Sans Marie, l’Église risque de « se déshumaniser », explique le p. José Tolentino de Mendonça.
Les béatitudes et le style de vie des croyants et de l’Église c’était le thème de la méditation par laquelle le prédicateur de la retraite de carême du pape François a conclu, ce vendredi matin, 23 février 2018, la retraite de carême du pape et de la Curie romaine, à la Maison du Divin Maître à Ariccia, à 25 km au sud-est de Rome.
La béatitude de Marie
Cette 10e méditation suit le fil conducteur du Discours sur la montagne, et de l’enseignement des béatitudes, « visage » et « vie » même de Jésus auquel le prédicateur invite ses retraitants à se « conformer ». Il a évoqué la « béatitude de la soif » et la « béatitude de Marie », selon la synthèse publiée en italien par Vatican Media.
En effet, le p. José Tolentino voit l’Eglise en « style marial »: Marie « hospitalière », à l’écoute et « ouverte à la vie » ; Marie « honnête » à l’égard de Dieu ; Marie « au service » d’un projet « plus grand ». Sans Marie, conclut-il, l’Église risque de « se déshumaniser », de devenir « fonctionnaliste », « une usine fébrile incapable de se poser ».
C’est encore à l’Église que le p. José Tolentino s’adresse dans la dernière partie de sa méditation consacrée à la « béatitude » de Marie, maîtresse et modèle de l’Église en chemin. Il est important de ne pas la regarder la de façon « abstraite », mais au contraire « réelle et concrète ».
Son dialogue avec Dieu, au moment de l’Annonciation est « franc »: il ne laisse pas apparaître « d’émotions », de « surprises », ni de « doutes », jusqu’à la « confiance inconditionnelle » et à son « oui »: Dieu ne sauve pas « malgré nous, mais avec tout ce que nous sommes » et cela fait « affronter la vie avec une confiance renouvelée ».
Un auto-portrait de Jésus
Les béatitudes, dans l’Évangile de Matthieu, « sont plus qu’une loi », explique le prédicateur : elles représentent en soi une « configuration de la vie », un « véritable appel existentiel », elles dessinent « l’art d’être ici et maintenant », mais indiquent aussi l’ « horizon de plénitude eschatologique ».
Surtout, explique-t-il encore, les béatitudes sont aussi l’ « autoportrait de Jésus le plus exact et le plus fascinant », la « clé « de sa vie, « pauvre en esprit, doux et miséricordieux, assoiffé et homme de paix, affamé de justice et avec la capacité d’accueillir tous les hommes ».
« Les béatitudes sont son autoportrait, l’image de lui-même qu’il nous révèle sans cesse et qu’il imprime dans nos cœurs. Mais elles sont aussi son portrait qui doit nous servir de modèle dans le processus de transformation de notre propre visage, dans lequel approfondir l’ « image et la ressemblance » spirituelle qui lie chaque jour notre destin à celui de Jésus ».
La béatitude de la soif
Et celui qui est son « portrait » et sa « mémoire », remarque le père José Tolentino, le voit aussi « tel qu’il est ».
La « soif de Dieu » – thème de la retraite – c’est de faire que « la vie de ses créatures soit une vie de béatitude ». Comment ?, interroge le p. Tolentino, par l’oeuvre de la rédemption, signe d’un « amour » et d’une « confiance » qui se révèlent «inconditionnels».
C’est cela la « méthode » du Christ, explique-t-il, c’est cela la « béatitude qui nous sauve »: c’est cet « étonnement d’amour qui nous fait repartir », cette « soif » qui réussit à arracher à l’ « exil ».
« C’est pourquoi, continue le prédicateur du pape, un christianisme de survie ne nous suffit pas, ni un catholicisme de manutention. Un véritable croyant, une communauté croyante, ne peuvent vivre uniquement de manutention : il lui faut une âme jeune et amoureuse, qui se nourrisse de la joie de la recherche et de la découverte, risque l’hospitalité de la Parole de Dieu dans la vie concrète, parte à la rencontre de ses frères dans le présent et dans l’avenir, vive dans le dialogue confiant et caché de la prière ».
Il est urgent, diagnostique le prédicateur, de « redécouvrir la béatitude de la soif » : le pire pour un croyant, c’est d’ « être rassasié de Dieu ». Heureux en revanche ceux qui « ont faim et soif de Dieu » : l’expérience de la foi, en effet, insiste-t-il, « ne sert pas à résoudre la soif », mais à « dilater notre désir de Dieu, à intensifier notre recherche. Peut-être avons-nous besoin de nous réconcilier plusieurs fois avec notre soif en nous redisant : “Ma soif est ma béatitude” ».
Avec une traduction d’Hélène Ginabat