Carl Anderson compare la loi sur l'avortement à la loi sur la ségrégation

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Des lois « coupées de la réalité »

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ROME, Mercredi 3 Mars 2010 (ZENIT.org) – La loi qui établissait la ségrégation aux Etats-Unis, dans les années cinquante, était coupée de la réalité. Des femmes et des hommes ont eu le courage de dénoncer cette loi et « ont gagné le respect du jugement de l’histoire ». La loi sur l’avortement est elle aussi coupée de la réalité, affirme Carl Anderson, chevalier suprême des chevaliers de Colomb, dans l’analyse que nous publions ci-dessous.

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Pour avoir été membre de la Commission américaine pour les droits civiques pendant près de dix ans, je sais qu’il existe, dans la société américaine, très peu de questions aussi controversées que celles qui concernent les rapports raciaux.

Cela dit, un article paru à la fin de la semaine dernière sur le New York Times, intitulé « To Court Blacks, Foes of Abortion Make Racial Case » (Pour courtiser les noirs, les ennemis de l’avortement créent un cas racial), mérite qu’on s’y arrête.

Sans entrer dans la controverse concernant la philosophie eugénique, bien documentée, de Margaret Sanger (fondatrice du Planned Parenthood), ou dans le débat sur le fait que les afro-américains sont ou non la cible des services d’avortement, plusieurs éléments troublants demeurent.

Tout d’abord, comme le soulignait le New York Times, pratiquement 40% des avortements pratiqués dans le pays le sont sur des femmes de couleur, qui ne constituent pourtant que 13% de la population américaine.

Indépendamment de la cause d’un taux aussi élevé, l’avortement est une tragédie particulièrement répandue chez les afro-américains. Dans l’avortement il n’y a pas de vainqueurs. Il n’y a que des morts et des blessés, et toutes les personnes impliquées doivent être accueillies avec amour et compassion.

Des alternatives concrètes doivent être offertes aux personnes de la communauté noire qui risquent le plus d’être confrontées à l’avortement. Celles qui ont vécu l’expérience d’un avortement doivent pouvoir recevoir un message de guérison et d’espérance.

Dans nos efforts pour bâtir un soutien de compassion, nous devrions aussi nous rappeler de la dernière encyclique de Benoît XVI, « L’amour dans la vérité ». Une partie de notre charité consiste à affronter les mensonges qui ont conduit des millions de personnes à accepter des injustices comme des nécessités sociales, à décider de faire que la vérité guide notre amour et à laisser que notre amour soit le porte-parole de la vérité.

Limbes légaux

En février, les Etats-Unis ont célébré le mois de l’histoire des noirs. Il y a malheureusement des parallèles légaux entre le terrible héritage de la négation des droits des noirs (et leur traitement inhumain) et les limbes légaux actuels concernant les droits des enfants à naître, dans ce pays.

Tant les vies à naître que la communauté noire ont été victimes d’une jurisprudence terrible. En effet, les décisions de la Cour suprême qui ont permis un accès illimité à l’avortement (Roe c. Wade) et établi le principe ségrégationniste du « séparés mais égaux » (Plessy c. Ferguson) étaient dans les deux cas fondées sur le mensonge.

Dans la sentence Plessy c. Ferguson, la majorité était de l’opinion que la ségrégation pourrait permettre le traitement égalitaire entre Américains blancs et noirs. Selon la Cour, les Américains noirs qui considéraient cette séparation comme « un badge indiquant l’infériorité » ont créé leur propre réalité, qui n’était pas celle que prévoyait la loi. La Cour a insisté sur le fait que tout semblant d’infériorité n’était « en aucune façon basé sur un élément de l’acte, mais dû uniquement à une construction que les noirs avaient échafaudée autour de cet acte ».

Comme l’a toutefois fait remarquer le juge John Marshal Harlan en prenant position contre cette décision, « chacun sait que la loi en question a pour origine l’intention, non pas tant d’exclure les blancs des wagons occupés par des noirs, que d’exclure les noirs des wagons occupés par des blancs ou qui leur sont réservés ».

Des lois coupées de la réalité

Dans la sentence Roe c. Wade aussi, on a permis qu’une fiction se transforme en loi du pays. Dans ce cas, la Cour a affirmé ne pouvoir établir quand commence la vie humaine.

Et pourtant, tout monde savait à l’époque, et la science depuis l’a seulement rendu plus clair, que l’enfant avant sa naissance est justement un enfant.

Ce qui est frappant dans les sentences Plessy et Roe c’est que dans chacun des deux cas la majorité a jugé nécessaire d’ignorer ce qui était évident, pour légiférer comme ils l’ont fait. Et malheureusement, indépendamment des motivations de chaque juge, la communauté noire, déjà frappée par la sentence Plessy, l’a été de nouveau, et de manière disproportionnée, avec la sentence Roe.

La décision de la majorité dans le cas Roe n’aurait pu en aucun cas avoir des conséquences positives, mais la controverse actuelle est un autre exemple du fait que les décisions prises à la légère tendent à avoir des conséquences non voulues, et souvent terribles, des conséquences qui vont au-delà de celles qui étaient faciles à prévoir.

Bien entendu, dans les années cinquante, un grand nombre de juristes, professeurs de droit et hommes politiques insistaient sur le fait que la ségrégation permise par la sentence Plessy était « une loi établie ». Aujourd’hui, « experts » et hommes politiques affirment la même chose concernant l’héritage relatif à l’avortement de la sentence Roe.

Mais la sentence Plessy était coupée de la réalité, et le courage d’hommes et de femmes de valeur comme Martin Luther King, Jr., et Rosa Parks, a déstabilisé cette « loi établie », en gagnant le respect du jugement de l’histoire.

La sentence Roe aussi est coupée de la réalité que tous connaissent. Nous avons besoin de plus de femmes et d’hommes courageux qui acceptent de se lever et d’exiger que la loi d’une Nation sur l’avortement ne soit jamais établie tant qu’elle n’est pas conforme à la vérité.

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ZENIT Staff

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