ROME, Mardi 23 janvier 2007 (ZENIT.org) – L’assassinat du journaliste turc Hrant Dink est un coup porté non seulement à la personne, mais également à toute la société turque, a dénoncé le nonce apostolique à Ankara, Mgr Antonio Lucibello.
Hrant Dink est tombé sous les coups d’une arme à feu vendredi dernier à Istanbul, alors qu’il sortait de la rédaction de l’hebdomadaire « Agos », qu’il a fondé et dont il était le directeur. Il avait 53 ans.
« Turquie : deuil, indignation et inquiétudes pour l’assassinat de Dink » : tel est le titre de l’édition de dimanche du quotidien officiel du Vatican, « L’Osservatore Romano ».
C’est aussi la réaction suscitée, non seulement dans le pays, mais sur tout le continent européen, suite au crime perpétré contre le « journaliste Hrant Dink, célèbre pour ses dénonciations, qualifiées par de nombreuses parties comme le ‘génocide des arméniens’ au cours de la Première Guerre mondiale ».
Dink avait fait l’objet de procès pour atteinte à l’identité turque, sur la base d’une loi controversée que l’Union européenne a demandé à Ankara d’abroger ou de modifier, rappelle le quotidien du Vatican.
Le journaliste assassiné faisait partie des intellectuels « qui soutenaient la nécessité d’une discussion sur la mort », en Turquie, « d’un million et demi d’Arméniens » ; « il était d’origine arménienne » et « Agos » était publié en turc et en arménien.
Dink « était pour ainsi dire le symbole des Arméniens de Turquie », et « son engagement l’avait amené à plusieurs reprises à être la cible de dures menaces de la part des ultras nationalistes turcs », explique Antonio Ferrari du « Corriere della Sera » – à Radio Vatican.
« Ce n’est pas seulement un corps qui a été touché mais tout le tissu de la société turque, à un moment ou se consolide la démocratie et où l’on cherche une voie de communion entre les différentes composantes du pays », dénonce le nonce apostolique à Ankara, Mgr Antonio Lucibello, selon l’agence AsiaNews de l’Institut pontifical des missions étrangères.
« Précisément au cours de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens – ajoute le prélat – nous ne pouvons pas ne pas nous unir au deuil de nos frères, en montrant notre solidarité et notre proximité », ajoute-il.
« Nous espérons de tout cœur que cet acte ne portera pas atteinte au climat pacifique et détendu qui s’était installé avec la visite du pape – a-t-il affirmé – aussi bien parmi les fidèles que parmi les responsables des diverses religions et confessions chrétiennes présentes sur le territoire turc ».
L’après-midi de l’assassinat, 10.000 personnes se sont données rendez-vous à Taksim, la place la plus célèbre d’Istanbul, et sont restées là toute la nuit en signe de douleur pour la disparition du journaliste d’origine arménienne. Il en a été de même sur les principales places d’Ankara, de Burse et de Smyrne, où l’on a noté la présence spontanée de près de 150.000 personnes, comme l’indique l’agence du PIME.
Face à cet « assassinat barbare, déloyal et vil », le patriarche arménien Mesrob II a annoncé quinze jours de deuil : ils seront vraisemblablement observés par les 80.000 Arméniens de Turquie et par ceux de la diaspora.
Les funérailles du journaliste ont été célébrées ce mardi à Istanbul. Dans la matinée a eu lieu le rite civil qui a été suivi des funérailles religieuses dans l’Eglise arménienne de Kumkapi, dédiée à Marie Mère de Dieu, siège du patriarcat arménien.
L’assassin présumé du journaliste a été arrêté et a confessé son délit. Il s’agit de Ogun Samast, qui aura 18 ans à la fin du mois.
Selon l’agence du PIME, ce dernier ne montre aucun sentiment de repentir pour le crime commis (il se sent « blessé par les paroles du journaliste arménien »). Il est originaire de Trébizonde, ville où a été assassiné le prêtre italien, Andrea Santoro l’an dernier.