est comme une croissance et une dilatation de la charité jusqu’à la charité du Pape comme Pasteur Universel, Vicaire du Christ Bon Pasteur. Il exerça particulièrement cette charité à Rome, pendant la Seconde Guerre mondiale, en favorisant l’assistance caritative et l’hospitalité pour les persécutés du fascisme nazi, d’une manière saillante pour les juifs, puis dans son épiscopat milanais. Elu Pape, il s’engagera toujours pour la justice et la paix, dans la dynamique de l’Évangile.
L’une de ses expressions les plus célèbres est devenue pour ainsi dire proverbiale: « L’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres, ou s’il écoute les maîtres, il le fait parce qu’ils sont des témoins « (Evangelii Nuntiandi, 41). Eh bien, cette phrase même semble être la biographie la plus authentique du Pape qui l’a prononcée : Paul VI, lui-même messager du Christ lumière et maître exceptionnel de la foi en Dieu et en l’homme.
Traduction d’Océane Le Gall