Le patriarche maronite Boutros Béchara Raï en appelle à la France pour que la raison et la paix l’emportent au Moyen-Orient, au moment où « les Chrétiens d’Orient se sentent de plus en plus délaissés ».
Le patriarche a célébré une messe pour la France, lundi dernier, 1er avril, lundi de Pâques indique le site du patriarcat. Il
L’ambassadeur de France, M. Patrice Paoli, a ensuite remercié le patriarche lors du déjeuner qui a suivi à l’ambassade de France.
Dans son discours, l’ambassadeur de France a dit notamment: « Je sais combien est aimé notre pays que vous visiterez bientôt. Et dans ce contexte, je vous dis que notre président et le ministre des Affaires étrangères seront très content de vous recevoir ».
Dans son allocution, après avoir évoqué les rapports séculaires de l’Eglise maronite et de la France, le cardinal Béchara Raï a évoqué les points de préoccupation pour le Liban: la question du fondamentalisme islamique qui menace des musulmans modérés, et la question syrienne, et notamment les besoins des réfugiés.
L’Orient-le Jour annonce pour sa part que le patriarche maronite, sera reçu à Paris lundi prochain, 8 avril, par le président de la République française, M. François Hollande.
A l’ordre du jour : la situation au Moyen-Orient, les chrétiens de Syrie, la politique libanaise.
Le cardinal maronite partira ensuite, indique la même source, pour l’Amérique latine (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay, Costa Rica, Colombie, Venezuela).
Il s’arrêtera à Rome, sur le chemin du retour vers Beyrouth. Son prochain voyage aura pour destination la Pologne.
Allocution du patriarche cardinal Béchara Boutros Raï
Monsieur l’Ambassadeur,
Vos Excellences les Evêques, chers frères et sœurs
1. Nous venons de célébrer l’Eucharistie aux intentions du peuple français et de la France, suivant ainsi une vénérable tradition cultivée par les Patriarches mes prédécesseurs. Je voudrais exprimer ici nos vœux de prospérité et de paix à la France et aux Français.
Cette aimable tradition est enracinée dans la multiséculaire histoire de collaboration et d’amitié entre la France et les Maronites, illustrée par des documents diplomatiques. J’en nomme la Charte de Saint Louis IX, Roi de France du 24 mai 1250, et la lettre de Clémenceau, Président du Conseil en date du 10 novembre 1919, adressée toutes les deux au Patriarche Maronite.
2. Le Saint Roi affirmait : « En vérité, notre amitié sincère que nous avons commencé à ressentir envers la Nation Maronite, lors de notre relâche à Chypre, où ils sont établis, s’est redoublée aujourd’hui davantage, et nous sommes persuadés que cette Nation, que nous trouvons établie sous le nom de St Maron, est une partie de la Nation Française ; car son amitié pour les Français ressemble à l’amitié que les Français se portent entre eux ».
3. Le Président du Conseil Français, Clémenceau, qui négociait le Traité de Versailles en 1919, écrivait au Patriarche Elias Hoyek qui présidait la Délégation Libanaise au Congrès de Paix, en ces termes : « Les entretiens que, depuis votre arrivée à Paris, vous avez eus avec M. le Ministre des Affaires Etrangères et avec moi-même, vous auront confirmé dans la conviction que le Gouvernement de la République demeurait invariablement attaché aux traditions de mutuel dévouement établies depuis des siècles entre la France et le Liban.
<p>« Le désir des Libanais de conserver un gouvernement autonome et un statut national indépendant s’accorde parfaitement avec les traditions libérales de la France. Avec le soutien et l’aide de la France, les Libanais sont assurés de conserver leurs traditions, de développer leurs institutions politiques et administratives, de hâter eux-mêmes la mise en valeur complète de leur pays, de voir enfin leurs enfants se préparer dans leurs propres écoles aux fonctions publiques du Liban ».
4. Le premier document parle de la Nation Maronite, le second parle du Liban. Le dénominateur commun est le Patriarcat Maronite. Cela veut dire que les Maronites et le Liban sont devenus deux synonymes. Qui dit Maronites dit Liban. C’est pourquoi, l’on dit que « les Maronites sont pour le Liban » et non « le Liban pour les Maronites ».
L’amitié franco-maronite est par le fait même franco-libanaise. Toute collaboration entre la France et les Maronites est toujours en faveur du Liban. Elle nous incite à promouvoir les causes communes :
a) Favoriser la convivialité islamo-chrétienne, la connivence entre les cultures, les libertés individuelles et collectives, le pluralisme qui est source de richesse, et ne semble pas unanimement partagé. Les valeurs qui traduisent la démocratie sont œuvres des chrétiens et s’avèrent une nécessité, pour les pays du Moyen-Orient. La montée du fondamentalisme islamique menace les musulmans, qui sont modérés dans leur majorité, de passer au fondamentalisme, si les chrétiens perdent leur présence effective et leur influence bénéfique sur les sociétés arabes.
b) Appuyer auprès des instances internationales la reconnaissance et l’instauration de la neutralité juridique, positive et effective du Liban, qui lui permet d’être un lieu de rencontre et de dialogue des cultures et des religions, et d’être promoteur de paix, de justice et d’entente entre les peuples dans sa région.
c) Œuvrer pour mettre fin à la violence et à la guerre en Syrie, et inviter les partis en conflit à la table de négociations, en vue d’une solution juste, équitable et durable. Le Liban subit les lourdes conséquences de la guerre en Syrie, sur les plans : politique, économique, sécuritaire et social. Le nombre des déplacés et refugiés syriens avec tous leurs problèmes sur le territoire libanais s’approche à un million. Il faut absolument les faire distribuer aux pays voisins de la Syrie selon la capacité de chacun, et solliciter de l’Union Européenne les aides financières et matérielles pour eux.
Sur ce, je lève Monsieur l’Ambassadeur mon verre à l’action bienfaisante et rayonnante de la France, au Liban, au Moyen Orient et partout dans le Monde.
Vive la France ! Vive le Liban ! Et vive à jamais l’amitié franco-libanaise