Le cardinal Bertone salue « la grandeur de la personnalité de Benoît XVI » : « On se souviendra de lui comme d’un grand pape, y compris pour ses initiatives de réforme, sa capacité à communiquer la joie et sa sainteté personnelle, teintée de tendresse et d’humilité ».
Un an après l’annonce de la renonciation de Benoît XVI au ministère pétrinien (11 février 2013), le cardinal Tarcisio Bertone, son ancien secrétaire d’État, évoque cet événement dans le quotidien italien « Il giornale ».
Selon le cardinal, à qui Benoît XVI en avait parlé mi-2012, le pape « avait mûri sa décision depuis longtemps » : « Il sentait le poids de l’âge, d’autant plus que, pour gouverner la barque de Pierre et faire face aux défis de l’Église de notre temps, la vigueur du corps comme celle de l’âme était nécessaire, ainsi qu’il l’a dit lui-même ».
« Il pensait à la Journée mondiale de la jeunesse, au Brésil, et disait : ‘Je ne me sens pas la force de faire ce voyage à mon âge’. Il aurait voulu l’annoncer avant Noël mais je lui ai dit : ‘vous devez publier votre ouvrage sur l’enfance de Jésus, n’entravons pas ce cadeau que vous faites à l’Église’. Il y avait aussi le chantier de l’encyclique sur la foi et l’Année de la foi, qui venait à peine de commencer ; je cherchais à insister pour qu’il repousse… Mais lui, après un nouveau temps de réflexion et de prière, a pris la décision d’en faire l’annonce en la fête de Notre Dame de Lourdes. »
Pour le cardinal Bertone, « cette décision a une grande valeur historique et a manifesté la foi de l’Église » : il salue « la grandeur de la personnalité de Benoît XVI et de son geste. On se souviendra de lui comme d’un grand pape, y compris pour ses initiatives de réforme, sa capacité à communiquer la joie et sa sainteté personnelle, teintée de tendresse et d’humilité ».
« Nos relations ont toujours été empreintes d’estime et de confiance mutuelles. Je me souviens de nos rencontres, même en dehors des audiences formelles, de nos conversations, parfois à sa table, de ses annotations. Cette année encore, je l’ai rencontré à plusieurs reprises, je l’ai eu au téléphone. Il est extrêmement lucide intellectuellement et il a une mémoire extraordinaire », confie le cardinal.
D’ailleurs, fait-il observer, « le pape François lui est très lié, comme à un sage conseiller. Il l’aime beaucoup, ce qui est un exemple pour tous. Il y a une continuité fondamentale entre ces deux papes. Leurs caractères sont différents, de même que leurs origines et leurs expériences pastorales, mais c’est cela qui est beau ! Le Seigneur est vraiment surprenant dans la façon dont il choisit ses vicaires, original ».
Le cardinal fait observer que « la réforme de la Curie est un nœud qui traverse l’histoire de l’Église depuis des siècles : souvenons-nous de celle qu’a voulue Paul VI, puis Jean-Paul II. Tous deux ont dialogué intensément avec les sujets intéressés et avec les conférences épiscopales du monde entier ».
Benoît XVI aussi « était bien conscient de la multiplicité des organismes de la Curie et de la nécessité d’une coordination et d’un allègement. Il avait bien présent à l’esprit le problème et il était convaincu de la nécessité de l’affronter. Toutefois, sa réforme a beaucoup visé la conversion du cœur des personnes et s’est centrée sur les questions urgentes et difficiles comme le besoin de doter l’Église d’une législation contre la pédophilie, contre le blanchiment d’argent et pour la lutte contre le terrorisme », précise son ancien Secrétaire d’Etat.
Evoquant le « scandale de l’Institut pour les œuvres de religion (IOR) », le cardinal déplore les « exagérations » : « Dans les dernières décennies, il y a eu des comportements déplorables qui ont jeté une ombre sur l’Ior, mais ces dernières années, un parcours de bonne administration et de vérification efficace des clients a été entamé, selon les lois contre le blanchiment ».
Le cardinal rend hommage à l’approche pastorale du pape François : « L’Église, notre mère, vient à la rencontre des difficultés que connaissent les jeunes, les familles et la société entière, avec miséricorde mais avec clarté. »
Traduction d’Hélène Ginabat