Pape François – Vos quatre camarades vont poser leurs questions. Je remettrai le discours préparé à Mgr Semren qui vous le donnera ensuite. Et maintenant, les questions et réponses avec vous.
Un jeune, ayant entendu dire que depuis vingt ans, le pape ne regarde plus la télévision, lui demande pourquoi.
Pape François – Oui, au milieu des années 90, une nuit, j’ai senti que cela ne me faisait pas de bien, cela m’aliénait, me sortait… et j’ai décidé de ne pas la regarder.
Quand je voulais regarder un beau film, j’allais au centre de télévision de l’archevêché et je le regardais là-bas ; mais seulement ce film… La télévision, en revanche, m’aliénait et me sortait de moi, cela ne m’aidait pas… Évidemment, je suis de l’âge de pierre, je suis antique !
Et nous maintenant… je comprends que les temps ont changé : nous vivons à l’époque de l’image. Et c’est très important. Et à l’époque de l’image, il faut faire ce qu’on faisait au temps des livres : choisir les choses qui me font du bien, qui font du bien aux valeurs, qui construisent la société, qui nous poussent en avant, pas celles qui nous tirent vers le bas. Et puis faire des programmes qui nous aident afin que les valeurs, les vraies valeurs, deviennent plus fortes et nous préparent pour la vie. C’est la responsabilité des centres de télévision. Deuxièmement : savoir choisir les programmes, et cela, c’est notre responsabilité. Si je vois qu’un programme ne me fait pas de bien, démolit mes valeurs, me fait devenir vulgaire, même dans les saletés, je dois changer de canal. Comme on faisait à mon âge de la pierre : quand un livre était bon, tu le lisais ; quand un livre te faisait du mal, tu le jetais. Et puis il y a un troisième point : le point de la mauvaise imagination, de cette imagination qui tue l’âme. Si toi, qui es jeune, tu vis attaché à ton ordinateur et tu deviens esclave de ton ordinateur, tu perds ta liberté ! Et si, sur ton ordinateur, tu vas chercher des programmes sales, tu perds ta dignité !
Regarder la télévision, utiliser son ordinateur, mais pour les choses belles, les choses grandes, les choses qui nous font grandir. Cela, c’est bon ! Merci.
Cher Saint Père, je suis ici, dans ce centre Saint Jean-Paul II, et je voulais vous demander si vous aviez réussi à ressentir la joie et l’amour que tous ces jeunes de Bosnie-Herzégovine ont pour votre personne.
Pape François – Pour te dire la vérité, quand je trouve les jeunes, je ressens la joie et l’amour qu’ils ont. Pas seulement pour moi, mais pour les idéaux, pour la vie. Ils veulent grandir ! Mais vous avez une particularité : vous êtes la première – je crois – génération après la guerre. Vous êtes les fleurs d’un printemps, comme l’a dit Mgr Semren : les fleurs d’un printemps, qui veulent avancer et ne pas retourner à la destruction, aux choses qui nous rendent ennemis les uns des autres. Je trouve en vous cette volonté et cet enthousiasme. Et cela, c’est nouveau pour moi. Je vois que vous ne voulez pas de destruction : vous ne voulez pas être ennemis l’un de l’autre. Vous voulez marcher ensemble, comme l’a dit Nadežda. Et cela, c’est grand ! Je vois en cette génération, en vous aussi, en vous tous – j’en suis sûr ! Regardez en vous… – je vois que vous avez la même expérience que Darko. Nous ne sommes pas « eux et moi », nous sommes « nous ». Nous voulons être « nous », pour ne pas détruire notre patrie, pour ne pas détruire notre pays. Tu es musulman, tu es juif, tu es orthodoxe, tu es catholique… mais nous sommes « nous ». C’est cela, faire la paix ! Et c’est propre à votre génération, et c’est votre joie !
Vous avez une grande vocation. Une grande vocation : ne jamais construire de murs, seulement des ponts. Et c’est la joie que je trouve en vous. Merci !
Moi aussi je suis ici comme volontaire dans ce centre, Saint Père. Que pouvez-vous nous dire, quel est votre message pour la paix pour nous tous, les jeunes ?
Pape François – Dans cette réponse, je me répète un peu sur les choses que j’ai dites avant. Tout le monde parle de la paix : certains puissants de la terre parlent et disent de belles choses sur la paix, mais dessous, ils vendent les armes ! De vous, j’attends l’honnêteté, l’honnêteté entre ce que vous pensez, ce que vous sentez et ce que vous faites : les trois choses ensemble. Le contraire s’appelle l’hypocrisie ! Il y a des années, j’ai vu un film sur cette ville, je ne me souviens pas du nom, mais la version allemande – celle que j’ai vue – était « Die Brücke » (Le pont). Je ne sais pas comment il s’appelle dans votre langue… Et j’ai vu, là, combien le pont unit toujours. Quand on n’utilise pas le pont pour aller l’un vers l’autre, mais c’est un pont interdit, cela devient la ruine d’une ville, la ruine d’une existence ! C’est pour cela que de vous, de cette première génération de l’après-guerre, j’attends l’honnêteté et non l’hypocrisie. Union, faire des ponts, mais permettre que l’on puisse aller d’un côté à l’autre. C’est cela, la fraternité.
Paroles du pape après l’échange des cadeaux :
Vous, les fleurs de printemps de l’après-guerre, faites la paix, travaillez pour la paix, tous ensemble ! Tous ensemble ! Que ce pays soit un pays de paix ! « Mir Vama ! ». Souvenez-vous en bien !
Que le Seigneur vous bénisse. Et moi, de tout cœur, je vous bénis et je demande au Seigneur de vous bénir tous. Et, s’il vous plaît, priez pour moi !
Salutations finales du pape :
Bonsoir à tous ! « Mir Vama ! » : c’est cela, la tâche que je vous laisse. Faire la paix, tous ensemble !
Ces colombes sont un signe de paix, la paix qui vous apportera la joie. Et la paix se fait entre tous, entre tous : musulmans, juifs, orthodoxes, catholiques et les autres religions. Nous sommes tous frères ! Nous adorons tous un Dieu unique !
Jamais, jamais de séparation entre nous ! Fraternité et union.
Maintenant, je dois partir et je vous demande, s’il vous plaît, de prier pour moi. Que le Seigneur vous bénisse !
Mir Vama !
© Traduction de Zenit, Constance Roque