Des représentants des principales religions appellent à un « pacte commun » des religions, des cultures et de la diplomatie pour mettre fin à la violence : « la paix dans le monde est impossible sans paix entre les religions », souligne le cardinal Kasper.
Le président de la communauté de Sant‘Egidio, Marco Impagliazzo et Jerry White, diplomate du Département d’Etat américain, leader reconnu de la campagne internationale contre les mines anti personnel et Prix Nobel de la paix en 1997, ont lancé ce pacte au cours du congrès international « les religions et la violence » qui a eu lieu le 19 février à Rome.
Organisé par la Communauté de Sant ‘Egidio, avec la présence de personnalités religieuses, du monde politique et diplomatique, d’Europe, d’Asie, d’Afrique et du Moyen Orient, le congrès a vu entre autres la participation du cardinal Walter Kasper, président émérite du Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens et du Grand Rabbin de Rome Riccardo Di Segni.
Marco Impagliazzo a fait observer que « pour atteindre l’objectif de la paix aujourd’hui, la diplomatie traditionnelle a besoin de nouveaux outils qui touchent toutes les dimensions de la vie : la religion en premier lieu, puis la politique, la culture, la lutte contre le sous-développement. Toute la société civile doit s’employer à dépasser les vieilles méfiances, quand bien même s’agirait-il de véritables conflits, à l’origine des explosions de violence et de terrorisme qui ont ensanglanté le monde au début du troisième millénaire ».
Pour Jerry White, « la diplomatie traditionnelle a découvert comment les religions peuvent contribuer à la construction d’un ‘écosystème’ de paix, en injectant le virus de la paix dans un monde tombé dans ‘une épidémie de violence’ ».
Les participants ont constaté que « la violence religieuse a augmenté de manière incroyable ces dernières années ». « Les membres de toutes les religions, y compris les chrétiens, individus ou groupes qui prétendent agir au nom d’une religion, ont été ou sont des fauteurs de violence », a dénoncé le cardinal Kasper.
Or « la paix dans le monde est impossible sans paix entre les religions » appelées à « briser le cercle vicieux de la violence qui engendre la violence », a-t-il ajouté.
Le Grand Rabbin Di Segni a évoqué le massacre des Tour Jumelles, le 11 septembre 2001, image d’une « violence teintée de religiosité ». Andrea Riccardi, fondateur de Sant ‘Egidio, a répondu qu’« aucune religion n’était condamnée à la violence par elle-même. Toutes les religions sont interpellées par la violence, sont tentées par cette violence, sont parfois écrasées par elle », mais aussi « lui résistent et guérissent l’humanité de son emprise ».
Il a appelé les religieux et les religions à « prendre leurs responsabilités », car « la religion est quasiment l’unique système de motivations idéales et idéologiques à avoir une portée transnationale dans le monde globalisé d’aujourd’hui ».
Le rejet de la violence, a ajouté Andrea Riccardi, ne veut pas dire se résigner à ce qui existe déjà. Il a donné l’exemple de la « force de paix » du christianisme européen de la seconde moitié du XXème siècle quand Jean Paul II lança « l’esprit d’Assise », avec « cette rencontre entre les religions non plus les unes contre les autres, mais les unes à côté des autres » en 1986.
Selon Abdelfattah Mourou, vice-président du mouvement Ennahda en Tunisie, et Muhammad Khalid Masud, membre de la Cour suprême au Pakistan, la violence « a précédé la religion », allant parfois jusqu’à s’en servir; il revient donc aux religions de retrouver leur autonomie.
L’intellectuel libanais Samir Frangié, ancien député au parlement de Beyrouth, a déclaré quant à lui que « les religions, en dépit de leurs diversités, ont une mission commune : faire comprendre aux hommes qu’ils sont condamnés à coopérer ensemble pour survivre, et que la relation des uns avec les autres n’est pas une option à choisir ou refuser mais une nécessité à reconnaître ».
L’archevêque syro orthodoxe Dionisius Kawak a lancé un appel pressant pour la Syrie, afin que tous les efforts soit faits pour « arrêter la violence et les conflits et mettre fin au chaos, de manière à éviter la défaite de tous les syriens ».
Enfin, l’évêque anglican de Jos, au Nigéria, Benjamin Kwashi, a témoigné du rôle du dialogue interreligieux, non seulement au niveau des hauts représentants de l’Eglise mais aussi du peuple et des différentes articulations de la société, dans la résolution de situations de violence dramatique comme celle qui afflige son pays.
Traduction d’Océane Le Gall