ROME, mardi 17 avril 2012 (ZENIT.org) – « L’amour du Seigneur réunit ce qui est divisé », affirme Benoît XVI dans un message envoyé à l’évêque de Trèves, en Allemagne, Mgr Stephan Ackermann, pour l’ouverture du pèlerinage dédié à la « Sainte Tunique » à l’occasion du 500e anniversaire de sa première exposition publique.
Le message a été lu par l’envoyé du pape, le cardinal Marc Ouellet, préfet de la Congrégation pour les évêques, lors de la célébration d’ouverture, vendredi dernier, 13 avril, en la cathédrale de Trèves.
Voici notre traduction intégrale de ce message :
A mon révérend frère,
Stephan Ackermann,
évêque de Trèves
L’ostension de la Sainte Tunique a lieu ces jours-ci, en la grande cathédrale de Trèves, 500 ans exactement après sa première ostension publique par l’archevêque Richard von Greiffenklau, selon le désir de l’empereur Maximilien Ier, par l’ouverture de l’autel majeur. Pour cette occasion spéciale, je me fais moi aussi, en pensée, pèlerin dans l’antique et vénérable ville épiscopale de Trèves, pour me joindre, en quelque sorte, à la foule des fidèles qui participeront, ces prochaines semaines, au pèlerinage auprès de la Sainte Tunique. Je désire vous assurer de la proximité fraternelle du Successeur de Pierre, vous, Excellence, mes confrères dans le ministère épiscopal, présents là-bas, les prêtres et les diacres, les religieux et religieuses et tous ceux qui se sont réunis dans la cathédrale de Trèves pour l’ouverture du pèlerinage.
Depuis la première exposition de 1512, la Sainte Tunique attire les fidèles car cette relique rend présent un des moments les plus dramatique de la vie terrestre de Jésus : sa mort sur la croix. Dans ce contexte, la division des vêtements du Crucifié entre les soldats pourrait sembler un simple épisode marginal, auquel les évangiles synoptiques font seulement allusion. L’Evangéliste Jean développe toutefois cet évènement avec une certaine solennité. Il est le seul à attirer l’attention sur la tunique qui «était une tunique sans couture, tissée tout d’une pièce de haut en bas» (Jn 19, 23). Il rend l’évènement intelligible pour nous et il nous aide, grâce à cette relique, à regarder avec foi le Mystère du salut.
La tunique, nous dit Jean, est tissée tout d’une pièce. Les soldats qui, selon l’usage romain, se partagent comme un butin les pauvres biens du crucifié, ne veulent pas déchirer la tunique. Ils la tirent au sort afin qu’elle reste entière. Les Pères de l’Eglise voient dans ce passage l’unité de l’Eglise; elle est fondée comme communauté d’amour du Christ, unique et indivise. La Sainte Tunique entend nous rendre visible tout cela. L’amour du Sauveur réunit ce qui est divisé. L’Eglise est une dans sa multitude. Le Christ n’abolit pas la pluralité des hommes, mais il les réunit dans un être les uns pour les autres typique des chrétiens, pour devenir, de différentes façons, des médiateurs les uns pour les autres, vers Dieu.
La Tunique du Christ, «tissée tout d’une pièce de haut en bas» (Jn 19, 23) est aussi une image de l’Eglise qui ne vit pas par elle-même, mais par Dieu. En tant que communauté unique et indivise, elle est l’œuvre de Dieu et non le produit des hommes et de leurs capacités. La Sainte Tunique veut être en même temps être pour ainsi dire un avertissement pour l’Eglise, pour qu’elle demeure fidèle à ses origines, devienne consciente que son unité, son consentement, son efficacité, son témoignage ne peuvent être, au fond, que créés d’en-haut, ne peuvent être donnés que par Dieu. Ce n’est que lorsque Pierre a confessé : «Tu es le Christ» (cf. Mt 16, 16), qu’il a reçu le pouvoir de lier et de délier, donc de servir l’unité de l’Eglise.
Et enfin, la Sainte Tunique n’est pas une toge ou un vêtement élégant exprimant un rôle social. C’est un élément modeste du vêtement qui sert à couvrir et à protéger celui qui le porte, en protégeant son intimité. Ce vêtement est le don indivis, sanctifié par son sang, fait par le Crucifié à l’Eglise. C’est pourquoi cette Sainte Tunique rappelle la dignité de l’Eglise. Combien de fois cependant voyons-nous que nous portons le trésor que le Seigneur a confié à son Eglise dans des vases fragiles (cf. 2 Co 4, 7), et comment, à cause de notre égoïsme, de nos faiblesses et de nos erreurs, l’intégrité du Corps du Christ est blessée. On a besoin d’une disposition permanente à la conversion et à l’humilité pour suivre le Seigneur, avec amour et vérité. En même temps, la dignité et l’intégrité particulières de l’Eglise ne sauraient être exposées ni livrée au vacarme d’un jugement sommaire de l’opinion publique.
Le pèlerinage jubilaire a pour thème cette prière du Seigneur : « Ramène à l’unité ce qui est divisé ». Nous ne voulons pas rester isolés. Nous voulons demander au Seigneur de nous guider sur la voie commune de la foi, et de raviver en nous ses contenus. Ainsi, la croissance ensemble des chrétiens dans la foi, dans la prière et dans le témoignage, nous pourrons aussi reconnaître, au milieu des épreuves de notre temps, la magnificence et la bonté du Seigneur. C’est pourquoi j’accorde de tout cœur la bénédiction apostolique à vous et à tous ceux qui, durant ces semaines de fête, se rendent en pèlerinage auprès de la Sainte Tunique à Trèves.
Du Vatican, Vendredi Saint, 6 avril 2012.
© Libreria Editrice Vaticana – 2012
Traduction de Zenit, Anne Kurian