Le pape exhorte les étudiants catholiques « à apporter l’Évangile dans l’université, et la culture dans l’Église » : « ayez toujours les yeux tournés vers l’avenir. Soyez un terreau fertile en chemin avec l’humanité, soyez le renouvellement dans la culture, dans la société et dans l’Église », ajoute-t-il.
Le pape François a fait parvenir un message aux jeunes de la Fédération universitaire catholique italienne (FUCI), à l’occasion du congrès pour la béatification du pape Paul VI, qui se tient actuellement à Arezzo, du 16 au 18 octobre 2014. Le pape Paul VI fut l’assistant général de la FUCI de 1925 à 1933.
Intitulé « En esprit et en vérité. Le témoignage de Giovanni Battita Montini dans l’université et la culture contemporaine », le congrès est organisé par la Fédération des universitaires catholiques italiens, en collaboration avec le diocèse d’Arezzo-Cortone-Sansepolcro.
Le pape François encourage les étudiants à « étudier en profondeur et avec constance, en restant toujours ouverts aux autres » : « ne vous contentez pas de vérités partielles ou d’illusions rassurantes, mais accueillez dans l’étude une compréhension toujours plus pleine de la réalité » qui n’appartient à personne, ajoute-t-il.
« Que la méthode de votre étude soit la recherche, le dialogue et la confrontation », poursuit le pape, affirmant que « la recherche rend possible la rencontre avec la foi, la raison et la science ».
Il propose aux étudiants « un objectif ambitieux » à poursuivre « avec la créativité des jeunes » : « réparer la fracture entre l’Évangile et le monde contemporain à travers le style de la médiation culturelle, qui, sans nier les différences culturelles, et même en les valorisant, se situe dans l’horizon d’une vision positive ».
Enfin, il leur demande « de rencontrer l’autre, de saisir l’ »odeur » des hommes d’aujourd’hui, au point de rester imprégnés de leurs joies et de leurs espérances, de leurs tristesses et de leurs angoisses » : « apportez l’espérance et ouvrez toujours votre travail aux autres, ouvrez-vous toujours au partage et au dialogue ».
A.K.
Message du pape François
Chers jeunes de la FUCI,
J’ai appris avec plaisir que votre Fédération s’apprête à tenir un congrès national extraordinaire à Arezzo pour redécouvrir la figure prophétique de mon vénéré prédécesseur, le pape Paul VI, qui fut votre assistant général de 1925 à 1933 et que j’aurai la joie de proclamer Bienheureux le 19 octobre 2014. J’adresse aux participants et à tous les associés mes affectueuses salutations et je désire vous assurer de ma proximité spirituelle en accompagnant les travaux que vous menez par trois mots qui peuvent vous aider dans votre engagement.
1. Le premier mot que je vous confie est « studium ». L’essentiel de la vie universitaire réside dans l’étude, dans l’effort et la patience de la pensée, qui révèle une tension de l’homme vers la vérité, le bien et le beau. Soyez conscients que vous recevez dans l’étude une chance féconde de connaître et de donner une voix à vos désirs conservés au plus profond de votre cœur, avec la possibilité de les faire mûrir.
Les études répondent à une vocation précise. C’est pourquoi la vie universitaire est un dynamisme orienté, caractérisé par la recherche et le partage fraternel. Profitez de ce temps propice et étudiez en profondeur et avec constance, en restant toujours ouverts aux autres. Ne vous contentez pas de vérités partielles ou d’illusions rassurantes, mais accueillez dans l’étude une compréhension toujours plus pleine de la réalité. Pour cela, il faut une écoute humble et un regard clairvoyant. Étudier ne consiste pas à s’approprier la réalité pour la manipuler, mais à la laisser nous parler et nous révéler quelque chose, très souvent aussi sur nous-mêmes ; et la réalité ne se laisse pas comprendre sans une disponibilité à affiner la perspective, à la regarder avec un regard neuf. Étudiez donc avec courage et espérance. C’est seulement de cette manière que l’université pourra devenir le lieu d’un discernement précis et attentif, un observatoire sur le monde et sur les questions qui interrogent l’homme au plus profond de lui-même. La persévérance dans le travail et la fidélité aux choses peuvent porter beaucoup de fruit. L’étude est la veille de la sentinelle. Voilà le véritable saut de qualité qui se fait dans l’université, qui fait mûrir en nous une personnalité unifiée et qui fait de nous des adultes dans la vie intellectuelle comme dans la vie spirituelle. L’étude devient un extraordinaire travail intérieur et surtout une expérience de la grâce : « prier comme si tout dépendait de Dieu, agir comme si tout dépendait de nous », disait saint Ignace de Loyola. Nous devons faire de notre mieux et nous rendre accueillants, réceptifs à une vérité qui n’est pas la nôtre, qui nous est toujours donnée avec une mesure de gratuité.
