Messe pour les familles à Mexico : Homélie du cardinal Bertone

ROME, Mardi 20 janvier 2009 (ZENIT.org) – Nous publions ci dessous le texte intégral de l’homélie prononcée par le cardinal Tarcisio Bertone, secrétaire d’Etat de Benoît XVI et légat pontifical à la VIème Rencontre mondiale des familles, lors de la messe de […]

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ROME, Mardi 20 janvier 2009 (ZENIT.org) – Nous publions ci dessous le texte intégral de l’homélie prononcée par le cardinal Tarcisio Bertone, secrétaire d’Etat de Benoît XVI et légat pontifical à la VIème Rencontre mondiale des familles, lors de la messe de clôture qui a été célébrée à Mexico le dimanche 18 janvier.

*  *  *

Chers frères et sœurs dans le Christ,

«A tous les bien-aimés de Dieu qui sont à Rome, aux saints par vocation, à vous grâce et paix de par Dieu notre Père et le Seigneur Jésus Christ» (Rm 1, 7).

Avec ces paroles de l’apôtre saint Paul, dont l’Eglise célèbre le bimillénaire de la naissance, je désire vous transmettre à tous l’affection et la proximité spirituelle de Sa Sainteté le Pape Benoît XVI, que j’ai l’honneur de représenter comme légat pontifical en cette vi Rencontre mondiale des familles.

Je salue avec des sentiments particulier de communion fraternelle le cardinal Ennio Antonelli, président du Conseil pontifical pour la famille, en le remerciant vivement, ainsi que ses collaborateurs, pour l’attention délicate et efficace avec laquelle ils ont préparé cette initiative qui réunit dans ce beau pays des familles provenant du monde entier. Je désire également rappeler Monsieur le cardinal Alfonso López Trujillo, que nous confions à la miséricorde de Dieu et qui s’est occupé avec tant de zèle des précédentes rencontres mondiales des familles, ayant également lancé le chemin de préparation du rassemblement actuel.

Je salue avec affection et gratitude, également au nom du Saint-Père, Monsieur le  cardinal Norberto Rivera Carrera, archevêque-primat de Mexico pour le soin et l’attention avec lesquels, avec la communauté diocésaine, il a achevé la célébration de cette Rencontre mondiale. Je ne peux manquer de mentionner également avec gratitude l’intense travail accompli par le comité d’organisation de cette grande rencontre, sous la direction de Mgr Jonás Guerrero Corona, évêque auxiliaire de Mexico, le dévouement de nombreux volontaires qui ont apporté une collaboration généreuse et également l’affection avec laquelle tant de familles de la ville ont ouvert leur maison et leur cœur à d’autres familles venues de loin pour participer à ce merveilleux événement ecclésial.

Je salue avec affection Messieurs les cardinaux, mes frères dans l’épiscopat et les délégations venues de nombreuses parties du monde, témoignant ainsi de l’engagement avec lequel les Eglises particulières travaillent pour la promotion de la pastorale familiale dans les diverses régions de la planète.

J’adresse un salut cordial et respectueux aux autorités présentes à cette Eucharistie, soulignant ainsi l’importance vitale de la famille pour le présent et l’avenir de la société.

Il faut également souligner l’enthousiasme et la conviction avec lesquels les prêtres, les religieux, les religieuses et les autres agents de la pastorale se consacrent à la promotion et  à l’apostolat pour les familles et avec elles.

Je remercie, en particulier, les familles réunies ici dans cette grande assemblée liturgique, autour du Seigneur Jésus et sous le regard maternel de Notre-Dame de Guadalupe. Dans quelques instants, les époux présents renouvelleront leur alliance conjugale et la bénédiction du Seigneur descendra sur eux pour raviver la grâce sacramentelle du mariage.

