ROME, Jeudi 21 janvier 2010 (ZENIT.org) – La visite de Benoît XVI à la communauté juive de Rome, dimanche 17 janvier, à la grande synagogue de Rome a constitué un « moment de grâce », souligne le directeur de L’Osservatore Romano dans cet éditorial publié par l’édition hebdomadaire en français de mardi dernier, 19 janvier.
Il souligne que « ce qui unit les juifs et les catholiques est beaucoup plus important que ce qui les sépare, comme l’ont rappelé les présidents MM. Pacifici et Gattegna et comme l’ont souligné le rabbin Riccardo Di Segni et Benoît XVI ».
« Un moment de grâce », par Giovanni Maria Vian
Benoît XVI a défini sa visite à la communauté juive de Rome – la plus ancienne de la diaspora occidentale – comme un moment de grâce. Et ce fut véritablement le cas. On pouvait le percevoir dans l’émotion du Pape lorsqu’il a rendu hommage aux déportés de la Shoah et aux victimes du terrorisme antijuif, dans les larmes de ceux qui en ont souffert les conséquences, dans la fierté et la joie émue des personnes âgées juives romaines, qui ont serré la main de l’évêque de leur ville, dans les chants puissants qui se sont élevés du grand Temple, dans la présence nombreuse et significative de représentants venus d’Israël et de tout le monde juif, dans les applaudissements qui ont interrompu à neuf reprises le discours de Benoît XVI.
Oui, la rencontre a représenté un pas en avant supplémentaire et important sur le chemin que catholiques et juifs parcourent ensemble: supplémentaire, car cela a été le énième moment d’une histoire très longue; important, car il a énoncé de façon courageuse et sincère toutes les difficultés. Des siècles d’oppositions et de violence, de méfiances et de curiosité, de rencontres et d’amitié marquent les relations entre juifs et chrétiens; et surtout, depuis plus d’un demi siècle, pèse le poids de la Shoah, l’ombre du mal.
Précédée par des éclairs polémiques, la visite a montré au contraire la détermination dans la volonté commune d’affronter les questions ouvertes dans les relations entre juifs et catholiques. Toutefois, les oppositions sont souvent le fruit d’exagérations médiatiques. Irresponsables ou à visée instrumentale, ces opérations sont dénuées de toute réelle consistance, mais ont allumé des feux de paille dangereux, ne serait-ce que parce qu’ils présentent à l’opinion publique un cadre déformé et éloigné de la réalité.
Un exemple emblématique est la question épineuse représentée par Pie xii: il faut en effet être conscients que même après l’ouverture de toutes les archives disponibles, il n’existera pas de consensus à propos de son attitude à l’égard de la Shoah, car le domaine des interprétations historiques demeurera, de façon évidente et légitime, ouvert. Mais le climat de respect réciproque que l’on a respiré également sur ce thème est important, car il existe à présent un consensus historiographique étendu et établi à propos du choix lucide et difficile de charité silencieuse accompli par le Pape et par son Eglise dans le contexte de la deuxième guerre mondiale.
Pour délier les noeuds difficiles, la joie pour le chemin parcouru et le respect entre catholiques et juifs sont fondamentaux, mais ne suffisent pas. Il faut en effet aller de l’avant, avec patience et courage, en cherchant à comprendre les sensibilités réciproques, pour ne pas les blesser et perpétuer de cette façon des méfiances qui dérivent principalement du fait de leur ignorance.
Ce qui unit les juifs et les catholiques est beaucoup plus important que ce qui les sépare, comme l’ont rappelé les présidents MM. Pacifici et Gattegna et comme l’ont souligné le rabbin Riccardo Di Segni et Benoît XVI: le refus de la violence et la solidarité réciproque face aux persécutions, la recherche de l’amitié avec les autres confessions religieuses et surtout avec l’islam, la protection de la personne humaine et de la famille, la protection de la création. Mais surtout, le témoignage commun du Seigneur, afin que sa lumière illumine tous les peuples.
(© L’Osservatore Romano – 19 janvier 2010)