Rencontre avec les évêques de Pologne, cathédrale de Cracovie © L'Osservatore Romano

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"La paroisse est toujours valide !", assure le pape

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Dialogue avec les évêques polonais (3)

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« La paroisse est toujours valide ! » affirme le pape François. Mais pas des paroisses « avec des secrétaires paroissiales qui ressemblent à des ‘disciples de Satan’, qui font peur aux gens » ni des «  paroisses aux portes fermées ».
Le pape a défendu la paroisse lors d’une rencontre à huis-clos avec les évêques polonais dans la cathédrale des Saints Stanislas et Venceslas de Cracovie le 27 juillet 2016, au cours de son voyage apostolique en Pologne. Le Saint-Siège a publié six jours plus tard la transcription de ce dialogue.
« La paroisse doit rester : c’est une structure que nous ne devons pas jeter par la fenêtre, a dit le pape. La paroisse est précisément la maison du peuple de Dieu, celle où il vit. Le problème est comment la paroisse est organisée ! »
« Tenir une paroisse est fatigant, a constaté le pape, dans ce monde d’aujourd’hui avec tous ses problèmes. » Mais «  le Seigneur nous a appelés pour que nous nous fatiguions un peu, pour travailler et non pour nous reposer », a-t-il ajouté avec humour. « La paroisse est fatigante quand elle est bien organisée. »
Selon le pape, la paroisse « doit rester comme un lieu de créativité, de référence, de maternité ». Il faut y « mettre en œuvre cette capacité d’inventivité, et quand une paroisse avance comme cela, a-t-il dit, elle réalise ce que j’appelle, à propos des disciples missionnaires, une ‘paroisse qui sort’ ».
Dialogue du pape François avec les évêques polonais (3)
Mgr Leszek Leszkiewicz (évêque auxiliaire de Tarnów):
Saint Père, notre engagement pastoral est basé essentiellement sur le modèle traditionnel de la communauté paroissiale, organisée autour de la vie sacramentelle. Un modèle qui continue à porter du fruit ici. Toutefois nous nous rendons compte que chez nous aussi, les conditions et les circonstances de la vie quotidienne changent rapidement et demandent de l’Église de nouvelles modalités pastorales. Les pasteurs et les fidèles ressemblent un peu à ces disciples qui écoutent, se donnent beaucoup de mal mais ne savent pas toujours mettre à profit le dynamisme missionnaire intérieur et extérieur des communautés ecclésiales. Saint Père, dans Evangelii gaudium, vous parlez des disciples missionnaires qui portent la Bonne nouvelle au monde d’aujourd’hui avec enthousiasme. Que nous suggérez-vous ? À quoi nous encouragez-vous pour que nous puissions édifier dans notre monde la communauté de l’Église de manière fructueuse, féconde, avec joie, avec un dynamisme missionnaire ?
Pape François
Merci ! Je voudrais souligner quelque chose : la paroisse est toujours valide ! La paroisse doit rester : c’est une structure que nous ne devons pas jeter par la fenêtre. La paroisse est précisément la maison du peuple de Dieu, celle où il vit. Le problème est comment la paroisse est organisée ! Il y a des paroisses avec des secrétaires paroissiales qui ressemblent à des « disciples de Satan », qui font peur aux gens ! Des paroisses aux portes fermées. Mais il y a aussi des paroisses aux portes ouvertes, des paroisses où, quand quelqu’un vient poser une question, on répond : « Oui, oui… Asseyez-vous. Quel est votre problème ?… ». Et on écoute patiemment… parce que prendre soin du peuple de Dieu est fatigant, c’est fatigant ! Un bon professeur universitaire, un jésuite que j’ai connu à Buenos Aires, lorsqu’il est parti à la retraite, a demandé au provincial d’aller comme curé dans un quartier pour faire cette nouvelle expérience. Une fois par semaine, il venait à la faculté – il dépendait de cette communauté – et un jour il m’a dit : « Dis à ton professeur d’ecclésiologie qu’il manque deux thèses dans son traité. – Lesquelles ? – D’abord, le peuple saint de Dieu est essentiellement fatigant. – Et la seconde ? – Le peuple saint de Dieu, ontologiquement, fait ce qui lui semble le mieux. Et c’est fatigant ! ». Aujourd’hui, être curé est fatigant ; tenir une paroisse est fatigant, dans ce monde d’aujourd’hui avec tous ses problèmes. Et le Seigneur nous a appelés pour que nous nous fatiguions un peu, pour travailler et non pour nous reposer. La paroisse est fatigante quand elle est bien organisée. Le renouvellement de la paroisse est une des choses que les évêques doivent toujours avoir sous les yeux : comment va cette paroisse ? Que