La « grande arme de Jean-Paul II », par Mgr Suaudeau

« Jean-Paul II : Une vie pour la vie »

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ROME, mardi 22 novembre 2011 (ZENIT.org) – « La grande arme de Jean-Paul II, c’était le pardon, appuyé sur la Miséricorde Divine », explique Mgr Jacques Suaudeau, de l’Académie pontificale pour la Vie, dans ce témoignage donné ce 22 novembre au Vatican lors de la présentation à la presse du congrès international organisé par le Conseil pontifical pour la pastorale du monde de la santé sur le thème : « La pastorale de la santé au service de la vie à la lumière du magistère du bienheureux Jean_-Paul II ». Mgr Suaudeau rappelle aussi que Jean-Paul II, en son temps, a été« haï ».

Jean-Paul II : Une vie pour la vie

L’œuvre de Jean-Paul II a été considérable, sur tous les plans. Il n’est pas un des aspects de l’Eglise qu’il n’ait marqué de son sceau, de ses initiatives, de son extraordinaire allant. Cependant, il est clair que la défense de la valeur et de la dignité de la vie humaine a occupé une part importante de la pensée, des discours et des écrits du Saint Père. Jean-Paul II a été le Pape de la « Culture de la Vie », contre la « Culture de mort ». Ces termes sont désormais passés dans le langage courant, mais c’est Jean-Paul II qui non seulement les a forgés mais les a encore emplis de signification.

La défense de la vie humaine et de sa dignité n’a, certes, pas attendu Jean-Paul II pour être proclamée et pratiquée, dans l’Eglise. Mais ce que le Saint-Père qui vient de nous quitter a apporté à cette défense lui confère un caractère très particulier. C’est en effet de son expérience personnelle, dans ces sombres périodes successives de l’histoire contemporaine où la Pologne a du subir deux vagues successives de totalitarisme féroce, que Jean-Paul II a tiré ce qu’il nous dit en paroles si authentiques sur le mal, la souffrance, l’oppression, la mort. « La mort de Dieu, c’est la mort de l’homme« , a-t-on dit, et cette phrase a malheureusement rejoint un niveau de concrétisation particulièrement impressionnant dans ces deux régimes successifs. Car ceux-ci ne se sont pas contentés de tuer ou d’emprisonner: ils ont aussi méprisé la vie humaine, ils ont joyeusement foulé aux pieds la dignité de la vie humaine. Dans son expérience personnelle, Jean-Paul II a ressenti profondément ce lien entre le mal, le mépris de l’homme, l’oppression et l’instrumentalisation de la vie humaine au service du délire humain de puissance.

Toutefois, si le bienheureux Jean-Paul II a été très conscient de la profondeur de ce mal qui s’acharne contre la vie humaine depuis l’aube des temps, il ne s’est pas arrêté pas là: il est allé au-delà du mal, pour trouver le bien, dans les âmes, dans les événements historiques, dans toutes ces contre-attaques que l’homme a toujours mené, au fil de l’histoire, contre le mal, contre la mort. C’est pourquoi, la défense par Jean-Paul II de la vie humaine, son long combat de toute une vie pour le respect de cette vie humaine, depuis la conception jusqu’à la mort, a été un combat positif, optimiste. Dans la vision que Jean-Paul II essayait de nous communiquer, l’homme n’est pas en effet cet animal rationnel abandonné à son propre destin sur un amas de poussière absurde perdu dans l’immensité d’un univers sans réponse et sans âme, comme voulaient nous en convaincre certains maîtres à penser contemporains, porte-parole de la « mort de Dieu » . Il y a le mal, certes, dans le monde, mais il y a l’Esprit « qui renouvelle la face de la terre » .

