Le pape François consacre son tweet du 27 janvier 2015 au 70e anniversaire de la libération du camp nazi d’extermination d’Auschwitz par l’Armée Rouge, le 27 janvier 1945, et à la mémoire de la Shoah. Une invitation à la mémoire comme avertissement à construire un avenir aux antipodes de ce passé "effroyable".
Le pape évoque tout d’abord la souffrance indicible dont Auschwitz est devenu le symbole: “Auschwitz crie la douleur
d’une souffrance effroyable”.
Puis il indique le sens de la mémoire de cette tragédie du XXe siècle pour les siècles à venir, comme un avertissement pour l’humanité tout entière: en même temps que cette douleur dont elle invite à faire mémoire, la tragédie d’Auschwitz “réclame”, écrit le pape, “un avenir
de respect, de paix et de rencontre
entre les peuples".
Dans la mémoire de tous les peuples
Pour les papes en effet, la mémoire de la Shoah ne doit pas se réduire aux frontières de la communauté juive : c’est une responsabilité des baptisés, plus encore, de toute l’humanité, dont l’histoire est à jamais marquée par ce génocide sans pareil.
Mais la montée de l’antisémitisme, comme il est manifesté par le massacre de quatre otages juifs au magasin d’alimentation Hyper Cacher de la Porte de Vincennes, à Paris (France), le 9 janvier, constitue aujourd’hui une raison supplémentaire de se souvenir et de redire: “jamais plus”.
Le saint pape Jean-Paul II avait lui-même invité à cette mémoire comme un avertissement pour les peuples, en approuvant la publication du document de la Commission pour les rapports religieux avec le judaïsme: “Nous nous souvenons: réflexions sur la Shoah”, en 1998.
Message du saint pape Jean-Paul II
Dans un message adressé au cardinal Edward Idris Cassidy, alors président du dicastère romain, à propos de ce texte, Jean-Paul II écrit: “En de nombreuses occasions au cours de mon pontificat, j’ai rappelé avec un sentiment de profonde douleur les souffrances du peuple juif lors de la Seconde Guerre mondiale. Le crime connu sous le nom de la Shoah a laissé une marque indélébile dans l’histoire du siècle qui s’achève.”
Il rappelait la démarche de purification qu’il demandait à l’Eglise en vue du Jubilé de l’An 2000: “L’Eglise appelle ses fils à se placer humblement face au Seigneur et à examiner leur part de responsabilité dans les maux de notre temps.”
Voici ce qu’il attendait du document sur la mémoire de la Shoah: “Mon souhait fervent est que le document: Nous nous souvenons: une réflexion sur la Shoah (…), contribue véritablement à guérir les blessures provoquées par les incompréhensions et les injustices du passé. Puisse-t-il permettre à la mémoire de jouer le rôle qui lui revient dans l’édification d’un avenir où jamais plus l’indicible injustice de la Shoah ne sera possible. Puisse le Seigneur de l’histoire guider les efforts des catholiques et des juifs, ainsi que de tous les hommes et femmes de bonne volonté, dans leur œuvre commune en vue d’un monde véritablement respectueux de la vie et de la dignité de chaque être humain, car tous ont été créés à l’image et à la ressemblance de Dieu.”
Benoît XVI et la Shoah
Le pape Benoît XVI n’a pas seulement répété que l’on “ne peut pas être catholique et antisémite”. Lors de sa visite au mémorial de la Shoah de Yad Vashem, à Jérusalem, le 11 mai 2009, il a unit lui aussi le devoir de mémoire et la responsabilité du “jamais plus”: “Je suis venu pour rester en silence devant ce monument, érigé pour honorer la mémoire de millions de juifs tuées dans l’horrible tragédie de la Shoah. Elles ont perdu leurs vies mais elles ne perdront jamais leurs noms, car ils sont profondément gravés dans le cœur de ceux qui les aiment, de leurs compagnons de détention qui ont survécus et de tous ceux qui sont déterminés à ne plus jamais permettre qu’une telle atrocité déshonore à nouveau l’humanité. Plus que tout, leurs noms est à jamais inscrits dans la mémoire du Dieu Tout-puissant.”
La résolution de l’ONU
L’Onu a voulu que cette mémoire soit universelle: la mémoire de la Shoah, comme le disent les papes ne concerne pas seulement la communauté juive mais doit être portée par toute l’humanité.
Cette date du 27 janvier de chaque année a été choisie par l’ONU comme journée internationale de la mémoire des victimes de la Shoah. Le but de cette Journée internationale est éducative: elle doit servir à “élaborer des programmes éducatifs qui graveront dans l’esprit des générations futures les enseignements de l’Holocauste afin d’aider à prévenir les actes de génocide”. On estime que 6 millions de juifs d’Europe ont péri dans la mise en oeuvre de la “solution finale” (20 janvier 1942) par Hitler et son IIIe Reich.
Il y a 70 dix ans, le 27 janvier 1945, les troupes soviétiques libèrent le camp d'extermination d'Auschwitz-Birkenau, "l'usine de la mort". L'horreur est dévoilée quelque temps plus tard. Environ 1,1 million de victimes y ont été assassinées dont 1 million de juifs, parmi lesquels 69 000 Juifs de France.
Tortures, expériences pseudo-médicales criminelles, mauvais traitements constants, violence quotidienne, maladies, dénutrition, assassinat méthodique, dans les chambres à gaz, ou pour des nouveaux-nés, directement dans les fours crématoires, de tous ceux qui arrivaient dans les trains de la déportation. Le camp avait été créé dès 1941 par Heinrich Himmler.
Eduquer pour que “plus jamais”
Par la résolution 60/7 de l’ONU, intitulée « Mémoire de l’Holocauste » qu’elle a adoptée le 1er novembre 2005, l’Assemblée générale a décidé que les Nations Unies proclameraient tous les ans le 27 janvier la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste.
Dans cette même résolution, l’Assemblée a prié instamment les États Membres “d’élaborer des programmes éducatifs qui graveront dans l’esprit des générations futures les enseignements de l’Holocauste afin d’aider à prévenir les actes de génocide”.
L’Assemblée générale a également prié le Secrétaire général de “mettre en place un programme de communication sur le thème « l’Holocauste et les Nations Unies » ainsi que des mesures visant à pousser la société civile à se mobiliser pour perpétuer la mémoire de l’Holocauste et en faire connaître les réalités, afin d’aider à empêcher que ne se reproduisent des actes de génocide”.