Manifestations de chrétiens en Inde, après des attaques hindouistes

Les chrétiens de Bhopal dans les rues

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ROME, Mardi 20 avril 2010 (ZENIT.org) – En Inde, dans l’Etat du Madhya Pradesh, des chrétiens manifestent après une série d’attaques perpétrées par des hindouistes, indique aujourd’hui « Eglises d’Asie » (EDA), l’agence des Missions étrangères de Paris (MEP).

A Bhopal, capitale du Madhya Pradesh, une grande manifestation s’est déroulée lundi 19 avril, après l’attaque le week-end dernier d’un groupe de chrétiens protestants lors d’un rassemblement de prière, faisant au moins un mort et trois blessés.

Dans la soirée du 17 avril, une trentaine d’hommes, le visage masqué par des étoffes de couleur safran (1), ont fait irruption au milieu d’une réunion de prière et ont frappé les participants, a raconté à Ucanews, le 18 avril, Sanjay James, présent lors de l’attaque (2).

Le rassemblement protestant se tenait à Saliya, village du district de Betul, dans l’Etat du Madhya Pradesh. Bien que l’assemblée ait compté plus de 400 fidèles, Sanjay James rapporte que les chrétiens ont été dans l’incapacité d’arrêter les assaillants avant qu’il ne soit trop tard. « Lorsqu’ils sont entrés, nous étions en train de chanter un cantique les yeux fermés », explique-t-il. Mais dès que leurs agresseurs ont commencé à les frapper avec des bâtons, des barres de fer et différentes armes, les chrétiens se sont mis à courir dans tous les sens pour se mettre à l’abri. « Ils nous battaient en nous accusant de nous livrer à des conversions forcées », raconte le témoin, qui ajoute que pendant qu’ils fuyaient dans l’obscurité, un jeune homme de 25 ans, Amit Gilbert, est tombé dans un puits à ciel ouvert où il s’est noyé, tandis que trois autres, dont une femme, étaient gravement blessés. Cette dernière a eu la colonne vertébrale brisée et son état est jugé très préoccupant par les médecins. Avant de disparaître, le groupe des assaillants a détruit le matériel liturgique, des bibles et vandalisé les véhicules des chrétiens (3).

Sept personnes auraient déjà été arrêtées par la police, mais aucune information n’a encore filtré sur l’identité des agresseurs. Le Madhya Pradesh Isai Mahasangh (Grand conseil des chrétiens du Madhya Pradesh, MPIM) a déclaré suspecter fortement le Bajrang Dal (4) d’être à l’initiative de l’agression, une allégation démentie par Preetivardhan Chaturvedi, responsable local du groupe hindouiste. «C’est de la diffamation pure et simple contre notre organisation ! », a-t-il fulminé.

Il s’agit, en deux jours, de la seconde attaque de chrétiens lors de réunions de prière au Madhya Pradesh. Lors d’une session évangélique qui s’était tenue du 13 au 15 avril derniers dans le grand stade de la ville de Balaghat, réunissant des milliers de participants, des militants hindouistes, après plusieurs tentatives pour pénétrer dans l’enceinte, avaient lancé un cocktail Molotov, sans faire de victimes. Le troisième jour, 15 avril, environ 200 militants hindouistes, identifiés par les forces de l’ordre comme appartenant au Bharatya Janata Party (BJP, Parti du peuple indien) et au Bajrang Dal, avaient de nouveau tenté de pénétrer dans le stade où se trouvaient près de 9 000 personnes (5 000 selon les forces de l’ordre), mais la police avait réussi à les refouler, arrêtant 22 d’entre eux, après avoir été attaquée elle-même à coup de pierres. A la fin du meeting, lorsque les chrétiens étaient sortis du stade, les hindouistes les avaient à nouveau attaqués, les poursuivant jusque dans les cars et autres véhicules qu’ils devaient prendre pour repartir. Selon les organisateurs, il y aurait eu de nombreux blessés (5). L’incident avait obligé les forces de l’ordre à protéger les églises et les prêtres de toute la région, comme cela avait déjà été le cas lors de l’attaque manquée de la cathédrale syro-malabar de Satna en mars dernier (6).

