ROME, vendredi 13 janvier 2012 (ZENIT.org) – « On ne construit pas un Etat de droit dans une culture de tricherie, de mensonge et de terreur », déclarent les évêques de la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) dans leur message à l’issue de leur assemblée plénière extraordinaire.
« Le courage de la vérité » est le thème du message des évêques, rendu public jeudi soir, à Kinshasa, la capitale, après trois jours de travaux, du 9 au 11 janvier (pour plus de détails se rapporter au texte intégral publié dans notre rubrique « documents » du jeudi 12 janvier 2012).
« Ce qui se passe présentement au niveau de la compilation des résultats des élections législatives est inacceptable. C’est une honte pour notre pays », déclarent les évêques.
Revenant sur les résultats des élections présidentielles et législatives de novembre 2011, et sur la base de leur analyse du rapport d’observation électoral menée par l’Eglise du Congo, les évêques demandent au peuple congolais de « tirer des leçons du processus électoral en cours.
Car si ce processus, relèvent-ils, révèle des éléments positifs, il n’est pas moins entaché d’ « irrégularités et de faiblesses inquiétantes », comme le soulignait le cardinal archevêque de Kinshasa, dans une déclaration, le 12 décembre dernier, en dénonçant la non conformité à la vérité et à la justice des résultats provisoires publiés par la CENI.
L’élection présidentielle a un tour a été remportée par le chef de l’Etat sortant Joseph Kabila. Il a devancé l’opposant Etienne Tshisekedi qui s’est autoproclamé « président élu » après avoir dénoncé de nombreuses irrégularités, constatées également par plusieurs pays et observateurs nationaux et internationaux.
« L’on a noté, ajoutent les évêques, plusieurs défaillances, des cas de tricheries avérées et vraisemblablement planifiées, de nombreux incidents malheureux entraînant mort d’homme, des cafouillages, et, à certains endroits, un climat de terreur entretenu et exploité à dessein pour bourrer les urnes », confirment pour leur part les évêques dans leur message.
« Ces irrégularités remettent en question la crédibilité des résultats publiés », déclarent-ils.
Ils demandent donc aux organisateurs « d’avoir le courage et l’honnêteté de tirer les conséquences qui s’imposent », de ne pas courir le risque de « continuer à gouverner le pays par défi », évitant ainsi que « les tensions intérieures plus ou moins maîtrisées à court terme ne culminent, tôt ou tard, dans une crise grave et difficile à dénouer ».
La CENI a repoussé jeudi de quelques jours la publication des résultats provisoires complets de ce scrutin, initialement prévue ce vendredi 13 janvier 2012.
Les évêques disent à la fois ne pas vouloir entrer dans la bataille politique ni plaider pour un parti politique, mais ne pas vouloir non plus rester à l’écart dans la lutte pour la justice, comme le recommande Benoît XVI.
Ils réaffirment que le rôle de l’Eglise est d’être présente « là où l’humanité connaît la souffrance » et de se faire l’écho « du cri silencieux des innocents persécutés, ou des peuples dont des gouvernements hypothèquent le présent et l’avenir au nom d’intérêts personnels ».
Aussi condamnent-ils la campagne de dénigrement orchestrée publiquement contre l’archevêque de Kinshasa, le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya, qui avait donné son point de vue sur les résultats de l’élection présidentielle, les qualifiant de « non conformes à la vérité ni à la justices ».
Un tel « déferlement d’injures » atteste l’émergence d’une pensée unique qui tend à museler toute opinion contraire, commentent les évêques qui condamnent par la même occasion les « insultes et menaces » faites à son endroit, rappelant que le débat d’idées en démocratie n’autorise pas des attaques personnelles.
« Nous ne nous lasserons pas de dénoncer tout ce qui met en péril l’édification d’un Etat démocratique », annoncent-ils, rappelant que la démocratie est « un pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple », et que l’on doit respecter ce peuple.
Enfin, à titre de recommandations, les évêques de la CENCO appellent tout le pays à prendre la voie du dialogue et de la non violence.
Au peuple en particulier, ils demandent de ne pas céder au pessimisme ni au pessimisme, ni au désespoir, ni à la violence, ni au tribalisme, ni à la xénophobie ; aux acteurs politiques de faire preuve de maturité et de responsabilité; au Parlement, de revoir de toute urgence la composition de la CENI qui ne jouit plus de la confiance de la population.
A la communauté internationale, les évêques congolais demandent « de privilégier l’intérêt du peuple congolais, d’appuyer le peuple congolais dans sa recherche de justice et de paix et de le respecter dans son autodétermination.
Isabelle Cousturié
–