Les Nations Unies © Mission du Saint-Siège à l'ONU

Les Nations Unies © Mission du Saint-Siège à l'ONU

ONU : les droits de l’homme ne peuvent être "un fourre-tout rhétorique"

Mise en garde par Mgr Janusz S. Urbanczyk (Traduction intégrale)

Share this Entry

« Le terme “droit de l’homme” doit être strictement et prudemment appliqué, de peur qu’il ne devienne un fourre-tout rhétorique, sans cesse élargi pour répondre aux caprices passagers de l’époque », avertit le Saint-Siège. « Une telle approche élastique discréditerait le concept même des droits de l’homme. »
Mgr Janusz S. Urbanczyk, représentant permanent du Saint-Siège, est en effet intervenu à la séance d’ouverture de la Réunion de mise en œuvre de la dimension humaine 2017 de l’OSCE ce lundi 11 septembre 2017 à Varsovie.
Pour la Doctrine sociale de l’Église, rappelle-t-il, « les droits de l’homme sont décrits comme universels, inaliénables et inviolables… La sécurité, la sûreté et la paix ne résultent pas de la limitation des droits de l’homme, mais plutôt de leur jouissance par tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion ».
Mgr Urbanczyk met aussi en garde contre le fait de « sortir ces droits de leur propre contexte, en limitant l’étendue de l’application des droits et en permettant de varier le sens et l’interprétation des droits et de nier leur universalité au nom de différentes perspectives culturelles, politiques et sociales ». « Une telle approche, explique-t-il, semblable à celle qui considère les droits de l’homme et les libertés fondamentales comme des privilèges accordés par l’État (pour être révoqués à son gré), nuit à l’idée même des droits de l’homme et entrave certainement leur jouissance par chaque homme et chaque femme. »
Le rôle de l’OSCE est de « corriger » les « infractions, faire avancer la cause des droits humains universels et promouvoir la juste protection si nécessaire de ces droits », exhorte le représentant du Saint-Siège.
Voici notre traduction de la déclaration en anglais de Mgr Urbanczyk.
HG
 
