Etats Unis: Le futur cardinal O'Brien défend la liberté religieuse

L’ancien archevêque de Baltimore en visite ad limina

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ROME, mardi 24 janvier 2012 (ZENIT.org) – Les chrétiens doivent rester vigilants face aux mouvements qui portent atteinte à la liberté religieuse : c’est la recommandation que le futur cardinal Edwin O’Brien a faite en commentant pour ZENIT le discours que Benoît XVI a adressé, jeudi 19 janvier, aux évêques américains lors de leur visite ‘ad limina’.

Archevêque de Baltimore depuis 2007 jusqu’à l’an dernier, le cardinal O’Brien est maintenant pro-grand Maître de l’Ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem. Il a aussi été, pendant dix ans, archevêque de l’ordinariat militaire des Etats-Unis.

Le 6 janvier dernier, Benoît XVI a annoncé que l’archevêque, âgé de 72 ans, serait « créé » cardinal lors du consistoire du 18 février.

Zenit – Quelles impressions vous ont laissées cette visite ad limina, en particulier à la lumière du prochain consistoire au cours duquel vous serez créé cardinal ?

Cardinal O’Brien – Eh bien, je ne vois pas tellement de rapport, mais j’ai certainement un surcroît d’intérêt pour les affaires romaines, puisque je vais bientôt vivre ici, dès que mon successeur sera installé – ce que j’espère très bientôt – mais nous n’en avons pas encore parlé. Je vais venir vivre ici à Rome de manière permanente, et les visites que nous avons eues dans ces dicastères m’ont donné une bonne compréhension, une perspective et une sorte d’impatience de ce qui m’attend ici.

Dans son discours aux évêques, le Saint-Père a parlé de la question de la liberté religieuse. A travers le monde, les chrétiens sont confrontés à des persécutions, que ce soit à cause de la sécularisation de l’Occident ou en raison de violentes persécutions dans d’autres lieux. Quelle signification cela a-t-il pour vous d’être créé cardinal à ce moment précis de l’histoire de l’Eglise ?

Mis à part le fait d’être créé cardinal, je pense qu’aux Etats-Unis, nous nous sommes toujours sentis concernés par la persécution et l’intolérance qui existent dans le monde. Je ne pense pas que nous ayons jamais imaginé que cela arriverait dans notre propre pays comme cela arrive aujourd’hui, où le gouvernement fait obstacle à l’excellent travail que nous essayons d’accomplir, pour nous imposer des valeurs qui sont étrangères à notre héritage judéo-chrétien.
Le point culminant de cette visite ad limina fut la rencontre avec le Saint-Père. Je crois qu’aucun de nous ne s’attendait à entendre un aussi beau discours que celui d’hier. Il avait tout à fait raison, il a fait les distinctions nécessaires et cela s’applique parfaitement à notre pays. J’espère que nous serons capables d’en faire le meilleur usage pour aider nos compatriotes à réaliser que, lentement mais sûrement, « Big Brother » est en train de contraindre des communautés religieuses comme la nôtre, ainsi que le bon travail que nous tentons de faire.

Pourriez-vous expliquer davantage ce problème du gouvernement qui cherche à restreindre la liberté religieuse, dans les domaines de l’avortement et du mariage entre personnes du même sexe. A Baltimore, par exemple, il y a eu le cas du maire qui s’est prononcé en faveur du mariage entre personnes du même sexe.

A Baltimore, il y a deux ans, nous avons fait l’objet d’une obligation inouïe, que nous n’aurions jamais pu imaginer : nos centres de consultation pour les femmes enceintes ont reçu l’ordre légal, adopté par le conseil municipal, d’afficher la mention suivante : « Nous n’offrons pas de service de contrôle de naissance ou d’avortement ». Pourquoi avons-nous dû faire cela ? C’était une décision totalement arbitraire de leur part, et une tentative pour nous faire disparaître, au profit du planning familial. Jusqu’ici, les jugements nous ont toujours donné gain de cause sur cette question. [Par ailleurs], si nous suivons d’autres états qui ont déjà légiféré sur le mariage entre personnes du même sexe, le prochain pas sera de nous obliger à l’enseigner dans toutes nos écoles ; de même, nous devrons en accepter le principe dans toutes nos institutions, et la réalité dans nos communautés et partout où elles œuvrent. La prochaine étape sera comme dans les pays européens : si vous parlez publiquement du caractère immoral du mariage entre personnes du même sexe, vous vous exposez à des poursuites. C’est une pente glissante, et c’est ce qui va certainement arriver.
Le point de départ, c’est qu’on compare cela à la discrimination de race, de couleur – c’est-à-dire la pigmentation, ça c’est de la discrimination. Mais nous parlons de l’institution de base, fondamentale, du mariage depuis les origines, à partir des Ecritures et qui, dans les nations civilisées, a toujours été réalisée entre un homme et une femme ouverts à l’accueil des enfants. Lorsque nous voulons changer cela par sympathie ou en suivant nos émotions, c’est une initiative immensément dangereuse, et cela met notre avenir en danger.

