Selon le cardinal Nichols, la pastorale du mariage et de la famille doit être caractérisée par les mots ‘intelligente’, ‘courageuse’ et ‘pleine d’amour’.
Le cardinal Vincent Nichols, archevêque de Westminster, 68 ans, est l’un des 19 cardinaux créés par le pape François le 22 février 2014. Il est aussi le président de la Conférence épiscopale d’Angleterre et du Pays de Galles.
Dans cette première partie d’entretien, il explique aux lecteurs de Zenit son nouveau rôle, et l’esprit des prochains synodes des évêques sur la famille.
Zenit – En quoi votre nomination parmi le Collège des cardinaux va-t-elle changer votre travail d’archevêque ?
Card. Vincent Nichols – Il va justement falloir que je le trouve, je n’en suis pas encore très sûr. Il est clairement plus facile d’attirer l’attention dans les médias, c’est la première chose que j’ai apprise. Bien sûr, davantage de responsabilités m’attendent ici à Rome. Je suis membre de la Congrégation pour les évêques qui se rassemble ici assez régulièrement et je viens d’être nommé à la Congrégation pour les Églises orientales. Je ne sais pas très bien ce que cela représente. Et ensuite, troisième point, je suppose qu’il y a probablement des attentes particulières autour de l’Angleterre et du Pays de Galles ; nous allons voir.
Il y a un certain nombre de vacances de sièges épiscopaux en Angleterre et au Pays de Galles. Avez-vous l’intention de jouer un rôle clé pour aider à remplir ces postes ?
Je suis allé à une réunion de la Congrégation pour les évêques et c’est une grande réunion… une seule personne ne peut ‘l’influencer’. Personnellement, j’ai été très impressionné par la manière de procéder, lors de cette première réunion. Je jouerai donc mon rôle et bien sûr, j’ai des choses en tête, mais c’est une Congrégation pour l’Église à travers le monde et chacun doit attendre son tour.
En tant que cardinal, est-ce que vos plans et vos priorités vont changer ?
Je ne pense pas. Ces deux dernières années, je me suis de plus en plus centré sur trois points : le service des pauvres, parce que le pape François comme le pape Benoît indiquent clairement cette priorité. Le pape Benoît disait que notre service rendu aux pauvres était ce qui donnait sa crédibilité à l’Évangile. C’est une déclaration forte. C’est donc une priorité très réelle et, dans le diocèse, nous développons un cadre général de Caritas pour aider les paroissiens à se centrer sur cette question et à apporter leurs ressources à ce service des pauvres.
La seconde chose est liée au fait d’être à Londres. Je veux continuer mon engagement avec la communauté du monde des affaires… Avec la pauvreté, il faut être engagé auprès du monde des affaires et, dans l’ensemble, j’ai reçu un accueil vraiment positif, en particulier de la part de chefs d’entreprises qui savent, jusqu’à un certain point, qu’ils ont été confrontés à une crise de confiance et qui sont prêts à reconsidérer leur véritable but et à reconnaître qu’une entreprise dont le but est clair est une meilleure entreprise. Nous avons un projet qui s’appelle « Blueprint for a Better Business » (« Plan détaillé pour une meilleure entreprise »).
La troisième priorité pour moi est la vie paroissiale. C’est le lieu où la plupart des gens expérimentent et vivent leur foi, et où elle s’enrichit. Cela nécessite évidemment le soutien et la préparation de prêtres ainsi que l’encouragement de paroisses qui regardent devant, qui regardent quels sont leurs défis et qui essaient d’y répondre du mieux qu’elles peuvent. Par exemple, le thème des deux prochains synodes sur la famille et le mariage : c’est une priorité pour toutes les paroisses et je pense que ce temps va être l’occasion d’un bon examen de conscience pour voir comment nous nous y prenons dans nos paroisses sur ces questions pastorales.
Quand vous parlez des pauvres, est-ce que vous pensez aussi aux enfants non-nés, aux personnes vulnérables, et pas uniquement à ceux qui sont matériellement pauvres ?
Dans le document [du pape François], « La joie de l’Évangile », il est très étonnant de voir que le pape dit, en fait, que la forme la plus tragique de pauvreté est la pauvreté spirituelle – pauvreté d’un mode de vie où la dimension spirituelle n’est plus un enrichissement et un but quand on se lève le matin. Si c’est évincé, ce qui reste est une forme de vie humaine plutôt desséchée. Il y a donc cette pauvreté, et ensuite il y a ceux qui sont les plus vulnérables, comme vous le dites, les enfants non-nés, et les personnes très âgées. Nous sommes constamment, en particulier en tant que conférence épiscopale, en train de nous battre sur le front de l’euthanasie et sur celui de l’avortement.
Pensez-vous qu’il y aura des changements sur l’administration des sacrements aux catholiques divorcés et remariés, en lien avec les deux synodes sur la famille à venir ?
Ce qui est clair dans l’esprit du pape, c’est qu’il veut que nous nous engagions dans une sorte de processus de deux années pour réfléchir sur la réalité du mariage, sur un enseignement renouvelé sur le mariage et la famille et une pastorale renouvelée caractérisée, selon ses propres termes, par les mots ‘intelligente’, ‘courageuse’ et ‘pleine d’amour’. Je pense que c’est là l’agenda, si vous voulez, qu’il a donné. Je ne crois pas un instant que les enseignements fondamentaux de l’Église catholique vont changer. Je crois que nous allons regarder – et il y en a eu des signes dans certaines conversations au cours des deux journées qui ont ouvert le consistoire – la nécessité d’être plus sensibles aux circonstances culturelles et sociales dans lesquelles les personnes ont choisi le mariage, et donc dans quelle mesure ils sont pleinement et suffisamment conscients du consentement qu’ils donnent. Je pense, par exemple, qu’il est vrai que de nombreuses personnes se marient dans l’espoir que cela va durer, mais pas nécessairement en s’engageant pour son caractère indissoluble. C’est le genre de situations qui a toutes sortes d’implications. Il y a des implications dans la préparation au mariage, il y a des implications dans le soutien apporté à la famille et à la vie de couple marié, il y a des implications dans les pratiques de la justice de l’Église : les personnes ont droit à ce qu’on considère la validité de leur mariage et qu’on cherche la vérité.
Traduction d’Hélène Ginabat
(A suivre demain, 11 mars)