Les lectures qui ont été proclamées nous présentent la Parole de Dieu qui nous illumine et nous interpelle. La première, tirée du Livre des Proverbes, parle des conseils d’un père à son jeune fils.  Il s’agit d’un aspect particulièrement adapté à cette VIème Rencontre mondiale des familles, qui a pour thème: La famille, formatrice aux valeurs humaines et chrétiennes.

Ces enseignements paternels concernent la bonne conduite, l’éthique, les valeurs humaines et sont le fruit de l’expérience, de la réflexion et du bon sens. Ils contiennent des recommandations concrètes pour éviter les vices et pratiquer la vertu. Le texte que l’on vient d’entendre, dans sa brièveté, ne s’arrête que sur des cas comme l’ivresse la gloutonnerie, la paresse et le manque de respect pour les parents âgés. A ce propos, l’auteur précise: «Ne sois pas de ceux qui s’enivrent de vin, ni de ceux qui se gavent de viande, car buveur et glouton s’appauvrissent, et la torpeur fait  porter des haillons. Ecoute ton Père qui t’a engendré, ne méprise pas ta mère devenue vieille» (Pr 23, 20-21). Toutefois, dans le Livre des Proverbes, l’horizon est beaucoup plus vaste, car il est question d’orgueil, d’arrogance, de colère, de vengeance, d’oppression des pauvres, en particulier des  veuves et des orphelins, de prostitution, d’adultère, de mensonge et de tromperie.

Les vertus, au contraire, sont louées. Le texte proclamé exhorte vivement à être sages, droits, justes, honnêtes et engagés à faire le bien. «Ecoute, mon fils, deviens sage, et dirige ton cœur dans le chemin… Aquiers la vérité, ne la vends pas; sagesse, discipline et intelligence» (Pr 23, 19 et 23). Sous cet aspect également, les recommandations concernent beaucoup d’autres vertus: l’humilité, le contrôle de soi, la patience, la loyauté, la fidélité conjugale, le pardon des ennemis, le labeur, la sobriété, la défense des pauvres, la générosité et l’hospitalité.

Le principe qui régit et sur lequel se fonde le comportement éthique est la crainte du Seigneur: «Principe de la sagesse: la crainte de Yahvé!» (Pr 9, 10), c’est-à-dire l’authentique relation avec Dieu, faite de respect, d’adoration, d’obéissance et de confiance. Quelque chose de semblable est également dit également dans le passage de l’Ecriture que nous avons écouté: «Que ton cœur n’envie pas les pécheurs,  mais dans la crainte de Yahvé qu’il reste tout le jour, car il existe un avenir et ton espérance ne sera pas anéantie» (Pr 23, 17-18).

La crainte du Seigneur pousse à renoncer au péché et à accomplir sa volonté, exprimée dans les règles morales. Etant donné que Dieu ne désire que notre bien, lui obéir, selon le Livre des Proverbes, représente  le chemin pour connaître le succès également dans ce monde, pour obtenir la santé, la longévité, le bien-être, une famille unie, une descendance et la respectabilité sociale.

Le Psaume responsorial que nous avons chanté approfondit ce même enseignement:  «Heureux tous ceux qui craignent Yahvé et marchent dans ses voies! Du labeur de tes mains tu te nourriras, heur et bonheur pour toi.  Ton épouse: une vigne fructueuse…; tes fils: des plants d’olivier» (Ps 128, 1-3). Selon les écrits sapientiaux de l’Ancien Testament, la crainte du Seigneur, les valeurs éthiques et les normes morales appartiennent à la logique et au dynamisme de la vie qui tend à sa plénitude. Les accepter signifie suivre le chemin de sa propre croissance humaine, être fidèles à Dieu et fidèles à soi-même.