Madame la Présidente,
Le Saint-Siège est heureux de participer à cette réunion  de mise en œuvre de la dimension humaine (HDIM) 2017 et remercie la Pologne, notre pays hôte, pour son hospitalité, ainsi que la présidence autrichienne de l’OSCE et le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme, pour la planification et l’organisation de cette réunion.
Ma délégation souhaite profiter de cette occasion pour féliciter Votre Excellence pour votre nomination en tant que Directeur du BIDDH et exprime ses meilleurs vœux pour votre travail d’assistance et de soutien aux États participants dans la mise en œuvre de leurs engagements en matière de dimension humaine. Le Saint-Siège vous assure de son souhait d’un dialogue et d’une coopération continus et constructifs avec votre Bureau.
Depuis les négociations qui ont mené à l’Acte final d’Helsinki, le Saint-Siège a mis l’accent sur la dimension humaine de l’OSCE, car la sécurité, la sûreté et la paix ne résultent pas de la limitation des droits de l’homme, mais plutôt de leur jouissance par tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion. Par conséquent, le Saint-Siège considère la réunion de mise en œuvre de la dimension humaine comme une composante centrale de la structure de l’OSCE, car elle permet aux 57 États participants non seulement de faire le point, mais aussi de confirmer notre chemin commun vers une région irréprochable dans son respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Depuis les précédents HDIM, le Saint-Siège a décrit, en détail, sa position sur les principales questions de dimension humaine auxquelles font face les 57 États participants. Ces déclarations mettent à la disposition des délégations et des représentants de la société civile les vues bien connues et fondées sur des principes du Saint-Siège.
Par conséquent, je saisis cette occasion pour parler brièvement de quelques concepts clés relatifs aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales en général:
Dans le Compendium de la Doctrine sociale de l’Église, les droits de l’homme sont décrits comme universels, inaliénables et inviolables. Ces trois caractéristiques proviennent de la « pierre de fondation » la plus profonde, à savoir la nature donnée par Dieu de la dignité humaine. Les droits de l’homme sont universels car ils s’appliquent à tous les humains sans exception de temps, de lieu ou de sujet. Ils sont inviolables dans la mesure où ils sont inhérents à la personne humaine et sont des expressions de la dignité humaine, et parce que la proclamation de ces droits exige un respect total de chaque personne et demande le respect, pour chaque personne et partout. Enfin, ces droits sont inaliénables dans la mesure où personne – qui que ce soit – ne peut légitimement priver les autres de ces droits, car cela contredirait leur nature même.
Le Saint-Siège a en outre exprimé sa préoccupation quant à sortir ces droits de leur propre contexte, en limitant l’étendue de l’application des droits et en permettant de varier le sens et l’interprétation des droits et de nier leur universalité au nom de différentes perspectives culturelles, politiques et sociales. Une telle approche, semblable à celle qui considère les droits de l’homme et les libertés fondamentales comme des privilèges accordés par l’État (pour être révoqués à son gré), nuit à l’idée même des droits de l’homme et entrave certainement leur jouissance par chaque homme et chaque femme.
Comme l’a déclaré le pape François : « La dignité de la personne humaine et le bien commun sont plus élevés que le confort de ceux qui refusent de renoncer à leurs privilèges » 1. Par conséquent, le terme « droit de l’homme » doit être strictement et prudemment appliqué, de peur qu’il ne devienne un fourre-tout rhétorique, sans cesse élargi pour répondre aux caprices passagers de l’époque. Une telle approche élastique discréditerait le concept même des droits de l’homme. Pour la bonne compréhension des « droits de l’homme », le Saint-Siège apporte son soutien moral et encourage les États participants à faire des droits de l’homme et des libertés fondamentales une réalité pour tous.
Le Saint-Siège est fermement convaincu que, pour que les droits de l’homme portent du fruit, ils doivent non seulement être proclamés par des mots, mais ils doivent également être mis en pratique (2). Dans son premier message de la Journée Mondiale de la Paix, le Pape François a exprimé ce profond regret : « En de nombreuses régions du monde, il  semble qu’il n’y ait pas de fin aux infractions graves aux droits fondamentaux de l’homme » (3). Il est clair que l’OSCE est idéalement placée pour corriger ces infractions, faire avancer la cause des droits humains universels et promouvoir la juste protection si nécessaire de ces droits.
Les États participants de l’OSCE se sont mis d’accord sur le principe que le plein respect et la mise en œuvre de bonne foi de tous les engagements revêtent une importance fondamentale pour la stabilité et la sécurité de la région OSCE. Dans cette perspective, notre Organisation représente un forum politique dont les activités sont liées à la sécurité et dont les décisions, adoptées de manière consensuelle par les États participants, doivent être pleinement mises en œuvre de bonne foi. Cette idée fondamentale englobe également le travail de cette HDIM, essentiellement axée sur la mise en œuvre des engagements de l’OSCE en matière de dimension humaine, dont beaucoup doivent encore être pleinement mis en œuvre, plutôt que de les étendre.
À cet égard, il conviendrait de reconnaître que les appels à l’élargissement des engagements de l’OSCE sans reconnaître l’approche spécifique de l’OSCE en tant qu’organisme de sécurité régional – comme le Saint-Siège l’a souvent souligné – ne sert qu’à diluer les programmes et les projets de l’OSCE et à dupliquer les activités d’autres organisations. Dans le même temps, il convient de noter que la notion d’ « interprétation » ne peut pas être utilisée de manière à aboutir à une modification substantielle (3) prévalant sur les engagements existants de l’OSCE ou les transformant, car une telle approche serait contraire au principe de bonne foi et au Règlement intérieur de l’Organisation.
En conclusion, ma délégation aimerait souhaiter des débats fructueux à tous les organisateurs et participants à la HDIM 2017, en assurant chacun de notre engagement constructif au cours des deux prochaines semaines.
Merci, Madame la Présidente.
 
(1) Pape François, Exhortation apostolique Evangelii Gaudium, § 218.
(2) Cf. Pape Benoît XVI, Discours au corps diplomatique accrédité auprès du Saint-Siège (janvier 2008).
(3) Pape François, Message pour la Journée mondiale de la paix, 2014, § 1.

Share this Entry

Hélène Ginabat

FAIRE UN DON

Si cet article vous a plu, vous pouvez soutenir ZENIT grâce à un don ponctuel