fais-tu ? Comment va la catéchèse ? Comment l’enseignes-tu ? Est-elle ouverte ? Beaucoup de choses… Je pense à une paroisse de Buenos Aires, quand les fiancés arrivaient : « Nous voudrions nous marier ici – Oui, disait la secrétaire, voici les prix ». Cela ne va pas, une paroisse comme cela ne va pas. Comment les personnes sont-elles accueillies ? Comment sont-elles écoutées ? Y a-t-il toujours quelqu’un dans le confessionnal ? Dans les paroisses – pas celles qui sont dans des petits quartiers, mais dans les paroisses qui sont dans le centre, sur les grandes rues, s’il y a un confessionnal avec la lampe allumée, les gens y vont toujours. Toujours ! Une paroisse accueillante. Nous, les évêques, nous devons demander cela aux prêtres : Comment va ta paroisse ? Et est-ce que tu sors ? Est-ce que tu visites les détenus, les malades, les petites vieilles ? Et que fais-tu avec les enfants ? Comment les fais-tu jouer et comment marche « l’oratorio » ? C’est une des grandes institutions paroissiales, au moins en Italie. « L’oratorio » : les enfants y jouent et on leur donne une parole, un peu de catéchisme. Ils rentrent chez eux fatigués, contents et avec une bonne graine. La paroisse est importante !
Certains disent que la paroisse ne marche plus parce que c’est maintenant le temps des mouvements. Ce n’est pas vrai ! Les mouvements aident, mais les mouvement ne doivent pas être une alternative à la paroisse : ils doivent aider dans la paroisse, la faire vivre, de même qu’il y a la Congrégation mariale, l’Action catholique et beaucoup de réalités. Chercher la nouveauté et changer la structure paroissiale ? Ce que je vous dis pourra peut-être sembler une hérésie mais je la vis comme cela : je crois que c’est quelque chose d’analogue à la structure épiscopale, elle est différente mais analogue. On ne touche pas à la paroisse : elle doit rester comme un lieu de créativité, de référence, de maternité et toutes ces choses. Et là, mettre en œuvre cette capacité d’inventivité ; et quand une paroisse avance comme cela, elle réalise ce que j’appelle, à propos des disciples missionnaires, une « paroisse qui sort ». Par exemple, je pense à une paroisse – un bel exemple qui ensuite a été imité par beaucoup – dans un pays où il n’était pas habituel de baptiser les enfants, parce qu’il n’y avait pas d’argent ; mais pour la fête patronale, on prépare la fête 3 ou 4 mois avant, avec la visite dans les maisons et là, on voit combien d’enfants ne sont pas baptisés. On prépare les familles et une des activités de la fête patronale est le baptême des 30 – 40 enfants qui, sinon, seraient restés sans baptême. Inventer des choses de ce genre. Les gens ne se marient pas à l’église. Je pense à une réunion de prêtres ; l’un d’eux s’est levé et a dit : « As-tu pensé pourquoi ? » Et il a donné de nombreuses raisons que nous partageons : la culture actuelle, etc. Mais il y a un bon groupe de personnes qui ne se marient pas parce que, aujourd’hui, se marier coûte cher ! Tout coûte, la fête… C’est un fait social. Et ce curé, qui avait une grande inventivité, a dit : « Ceux qui veulent se marier, je les attends ». Parce qu’en Argentine, il y a deux mariages : on doit toujours aller à la mairie, où l’on fait le mariage civil et ensuite, si tu le veux, tu vas dans le temple de ta religion te marier. Quelques-uns – ils sont nombreux ! – ne viennent pas se marier parce qu’ils n’ont pas d’argent pour faire une grande fête… Mais les prêtres qui ont un peu de génie disent : « non, non, je t’attends ». Ce jour-là, à la mairie, on se marie à 11h, 12h, 13h, 14h : ce jour-là, je ne fais pas la sieste ! Après le mariage civil, ils se marient et vont en paix. Inventer, chercher, sortir, aller chercher les gens, se mettre dans les difficultés des gens. Mais une paroisse-bureau, aujourd’hui, ça ne va pas ! Parce que les gens ne sont pas disciplinés. Vous avez un peuple discipliné et c’est une grâce de Dieu ! Mais en général, ils ne sont pas disciplinés. Je pense à ma terre : les gens, si tu ne vas pas les chercher, si tu ne les approches pas, ils ne viennent pas. Et voilà le disciple missionnaire, la paroisse qui sort. Sortir et aller chercher, comme l’a fait Dieu qui à envoyé son Fils pour nous chercher.
Je ne sais pas si c’est une réponse simpliste, mais je n’en ai pas d’autre. Je ne suis pas un pastoraliste éclairé, je dis ce qui me vient.
 Traduction de Zenit, Constance Roques

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Marina Droujinina

Journalisme (Moscou & Bruxelles). Théologie (Bruxelles, IET).

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