C’est pourquoi, si Jean-Paul II a effectivement parlé, et fortement de la « culture de mort » , de sa diffusion, de son emprise sur les lois et les institutions, et de la fascination qu’elle exerce sur tant d’esprits, il a aussi et surtout parlé de la « culture de vie » , que les chrétiens sont appelés au premier chef a défendre, à propager, à opposer au mal. En fait, c’est d’abord de la « Culture de Vie » que Jean Paul I a parlé, dès 1982, en s’adressant aux jeunes de l’Action Catholique, et la première allusion à la « culture de mort » n’est venue qu’après, en 1984, et, là encore, en s’adressant à des jeunes pour les inviter à la débusquer. Le Saint Père a, certes, vigoureusement dénoncé la « culture de mort » et dressé sans détours le sinistre tableau de ses ravages, mais sans s’y complaire: car pour lui, c’était le positif qui comptait.

Ce n’est pas pour rien que le Saint-Père se trouvait aussi à l’aise avec deux catégories de personnes: les jeunes, et les malades, deux piliers de la lutte pour la vie, quand ils s’y mettent. C’était chez les jeunes que le Pape trouvait cet élan et cette énergie de la vie qui fait culbuter la culture de la mort dans son propre vide; c’était chez les malades qu’il trouvait cette force de l’âme, aguerrie par la souffrance, qui donne toute sa dignité au corps qui n’en peut plus. Et, bien à l’évidence, c’était chez les familles, avec leurs tous petits dans les bras, qu’il trouvait ce bel optimisme et cette confiance dans la vie, emplie de la sagesse de la maturité, qui constituait le gros obstacle à toutes les « politiques » dites « de contrôle de la population » .

C’était bien à l’évidence contre la personne de Jean-Paul II que se dirigeait en premier la haine des chantres du « gender », de l’homosexualité, de la stérilisation et de l’avortement reconnu comme un droit sacré. Mais cette haine était vaine. Pourquoi était-elle vaine? Parce que Jean-Paul II ne leur renvoyait pas la balle, parce qu’il continuait à les respecter en tant que personnes humaines, certes fourvoyées, mais toujours appelées à la conversion. La grande arme de Jean-Paul II, c’était le pardon, appuyé sur la Miséricorde Divine. La Miséricorde doit être encore la réponse face à ceux qui prêchent l’avortement pour tous, la destruction de la vie humaine « en éprouvette » , et la lâcheté du suicide assisté et autres euthanasies. Etre ferme dans ses convictions, patient sous les attaques, résolu dans la poursuite du bien, se refuser à employer les armes du mal pour la cause du bien, être toujours prêt à pardonner, à accueillir. Voilà le message de Jean-Paul II, voilà le message qu’Il a laissé à tous ceux qui, à son exemple, et inspirés par son message, défendent aujourd’hui la vie humaine, où qu’elle soit, quel que soit son âge, quelque soit le handicap qui l’affecte.

Un dernier aspect ressort de la réflexion du Saint Père sur la « culture de la vie » : celle-ci ne saurait être affaire de spécialistes. Tous doivent se sentir une responsabilisé en ce domaine, « personne ne doit se sentir exclu de cette mobilisation pour une nouvelle culture de la vie: tous ont un rôle important à jouer » (EV, 98); car, comme le dit Jean-Paul II, « la célébration de l’Evangile de la Vie demande à être réalisée surtout dans l’existence quotidienne, vécue dans l’amour d’autrui et dans le don de soi » (EV, 85). Le service de la vie passe par de multiples petits gestes quotidiens d’offrande, souvent humbles et cachés, accomplies par des hommes et des femmes, des enfants et des adultes, des jeunes et des anciens, des malades et des bien portants (EV, 85). Et il passe aussi par des gestes héroïques, de don total de soi. L’un prépare l’autre. De toutes les paroles du bienheureux Jean-Paul II relatives à la culture de la vie, peut être pouvons nous retenir plus particulièrement celle-ci, qui résume bien sa pensée: « Au-delà des actions d’éclat, il y a l’héroïsme au quotidien, fait de petits ou de grands gestes de partage qui enrichissent une authentique culture de la vie » (EV.n. 86). L’héroïsme du quotidien: le Saint Père Jean-Paul II nous l’a montré, par son propre témoignage de vie. Le Jean-Paul II des dernières heures restera toujours dans nos mémoires comme un vibrant témoin de la vie et pour la vie dans l’accueil serein de la mort, du « passage au Père ».

Mgr Jacques Suaudeau

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ZENIT Staff

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