Le 15 avril, Mgr Leo Cornelio, archevêque catholique de Bhopal, avait tenu une conférence de presse au cours de laquelle il avait « rappelé au gouvernement qu’il [était ] de son devoir de protéger chaque citoyen, sans considération de caste, de religion ou autre », et que les chrétiens étaient continuellement « persécutés et  humiliés » par les groupes hindouistes qui agissaient en toute impunité. « Nos fidèles sont arrêtés sur de fausses accusations et jetés en prison, alors que ceux qui les attaquent se promènent librement », a-t-il ajouté (7).

Comme d’autres observateurs avant lui, il n’avait pas manqué de souligner que les chrétiens subissaient ces violences en constante augmentation depuis 2003, année de l’arrivée au pouvoir du BJP. Selon les statistiques de l’Eglise locale et de plusieurs organisations chrétiennes, il n’y aurait eu plus de 170 attaques antichrétiennes depuis cette date. Mais « nous ne céderons pas à la pression », avait conclu l’archevêque, qui avait appelé à une manifestation pacifique pour le 18 avril.

L’attaque du week-end ayant renforcé la détermination des chrétiens, ils étaient plus de 5 000 à répondre à l’appel de Mgr Cornelio et de la Confédération des chrétiens (MPIM), en défilant lundi 18 avril 2010 dans les rues de Bhopal par une chaleur dépassant les 40° C. Les manifestants portaient des pancartes et des banderoles demandant que les droits des chrétiens et des minorités soient respectés et les agresseurs sanctionnés. Au même moment, à Saliya, les chrétiens, qui avaient également organisé une marche de protestation, déposaient une requête adressée au collector, le plus haut représentant de l’Etat dans le district, afin que cessent les violences infligées à leur communauté.

A l’issue de la manifestation, Mgr Leo Cornelio s’est adressé à la foule : « Nous sommes des citoyens de cet Etat et en tant que tels, nous avons les mêmes droits à mener une vie qui ne soit pas faite de peur et d’humiliation. » Cette demande de respect des minorités a été reprise par d’éminents hommes politiques et responsables religieux qui étaient venus apporter leur soutien aux chrétiens. « Nous sommes avec vous ! », a ainsi lancé à la foule Haji Haroon, leader musulman et président du principal parti d’opposition, après avoir rappelé que les chrétiens s’étaient risqués dans la jungle et dans les lieux les plus reculés de l’Etat pour y apporter aide médicale et éducation à tous les pauvres et laissés-pour-compte de la société. Quant à Shailendra Shailey, leader communiste, également présent au meeting, il a tenu à souligner que les chrétiens se refusaient à entrer dans le cercle de la violence, mais, au contraire, travaillaient à l’amélioration de la société et à la paix. Et pourtant, concluait-il, « les chrétiens sont persécutés sans raison pour avoir fait ce bon travail ».

Au Madhya Pradesh, on estime que les chrétiens représentent moins de 1 % d’une population de 55 millions, à 91 % hindoue.

(1)           Le safran, couleur sacrée de l’hindouisme, est devenue l’un des symboles des mouvements extrémistes hindous.

(2)           Ucanews, 19 avril 2010.

(3)           Times of India, 16 avril 2009, All India Christian Council, 18 avril 2010.

(4)           Le Bajrang Dal est la branche jeunesse du Vishwa Hindu Parishad (VHP), mouvement extrémiste hindou.

(5)           IANS, 19 avril 2010, Central Chronicle, 19 avril 2010, Indian Express 19 avril 2010.

(6)           Voir EDA 525

(7)           Ucanews, 15 avril 2010.

© Les dépêches d’Eglises d’Asie peuvent être reproduites, intégralement comme partiellement, à la seule condition de citer la source.

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ZENIT Staff

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