En tant que pro-grand Maître de l’Ordre équestre des Chevaliers du Saint-Sépulcre de Jérusalem, pourriez-vous nous parler des conflits qui se déroulent en Terre Sainte, et nous dire comment l’Eglise de Rome peut être présente auprès des chrétiens qui vivent là-bas ?

Ma responsabilité sera de soutenir les institutions chrétiennes qui sont en Terre-Sainte, avant tout – mais pas exclusivement – dans leurs relations avec le patriarche de Jérusalem. Et d’encourager les membres de l’ordre à s’intéresser à ce qui se passe là-bas : [par exemple] la diminution du nombre des chrétiens, et tous les engagements que nous avons dans les écoles et les hôpitaux, les séminaires, les engagements que nous avons pris pour soutenir ces institutions chrétiennes, et aussi les nombreuses institutions catholiques et les personnes qui vivent là-bas. [Etant donné que] très peu de personnes vivent là-bas, l’aide ne peut venir que de l’extérieur. Ce sera mon objectif principal : éduquer, encourager les membres de l’ordre à s’y intéresser davantage – pas seulement par des dons ou par leur participation aux activités de l’ordre, mais certainement aussi en y allant en pèlerinage.
L’accent principal est mis sur la sainteté personnelle de chacun des membres de l’ordre. Si nous y parvenons – et si nous gardons cela à l’esprit pendant l’Année de la foi – et si nous travaillons pour la nouvelle évangélisation avec les différentes représentations et avec les membres de notre ordre, je pense que le reste se mettra en place. Notre attention envers les institutions de la Terre Sainte et envers leur patriarche, et l’aide que nous leur apporterons, suivront assez rapidement. Nous faisons déjà beaucoup, mais si nous regardons l’ensemble de l’Eglise, cette nouvelle évangélisation nous rappelle que nous ne sommes jamais là où nous devrions être. Il y a toujours plus que ce que nous pouvons faire, et nous ne devrions jamais compter sans la grâce. Et la grâce est donnée, et je pense qu’il y aura beaucoup de grâces pendant cette Année de la foi.

Vous avez été archevêque de l’ordinariat militaire. Quelle est la situation de l’aumônerie militaire, et comment cette nouvelle évangélisation peut elle être apportée dans l’armée ?

J’ai été, de 1997 à 2007, archevêque de l’ordinariat militaire qui compte 1,5 millions de catholiques dans les forces armées des Etats-Unis avec leurs familles, et les hôpitaux de vétérans qui sont plus de 170. L’archevêque aux armées, Mgr Broglio, est actuellement l’ordinaire militaire et il fait un travail magnifique. La plus grande difficulté est d’apporter la foi à nos hommes et femmes des forces armées, qui sont courageux et généreux, et à leurs familles. Et sans prêtres, nous ne pouvons pas le f
aire correctement. Il nous faudrait plus de 800 prêtres pour servir dans toutes les branches, et nous sommes bien en dessous des 300 aujourd’hui. Et cela diminue encore.
Il y a des signes de vocations encourageants : Mgr Broglio a fait un travail magnifique et je pense qu’il y a plus de 30 séminaristes qui étudient actuellement. Ils appartiendront aux différents diocèses du pays, mais au bout de trois années d’ordination, ils rejoindront l’armée. C’est un premier pas en avant, un pas immense. Et j’espère que c’est le fruit des expériences que certains de nos hommes ont eues au combat, dans les forces armées, leur sens de la générosité, du sacrifice, de la discipline ; il y a de nombreux signes que des vocations se lèvent ; ce sont les conséquences de la réalité, – manifeste – du péché, de l’épreuve et de la souffrance, et c’est important que l’Eglise réponde à ces besoins. Je pense que c’est à cette question que nos jeunes vont répondre lorsqu’ils s’interrogeront sur leur vocation.

Propos recueillis par Ann Schneible
Traduction de l’anglais par Hélène Ginabat

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ZENIT Staff

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