ROME, Dimanche 26 octobre 2008 (ZENIT.org) – Quarante ans après l’approbation de la loi Fortuna-Baslini, jusqu’à quel point le divorce a-t-il transformé la société italienne ? Que reste-t-il du mariage et de la famille naturelle ? Quelles conséquences le divorce a-t-il sur les enfants et sur le tissu social ? Quelles lois faudrait-il adopter ? Comment les avocats peuvent-ils aider les couples en crise au lieu de les aider à divorcer ?
Un avocat italien, Massimiliano Fiorin, tente de répondre à ces questions dans un livre intitulé « La fabbrica dei divorzi. Il diritto contro la famiglia » (« La fabrique des divorces. Le droit contre la famille ») (Editions San Paolo, 304 pages, 18 Euro).
Massimiliano Fiorin, qui est aussi journaliste, exerce sa profession à Bologne où il est président de la Chambre civile. Zenit l’a interrogé. Nous publions ci-dessous la deuxième partie de cet entretien. Pour la première partie, cf. Zenit du 24 octobre.
Zenit - Quels sont les lieux communs et les préjugés idéologiques qui, selon vous, cachent la réalité des divorces ?
M. Fiorin – Il y a avant tout cette idée qu’un bon divorce vaut toujours mieux qu’un mauvais mariage, notamment lorsqu’il y a conflit entre deux époux en crise. La vraie bête noire des juristes n’est pas tant le divorce en soi, que le conflit que celui-ci engendre. Pour ne pas déranger les opérateurs de la fabrique des divorces, on vit avec l’illusion que pour les enfants il est préférable d’assister à la séparation de leurs parents qu’à leurs disputes. Or aujourd’hui une bonne partie des psychologues et neuropsychiatres doivent admettre que c’est plutôt le contraire qui est vrai.
La blessure que provoque la séparation des parents nuit à l’équilibre psychique des enfants, même chez les sujets qui, en apparence, sembleraient moins touchés. Alors que le fait d’avoir grandi dans un foyer où les parents « ne s’aimaient plus », selon la vision romantique et adolescente tardive du mariage qui a désormais conquis tout le monde, se révèle un facteur d’instabilité psychique beaucoup moins grave.
De plus, mon expérience professionnelle – et pas seulement la mienne – montre que ce sont justement les situations de grand conflit entre époux, ou en tout cas entre parents, qui laissent de plus grandes marges de médiation. Encore faudrait-il convaincre les parties de se laisser aider, au lieu de leur proposer le divorce comme seule et unique panacée.
Zenit – Quelles réformes législatives et culturelles proposeriez-vous pour remédier aux dommages sociaux et individuels des divorces ?
M. Fiorin – D’un point de vue législatif, une perspective intéressante, que certains Etats américains ont déjà adoptée, comme la Louisiane, l’Arkansas et l’Arizona, est celle du « covenant marriage ». Il s’agit d’un nouveau modèle de mariage, selon lequel les époux décident dès le début que leur union sera une alliance pour la vie, et donc qu’ils ne pourront divorcer qu’après avoir fourni des raisons objectives et s’être soumis à une période de médiation familiale.
C’est un modèle de liberté qui favoriserait beaucoup le retour au mariage et à la filiation responsable. Entre temps, comme je sais que cela ne se fera pas dans un avenir proche, dans mon livre je propose de nouveaux modèles de comportement qui, selon moi, pourraient déjà être adoptés par les avocats chargés des questions familiales, pour qu’ils fassent leur travail de manière plus responsable et dans l’optique de mieux aider les couples en crise.
Zenit – Quel est l’objectif ultime de votre livre ? Pourquoi l’avez-vous écrit ?
M. Fiorin – Dans mon expérience d’avocat, je suis arrivé relativement tard à m’occuper du droit de la famille. Encore aujourd’hui je me considère plus un avocat de droit civil qu’un avocat « familialiste » au sens le plus strict du terme. Par choix de conscience, mais aussi de spécialisation personnelle, je m’occupe seulement d’un nombre sélectionné de cas de séparation et de divorce, et là où il est encore possible d’aider les couples en crise à trouver une solution moins dramatique, ou encore plus souvent quand il s’agit de les défendre eux et leurs enfants d’une violente agression à leurs propres droits naturels, perpétrée par les logiques partisanes du divorce.
Ce choix m’a aidé à voir les problèmes de manière plus détachée, beaucoup mieux que n’importe quel autre avocat qui, ne s’occupant que de divorces, de façon peut-être magistrale d’ailleurs, aurait fini par s’adapter à la logique du système, parfois de manière inconsciente.
Propos recueillis par Antonio Gaspari
Traduit de l’italien par Isabelle Cousturié