2 Le deuxième mot que je vous confie est « recherche ». Que la méthode de votre étude soit la recherche, le dialogue et la confrontation. Que la FUCI expérimente toujours la recherche humble, cette attitude d’accueil dans le silence de ce qui est ignoré, de l’inconnu, de l’autre et qu’elle démontre son ouverture et sa disponibilité à cheminer avec tous ceux qui sont poussés par une tension inquiète vers la vérité, croyants et non croyants, étrangers et exclus. La recherche s’interroge continuellement, devient rencontre avec le mystère et s’ouvre à la foi : la recherche rend possible la rencontre avec la foi, la raison et la science, permet un dialogue harmonieux entre elles, un échange fécond qui, dans la conscience et dans l’acceptation des limites de la compréhension humaine, permet une recherche scientifique conduite dans la liberté de la conscience. À travers cette méthode de recherche, il est possible d’atteindre un objectif ambitieux : réparer la fracture entre l’Évangile et le monde contemporain à travers le style de la médiation culturelle, une médiation itinérante qui, sans nier les différences culturelles, et même en les valorisant, se situe dans l’horizon d’une vision positive. Que la recherche vous enseigne à être capables de faire des projets et de vous investir, même si cela requiert des efforts et de la patience. C’est dans le long terme que l’on récolte les fruits de ce que l’on sème par la recherche.
Cette tâche est aujourd’hui confiée particulièrement aux jeunes étudiants universitaires parce qu’ils sont appelés à relever un défi culturel : la culture de notre temps a soif de l’annonce de l’Évangile, a besoin d’être ranimée par des témoignages forts et solides. Devant les risques de superficialité, de la hâte, du relativisme, on peut oublier l’engagement de la pensée et de la formation, de l’esprit critique et d’une présence qui a été confiée à l’homme, seulement à l’homme, et qui est inscrite dans sa dignité de personne. Rappelez-vous les paroles de Montini : « C’est l’idée qui guide l’homme, qui génère la force de l’homme. Un homme sans idée est un homme sans personnalité ». Sachez aborder le primat de la réalité par la force des idées que vous aurez recherchées. Relever ce défi avec la créativité des jeunes et le dévouement gratuit et libre des études universitaires, voilà votre tâche !
3 Le troisième mot est « frontière ». L’université est une frontière qui vous attend, une périphérie où accueillir avec attention les pauvretés existentielles de l’homme. La pauvreté dans les relations, dans la croissance humaine, tend à remplir les têtes sans créer de projet de société partagé, de but commun, de fraternité sincère. Ayez toujours soin de rencontrer l’autre, de saisir l’ « odeur
» des hommes d’aujourd’hui, au point de rester imprégnés de leurs joies et de leurs espérances, de leurs tristesses et de leurs angoisses. Ne mettez jamais de barrière qui, en voulant défendre la frontière, entravent la rencontre avec le Seigneur. Dans les études et dans les formes de communication numérique, vos amis font parfois l’expérience de la solitude, d’un manque d’espérance et de confiance dans leurs capacités : apportez l’espérance et ouvrez toujours votre travail aux autres, ouvrez-vous toujours au partage et au dialogue. Dans la culture, surtout aujourd’hui, nous avons besoin de nous mettre aux côtés des autres. Vous ne pourrez dépasser l’affrontement entre les peuples que si vous réussissez à alimenter une culture de la rencontre et de la fraternité. Je vous exhorte à continuer à apporter l’Évangile dans l’université, et la culture dans l’Église !
Cette tâche vous est particulièrement confiée, à vous qui êtes jeunes : ayez toujours les yeux tournés vers l’avenir. Soyez un terreau fertile en chemin avec l’humanité, soyez le renouvellement dans la culture, dans la société et dans l’Église. Cela demande du courage, de l’humilité et une écoute pour que ce renouveau s’exprime. Je vous confie au bienheureux Paul VI qui, dans la communion des saints, vous encourage sur ce chemin. Je vous demande de prier pour moi, et je vous bénis de tout cœur, ainsi que vos assistants, vos familles et vos amis.
Traduction de Zenit, Constance Roques