Il s’agit de valeurs et de règles connues à travers l’expérience et la réflexion, c’est-à-dire avec la raison, et qui, étant contenues dans le texte inspiré, sont, dans le même temps, Parole de Dieu. Il est compréhensible que certaines vérités accessibles à tous même aux non-croyants, soient confirmées  par la révélation biblique, car souvent, la raison, obscurcie par les instincts et les préjugés, ne juge pas correctement. Comme le dit saint Augustin: Dieu a écrit sur des tables de pierre les dix commandements que les hommes ne lisaient plus dans leur cœur» (Commentaire au psaume, 57, 1). La droite raison et la foi sont alliées. Les valeurs authentiquement humaines sont également chrétiennes, car, comme l’exhorte l’apôtre Paul: «Enfin frères, tout ce qu’il y a de vrai, de noble, de juste de pur, d’aimable, d’honorable, tout ce qu’il peut y avoir de bon dans la vertu et la louange hum
aines, voilà ce qui doit vous préoccuper» (Ph 4, 8).

Les disciples de Jésus respectent eux aussi le contenu et l’essence des valeurs et de l’activité humaine, mais le message chrétien leur confère une signification nouvelle et plus élevée, il les intègre dans la réflexion filiale avec Dieu le Père et dans le dynamisme de la foi, de l’espérance et de la charité. Le centre de l’action morale du chrétien est la personne de Jésus Christ, le dialogue et la communion avec Lui, et à travers Lui, avec le Père dans l’Esprit Saint. Dans cette nouvelle relation avec les Personnes divines, la pratique des valeurs humaines et des règles morales se perfectionne, acquiert de nouvelles motivations et énergies, des capacités de sacrifice à la suite du Crucifié, une joie et une confiance dans la présence du Ressuscité.

La famille chrétienne place au centre de son attention la personne du Seigneur Jésus: elle l’accueille dans sa maison; elle prie et se réunit autour de Lui; elle s’efforce de partager ses enseignements, ses sentiments, ses désirs, d’accomplir sa volonté. La  foi dans sa présence transforme toutes les relations et les activités familiales, exalte les valeurs humaines, crée un climat de communion et de joie.  Un climat humain et dans le même temps divin, comme cela est rappelé avec émotion et enthousiasme dans le texte de la Lettre aux Colossiens que nous avons écoutée dans la deuxième lecture: «Vous donc, les élus de Dieu, ses saints et ses bien-aimés, revêtez des sentiments de tendre compassion, de bienveillance, d’humilité, de douceur, de patience… Le Seigneur vous a pardonnés, faites de même à votre tour. Et puis, par-dessus tout, la charité, en laquelle se noue la perfection. Avec cela, que la paix du Christ règne dans vos cœurs… Que la Parole du Christ réside chez vous en abondance… Et quoi que vous puissiez dire ou faire, que ce soit toujours au nom du Seigneur Jésus, rendant par lui grâces à Dieu le Père! Femmes, soyez soumises à vos maris… Maris, aimez vos femmes… Enfants, obéissez en tout à vos parents… Parents, n’exaspérez pas vos enfants, de peur qu’il ne se découragent» (3, 12-21).

Telle est «la  famille formatrice de valeurs humaines et chrétiennes». En elle se pratiquent de nombreuses vertus, réunies et sublimées par la charité; les paroles et les œuvres de chaque jour sont animées par l’Esprit de Jésus et orientées par l’écoute de sa Parole. Les rôles des conjoints, des parents, et des enfants subsistent, mais tous rivalisent dans l’amour et le service  réciproque.

Tous les membres de la famille sont interpellés, car tous doivent participer au développement des valeurs humaines et chrétiennes. Nous ne pouvons pas oublier la responsabilité particulière qui revient aux parents. Leur comportement envers les enfants devrait être semblable à celui manifesté par Marie et Joseph lorsque, selon le récit que nous avons écouté dans l’Evangile, ils trouvent Jésus dans le Temple, après l’avoir perdu.

Marie et Joseph le cherchent avec une indicible préoccupation: «Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela? Vois, ton père et moi, nous te cherchons, angoissés» (Lc 2, 48). Ils aiment leur fils avec passion, de tout leur être.

