On ne peut séparer la dimension religieuse de la dimension matérielle de l’homme

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Homélie du dimanche 30 juillet, du père Raniero Cantalamessa

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ROME, Vendredi 28 juin 2006 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le commentaire de l’Evangile de ce dimanche, proposé par le père Raniero Cantalamessa OFM Cap, prédicateur de la Maison pontificale.

Evangile de Jésus Christ selon saint Jean 6, 1-15

Après cela, Jésus passa de l’autre côté du lac de Tibériade (appelé aussi mer de Galilée). Une grande foule le suivait, parce qu’elle avait vu les signes qu’il accomplissait en guérissant les malades. Jésus gagna la montagne, et là, il s’assit avec ses disciples. C’était un peu avant la Pâque, qui est la grande fête des Juifs. Jésus leva les yeux et vit qu’une foule nombreuse venait à lui. Il dit à Philippe : « Où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ? » Il disait cela pour le mettre à l’épreuve, car lui-même savait bien ce qu’il allait faire. Philippe lui répondit : « Le salaire de deux cents journées ne suffirait pas pour que chacun ait un petit morceau de pain. » Un de ses disciples, André, le frère de Simon-Pierre, lui dit : « Il y a là un jeune garçon qui a cinq pains d’orge et deux poissons, mais qu’est-ce que cela pour tant de monde ! » Jésus dit : « Faites-les asseoir. » Il y avait beaucoup d’herbe à cet endroit. Ils s’assirent donc, au nombre d’environ cinq mille hommes. Alors Jésus prit les pains, et, après avoir rendu grâce, les leur distribua ; il leur donna aussi du poisson, autant qu’ils en voulaient. Quand ils eurent mangé à leur faim, il dit à ses disciples : « Ramassez les morceaux qui restent, pour que rien ne soit perdu. » Ils les ramassèrent, et ils remplirent douze paniers avec les morceaux qui restaient des cinq pains d’orge après le repas.
A la vue du signe que Jésus avait accompli, les gens disaient : « C’est vraiment lui le grand Prophète, celui qui vient dans le monde. » Mais Jésus savait qu’ils étaient sur le point de venir le prendre de force et faire de lui leur roi ; alors de nouveau il se retira, tout seul, dans la montagne.

© AELF

Ramassez les morceaux qui restent

Cinq dimanches consécutifs, l’Evangile est constitué d’un passage du discours sur le pain de vie tenu par Jésus dans la synagogue de Capharnaüm repris par l’évangéliste Jean. Le passage de ce dimanche est celui de l’épisode de la multiplication des pains et des poissons qui introduit le discours sur l’Eucharistie.

Ce n’est pas un hasard que la présentation de l’Eucharistie commence par le récit de la multiplication des pains. On fait ainsi comprendre que l’on ne peut séparer, en l’homme, la dimension religieuse de la dimension matérielle ; que l’on ne peut pourvoir à ses besoins spirituels et éternels sans, dans le même temps, se préoccuper de ses besoins terrestres et matériels.

C’est précisément la tentation qu’ont eu les apôtres. Dans un autre passage de l’Evangile, on lit qu’ils suggérèrent à Jésus de congédier la foule afin qu’elle aille se procurer à manger dans les villages des alentours. Mais Jésus répondit : « Donnez-leur vous-mêmes à manger ! » (cf. Mt 14, 16). En disant cela Jésus ne demande pas à ses disciples de faire des miracles. Il leur demande de faire ce qu’ils peuvent. De mettre en commun et de partager ce que chacun possède. En arithmétique, la multiplication et la division sont deux opérations opposées, mais ici, elles représentent la même chose. Il n’y a pas de « multiplication » sans « division » (ou partage) !

Ce lien entre le pain matériel et le pain spirituel était visible dans la manière dont était célébrée l’Eucharistie dans les premiers temps de l’Eglise. La cène du Seigneur, alors appelées agape, se déroulait dans le cadre d’un repas fraternel au cours duquel on partageait aussi bien le pain de tous les jours que le pain eucharistique. Les différences entre celui qui n’avait rien à manger et celui qui avait « trop bu » (cf. 1 Co 11, 20-22) apparaissaient ainsi comme scandaleuses et intolérables. Aujourd’hui on ne célèbre plus l’Eucharistie dans le cadre d’un repas pris ensemble, mais l’écart entre celui qui possède le superflu et celui qui n’a pas le minimum nécessaire n’a pas diminué, il a même pris des dimensions planétaires.

La fin du récit a également quelque chose à nous dire sur ce point. Lorsque tous ont mangé, Jésus ordonne : « Ramassez les morceaux qui restent, pour que rien ne soit perdu ». Nous vivons dans une société où le gaspillage est généralisé. En l’espace de cinquante ans, nous sommes passés d’une situation où l’on allait à l’école ou à la messe du dimanche en tenant jusqu’au seuil, les chaussures à la main pour ne pas les user, à une situation où l’on jette des chaussures presque neuves pour s’adapter à la mode qui change.

Le gaspillage le plus scandaleux se produit dans le secteur de l’alimentation. Selon une enquête réalisée par le ministère de l’agriculture américain, un quart des produits alimentaires finit chaque jour à la poubelle, sans parler des produits détruits délibérément avant qu’ils n’arrivent sur le marché. Jésus n’a pas dit ce jour-là : « Détruisez ce qui reste pour que le prix du pain et du poisson ne baisse pas sur le marché ». Mais aujourd’hui c’est précisément ce que l’on fait.

Sous l’effet d’une publicité tapageuse, « consommer, ne pas économiser » est aujourd’hui le mot d’ordre en économie. Il ne suffit certes pas d’épargner. L’oncle Picsou était un grand épargnant mais ce n’est certes pas l’idéal vers lequel nous pousse l’Evangile. L’épargne doit permettre aux individus et aux sociétés des pays riches d’aider plus généreusement les pays pauvres. Sinon, c’est davantage de l’avarice que de l’épargne !

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ZENIT Staff

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