ROME, Dimanche 27 janvier 2008 (ZENIT.org) – Qu’est-ce qui différencie les chrétiens des non chrétiens dans leur façon d’aider les personnes qui sont dans le besoin ? La charité, pour le chrétien, c’est montrer l’amour de Dieu envers chaque homme et chaque femme, répond le cardinal Paul Josef Cordes, président du Conseil pontifical Cor Unum.
Né à Kirchhundem, en Allemagne, en 1934, le cardinal Cordes, à travers son dicastère, est chargé de coordonner les œuvres catholiques de charité dans le monde entier et de distribuer les aides que le pape décide d’apporter aux populations frappées par les catastrophes naturelles ou les guerres.
Lorsqu’il était évêque auxiliaire de Paderborn, le cardinal Cordes a eu l’occasion de connaître personnellement le cardinal Karol Wojtyla qui, une fois élu pape, l’a appelé à Rome pour le nommer d’abord vice-président du Conseil pontifical pour les laïcs et ensuite président de Cor Unum. En tant que collaborateur de Jean-Paul II, il a également eu l’occasion de travailler avec le cardinal Joseph Ratzinger.
Il le révèle dans cet entretien accordé à ZENIT dont nous publions ci-dessous la première partie.
Zenit – Le Saint-Père vous a confié la direction du Conseil pontifical Cor Unum qui s’occupe de coordonner l’esprit et l’œuvre de charité des institutions de l’Eglise. Quelle est la priorité de votre travail ?
Card. Cordes – Après cette Encyclique Deus caritas est du pape Benoît XVI nous voyons d’une part que faire du bien aux personnes, montrer la bonté de Dieu, nécessite de notre part un engagement consistant, surtout dans les situations de misère, et une grande sensibilité aux besoins des gens ; de l’autre il faut que ces efforts soient faits en lien avec la parole de l’Evangile.
Jésus Christ a toujours fait acte de bonté, joignant à son geste la proclamation de la Parole. Un aspect que le pape aime à souligner comme il l’a montré en voulant rédiger cette encyclique. La première partie insiste beaucoup sur l’importance que Dieu a pour l’homme et je pense que l’Eglise, ou les chrétiens, ont cette importante mission. Les initiatives d’aide sont nombreuses : nous avons la Croix Rouge, nous avons les différentes institutions de l’ONU et celles d’agences philanthropiques. Et tout cela est très bien. Mais si nous regardons les choses d’un point de vue plus spécifiquement chrétien, cela suppose aller au-delà de misère humaine. Souvent l’aide matérielle ne suffit pas. Les difficultés des gens peuvent être telles que leur donner du pain, un toit ou des médicaments ne suffit plus à les aider. Qu’offrir à un moribond, à une femme qui a perdu ses enfants dans un tremblement de terre? On peut encore les consoler, en leur parlant de Dieu qui nous a préparé la vie éternelle. Ce message est très important et nous, fidèles, devons le sauvegarder.
Zenit – L’Eglise catholique étant vaste, comment arrivez-vous à transmettre cet esprit ? Avez-vous des possibilités pour intégrer la dimension de foi dans l’aide offerte par les différentes organisations catholiques dans le monde?
Card. Cordes – En ce moment, nous faisons un peu le tour des conférences épiscopales. J’ai été dans divers pays : en Russie, en Autriche, en Espagne, et je vais en Inde. Il s’agit de faire part aux évêques de cette volonté du pape et de souligner la dimension spirituelle qui doit accompagner toute les aides. Nous le faisons aussi durant leur visite ad limina. Quand l’encyclique Deus Caritas est a été publiée nous avons organisé un grand congrès, et tout cela nous aide. Maintenant nous avons une autre idée, peut-être un peu originale, qui pourrait susciter un peu d’étonnement. Nous avons programmé une grande retraite spirituelle pour les responsables des activités de charité dans les diocèses. Autrement dit,pour les présidents, les directeurs… Et nous voulons commencer avec l’Amérique du nord et l’Amérique du sud.
C’est un pas nouveau. On pourrait se demander à quoi ça sert concrètement. Mais dans un monde aussi pragmatique, et le plus souvent superficiel, pressé et peu sensible, nous devons redécouvrir les racines, un cœur qui écoute et la force de la parole de Dieu. Nous avons invité le père Raniero Cantalamessa, le prédicateur de la Maison pontificale, qui est un grand orateur et un homme de grande expérience. Nous voulons tenir cette retraite à Guadalajara, au Mexique, au début du mois de juin de cette année. Nous voulions un endroit qui soit au centre des deux Amériques, et pour nous rapprocher nous avons choisi le Mexique.
Zenit – Vous avez été créé cardinal par Benoît XVI. Après toute une vie de fidélité à l’Eglise, pouvez-vous nous expliquer comment est née votre vocation à suivre le Christ quand vous étiez jeune.
Card. Cordes – Oui, j’ai une longue histoire, c’est vrai. Mes parents tenaient un cinéma, un restaurant et un hôtel. Je suis donc né dans un milieu pas très protégé, disons très normal. Ma famille a probablement été un peu surprise quand j’ai voulu entreprendre des études de théologie et devenir prêtre. Derrière tout cela, il y avait la prière fervente d’une religieuse, qui habitait dans ma petite ville, et qui priait pour moi depuis toujours afin que le Seigneur fasse de moi un prêtre… mais sans jamais m’en parler. Elle ne m’a jamais demandé si je le voulais. Et quand je l’ai su, cela ne m’a pas plu du tout. Je suis donc allé chez elle pour le lui dire. Mes reproches la faisaient rire. Ce jour-là nous avons fait un pacte : chaque fois que j’aurais quelque chose de difficile à faire, je lui écrirais et je ferais appel à ses prières. Je suis convaincu que ce sont les prières de cette religieuse qui ont fait naître ma vocation.
Zenit – Puis votre vocation vous a conduit à devenir prêtre et évêque et vous avez connu le cardinal Karol Wojtyla. Quand vous êtes-vous rencontrés pour la première fois et comment étaient vos relations ?
(A suivre)