Espagne: Les évêques pourraient excommunier les terroristes de l´ETA

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El Mundo aujourd´hui

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ROME, Dimanche 8 avril 2001 (ZENIT.org) – Les évêques catholiques espagnols, sur proposition de l´archevêque de Madrid, le cardinal Antonio María Rouco Varela, envisagent d´excommunier les terroristes de l´ETA, ipso facto, c´est ce que rapporte aujourd´hui le quotidien espagnol El Mundo.

La décision pourrait être prise lors d´une réunion de l´épiscopat espagnol, le mardi 24 avril, comme ultime mesure pour essayer d´enrayer le terrorisme. Elle aurait l´aval de Rome.

Dans l´après-midi du 24 avril se réuniront en effet à Madrid en assemblée plénière, les 68 évêques diocésains, 17 auxiliaires et 32 émérites d´Espagne: une « session réservée », c´est-à-dire secrète.

A l´ordre du jour, toujours selon la même source, le projet d´édition d´un recueil des paroles et des actes de l´Eglise catholique contre le terrorisme depuis 50 ans. Une décision sans grosse difficulté.

Mais ce qui sera plus difficile, ce sera le vote à main levée pour ou contre l´excommunication des membres de l´organisation nationaliste basque ETA, dont les actes de terrorisme continuent d´ensanglanter le pays. La décision sera prise à la majorité absolue des 85 évêques ayant droit de vote (les émérites pouvant prendre la parole mais pas voter).

L´Eglise espagnole répondrait ainsi de façon éclatante, commente le quotidien espagnol, aux accusations de « tiédeur » lancées contre elle par des personnalités politiques ou des mass media.

« L´activité terroriste est un délit très grave contre la vie et la liberté », explique au quotidien l´archevêque José Manuel Estepa, Ordinaire militaire d´Espagne, qui s´appuie sur les cas prévus par le droit canon pour appuyer le projet d´excommunication. Il souligne qu´en dépit de la sécularisation du Pays basque espagnol, les membres de l´ETA n´en sont pas moins tous baptisés dans l´Eglise catholique (leurs familles continuent de fréquenter les sacrements) et certains sont eux-mêmes encore pratiquants. Et de citer une liste de noms où apparaît tel ancien séminariste ou tel ancien Jésuite. La langue officielle de l´Eglise au pays basque est le Basque et 40% de la population est pratiquante, participant à la messe au moins une fois par semaine.

Les évêques basques seraient favorables à la mesure, qui interdirait ipso facto non seulement la fréquentation des sacrements mais aussi éventuellement des funérailles chrétiennes.

Mgr Sebastián, archevêque de Pamplune est déterminé: «Nous sommes prêts à lutter contre le terrorisme même au prix de la vie. Mais nous devons le faire au nom de Dieu et de l´Evangile du Christ, sans nous soumettre au diktat d´un pouvoir humain, quel qu´il soit ». En effet, les évêques craignent une récupération politique de leur décision.

L´archevêque de Valencia, Agustín García-Gasco, ne dit pas autre chose: « Devant la logique corrosive des terroristes de l´ETA, ni les demi-paroles ni la neutralité ne tiennent ».

En 1998 déjà, le cardinal Rouco Varela avait déclaré: « Qui tue son frère délibérément s´excommunie de l´Eglise au sens le plus profond de la parole. L´assassinat, d´autant plus lorsqu´il est calculé et exécuté comme une opération purement stratégique, est un péché public gravissime, une action qui entraîne d´elle-même l´excommunication ».

L´effet d´une telle mesure devrait d´abord être « pédagogique ». Selon un canoniste réputé, José María Díaz Moreno, « l´effet de dissuasion de l´excommunication sur les terroristes, sera hélas pratiquement nul. Mais il faut savoir qu´en plus de l´effet dissuasif, les lois ont un effet pédagogique et exemplaire. Il s´agit aussi de dire encore plus clairement le jugement de l´Eglise sur la gravité extrême du terrorisme ».

Mais quelle forme juridique cette excommunication devra-t-elle prendre? Les évêques entendraient adopter une excommunication « latae sententiae », c´est-à-dire « ipso facto », automatiquement, sans qu´il y ait besoin d´une sentence ultérieure, pour tout baptisé qui commet un attentat et pour tout complice éventuel.

La dernière excommunication prononcée en Espagne remonte à 1951. L´archevêque de Séville, le cardinal Pedro Segura, avait excommunié Francisco de la Torre Pineda, un « voyant » pour avoir fondé sans autorisation une association mariale. Lors de Pâques, en 1940, l´archevêque avait pensé excommunier le gouverneur de la ville, Tomás y Valverde, qui avait fait peindre des insignes phalangistes sur la façade du palais épiscopal. Rome avait déconseillé. Le général Franco avait destitué le gouverneur.

En dehors de l´Espagne, l´évêque mexicain Cuernavaca a prononcé une excommunication, le 17 avril 1981, contre tout baptisé qui pratique la torture. En 1998, le cardinal archevêque de Mexico, Norberto Rivera, a lui-même excommunié les baptisés qui commettent le délit d´enlèvement de personnes. Le 30 juillet 1999, l´archevêque de Cali (Colombie), Isaías Duarte, a excommunié les guérilleros de l´Armée de Libération nationale (ELN) pour « l´enlèvement sacrilège » de plus de 50 fidèles qui assistaient à la messe. En juillet 2000, les évêques mexicains de Sonora et Baja California ont excommunié les trafiquants de drogue.

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ZENIT Staff

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