ROME, Mardi 17 janvier 2006 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral du discours que le pape a adressé hier lundi au grand rabbin de Rome, Riccardo Di Segni, qu’il recevait pour la première fois en audience.
Illustre grand Rabbin, chers amis, Shalom !
«L’Eternel est ma force et mon chant, je lui dois mon salut» (Exode 15, 22) » : c’est ce qu’a chanté Moïse avec les fils d’Israël, lorsque le Seigneur sauva son peuple à travers la mer. De la même façon, Isaïe chante : «Voici le Dieu de mon salut, j’ai confiance, je ne crains pas, parce que ma force et mon chant c’est le Seigneur, c’est lui mon salut» (Isaïe 12,2). Votre visite me procure une grande joie et me pousse à renouveler avec vous ce même cantique de gratitude pour le salut obtenu. Le peuple d’Israël a été libéré à différentes reprises de la main de ses ennemis, et au cours des siècles de l’antisémitisme, dans les moments dramatiques de la Shoah, la main du Tout Puissant l’a soutenu et guidé. La prédilection du Dieu de l’Alliance l’a toujours accompagné en lui donnant la force de surmonter les épreuves. De cette attention divine pleine d’amour, votre communauté juive, présente dans la ville de Rome depuis plus de deux mille ans, peut elle aussi rendre témoignage.
L’Eglise catholique est proche de vous et est une amie. Oui, nous vous aimons, et nous ne pouvons pas ne pas vous aimer, à cause des Pères : par eux, vous nous êtes des frères très chers et préférés (cf. Epître de saint Paul aux Romains 11, 28b). Après le Concile Vatican II, cette estime et cette confiance réciproques n’ont cessé de grandir. Des contacts toujours plus fraternels et plus cordiaux se sont développés, et ils se sont intensifiés pendant le pontificat de mon vénéré prédécesseur Jean-Paul II.
Dans le Christ, nous avons part à votre héritage même des Pères, pour servir le Tout Puissant, « sous le même joug » (Livre du prophète Sophonie 3, 9), greffés sur le même saint tronc (cf. Isaïe 6, 13; Romains 11, 16) du Peuple de Dieu. Cela nous rend, nous, chrétiens, conscients qu’avec vous, nous avons la responsabilité de coopérer au bien de tous les Peuples, dans la justice et la paix, dans la vérité et dans la liberté, dans la sainteté et dans l’amour. A la lumière de cette mission commune, nous ne pouvons pas ne pas dénoncer et combattre avec décision la haine et les incompréhensions, les injustices et les violences, qui continuent de semer la préoccupation dans l’âme des hommes et des femmes de bonne volonté. Dans ce contexte, comment ne pas ressentir douloureusement et ne pas être préoccupés par de nouvelles manifestations d’antisémitisme qui se manifestent ici et là ?
Monsieur le grand Rabbin, depuis peu vous a été confiée la conduite spirituelle de la communauté juive de Rome ; Vous avez assumé cette responsabilité riche de votre expérience comme chercheur et comme médecin, qui a partagé les joies et les souffrances de tant de personnes. Je forme de tout cœur des vœux fervents pour votre mission. Je vous assure de mon estime et de mon amitié cordiale, et de celle de mes collaborateurs. Les urgences et les défis sont si nombreux, à Rome et dans le monde, qu’ils nous poussent à unir nos mains et nos cœurs pour des initiatives de solidarité concrète, de tzedek (justice) et de tzedekah (charité). Nous pouvons collaborer ensemble pour transmettre la flamme du Décalogue et de l’espérance aux jeunes générations.
Que l’Eternel veille sur vous et sur toute la communauté juive de Rome ! En cette circonstance singulière, je fais mienne la prière du pape Clément Ier, en invoquant les bénédictions du Ciel sur vous tous : « Donne la concorde et la paix à tous les habitants de la terre, comme tu les a données à nos pères, lorsqu’ils t’ont invoqué pieusement dans la foi et la vérité » (Lettre aux Corinthiens 60,4). Shalom !
[Texte original : italien – Traduction réalisée par Zenit]