Et bien, chers parents, aimez vos enfants et faites-leur sentir qu’ils sont aimés et appréciés, respectés et compris. Se sentir aimés suscite la gratitude et la confiance dans les autres, en soi-même et dans l’amour du Père céleste; et c’est un appel à répondre à l’amour par l’amour.

Marie et Joseph vivent dans l’intimité avec Jésus; mais sa personne et son comportement sont toutefois un mystère également pour eux. «Et il leur dit: « Pourquoi donc me cherchiez-vous? Ne saviez-vous pas que je dois être dans la maison de mon Père? » Mais eux ne comprirent pas la parole qu’il venait de leur dire» (Lc 29-50). Marie et Joseph perçoivent que Jésus ne leur appartient pas; il vit pour son véritable Père qui est Dieu et se met complètement à la disposition du projet divin mystérieux. Bien qu’ils ne comprennent pas, ils l’accompagnent avec un amour respectueux et le servent avec sollicitude.

Chers parents, vous aussi, vous devez respecter la personnalité et la vocation de vos enfants, les éduquer et  les aider à développer leurs potentialités cachées et les soutenir afin qu’ils puissent être pleinement eux-mêmes selon le dessein que Dieu a pour leur vie. Prenez soin d’eux comme d’un  don qui vous a été confié sans être possessifs. Un célèbre poète a écrit: «Vos enfants ne sont pas vos enfants… ils voient le jour à travers vous, mais non pas à partir de vous. Et bien qu’ils soient avec vous, ils ne sont pas à vous. Vous pouvez leur donner votre amour, mais pas vos pensées, car ils pensent par eux-mêmes. Vous pouvez accueillir leur corps, mais non leurs âmes,  car les âmes habitent la demeure de demain, que vous ne pouvez visiter, même dans vos  rêves» (K. Gibran, le Prophète).

Un bon rapport éducatif comporte la tendresse et l’affection et, dans le même temps, le raisonnement et l’autorité. Les deux parents, le père et la mère, doivent être  proches de leurs enfants et cultiver le dialogue avec eux. Chers parents, soyez généreux avec vos enfants, sans être permissifs; soyez exigeants sans être durs; soyez clairs avec eux et ne vous contredisez pas; sachez dire oui ou non au moment opportun. Soyez cohérents et donnez-leur le bon exemple. Ainsi, vous  pourrez aider  vos enfants à développer une personnalité équilibrée, active et créatrice, solide et fiable, capable d’affronter les défis et les épreuves de la vie, qui ne manqueront pas.

Une famille fondée sur le mariage monogame et ouvert à la vie est nécessaire en vue de la formation aux valeurs humaines et chrétiennes; une famille unie et stable est nécessaire. Les conjoints qui, en dépit de la fragilité humaine, s’efforcent avec la grâce de Dieu de vivre chaque jour de façon plus cohérente l’amour comme don total de leur vie l’un à l’autre, construisent leur maison sur le roc (cf. Mt 7, 24-25); ils font de leur famille un Evangile vivant; ils édifient l’Eglise et la société civile; ils reflètent dans l’histoire la présence et la beauté de Dieu qui est l’unité de trois Personnes: le Père, le Fils et le Saint Esprit.

Que la Très Sainte Vierge, Notre-Dame de Guadalupe, obtienne cette grâce pour les familles chrétiennes, afin qu’en bénéficient également toutes les familles du monde! O Marie, Mère du bel Amour, Mère de l’espérance, Secours des chrétiens, accueilles ces humbles prières et donne à toutes les familles du monde ce dont elles ont besoin pour grandir dans la sainteté, pour être le sel de la terre et la lumière du monde, pour être des sanctuaires de vie et d’amour, d’accueil et de pardon, de valeurs humaines et de vertus chrétiennes. Amen.

© L’Osservatore Romano en langue française

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ZENIT Staff

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