Père Marie-Eugène © Notre-Dame de Vie

Père Marie-Eugène © Notre-Dame de Vie

Un miracle dû à la prière du Père Marie-Eugène, par le P. Menvielle

Il est «resté Carme jusqu’au bout»

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Fondateur, de l’Institut Notre-Dame de Vie, « le Père Marie-Eugène est resté Carme jusqu’au bout », explique le P. Louis Menvielle, de cet institut, qui présente le fondateur aux lecteurs de Zenit au moment où Rome vient de reconnaître le miracle qui permettra sa béatification : la guérison d’un petit bébé.
Le pape François a en effet autorisé la Congrégation pour les causes des saints à publier un décret authentifiant un miracle comme dû à l’intercession du Père carme français Marie-Eugène de l’Enfant Jésus, né Henri Grialou (1894-1967).
Les 12 décrets approuvés par le pape François jeudi 3 mars, sont publiés ce 4 mars par le Saint-Siège, en pleine célébration des « 24 heures pour le Seigneur », au cœur du Jubilé de la miséricorde, ce qui n’est pas sans rapport avec le message du futur bienheureux car le P. Marie-Eugène disait : « Oui, j’ai compris la miséricorde : sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus en a senti la douceur, j’en sens la puissance. »
Le père Menvielle raconte aussi quel a été le « miracle » retenu par la cause de béatification et il évoque le chef d’œuvre du P. Marie-Eugène : « Je veux voir Dieu ».
Quel est le miracle qui vient d’être reconnu ?
Déjà de son vivant, on disait de lui qu’il était un saint. Depuis sa mort, sa réputation de sainteté n’a cessé de grandir et de s’élargir à la dimension du monde. L’Archevêque d’Avignon a ouvert sa cause en 1985. L’enquête diocésaine s’est terminée en 1994. Le pape Benoît XVI l’a déclaré Vénérable en décembre 2011 et le pape François a autorisé hier la Congrégation pour la cause des Saints à signer le décret sur le miracle.
Il s’agit d’un enfant qui naît dans les années 80 avec de gros kystes. Il est opéré à 11 jours, puis de nouveau en urgence à 2 semaines. Quelques jours plus tard, le chirurgien constate un écoulement important, qui provient d’une plaie du canal thoracique. L’enfant se trouve dans un état grave de malnutrition (3kg200, à 28 jours). Les médecins sont inquiets : la vie de l’enfant est en danger. La maman note dans son journal : « il faudrait un miracle »… C’est ce miracle que la grand-tante de l’enfant va implorer dans sa prière par l’intercession du Père Marie-Eugène, le jour où elle reçoit une lettre des parents lui annonçant que la situation est sans issue. Or, c’est précisément ce jour-là que, sans explication et sans aucun signe prémonitoire d’amélioration, l’écoulement qui ne cessait pas s’arrête soudainement. La maman écrit le jour même : « le miracle a eu lieu aujourd’hui ». Le lendemain, les médecins constatent que l’enfant est vraiment guéri. Il commence à prendre du poids, « comme un avion qui décolle », selon les médecins. Trois jours après, il peut rentrer à la maison. Depuis, il est en parfaite santé.
Qui est le Père Marie-Eugène ?
C’est une grande figure du vingtième siècle, dont l’action va de la première guerre mondiale à l’immédiat après Concile. Il est né en 1894 et est mort en 1967. La première guerre le marque profondément et le révèle dans son humanité. C’est un chef qui sait voir le positif dans le cœur de l’homme, même celui du plus délinquant (il a dû commander une section de repris de justice). La guerre a été aussi l’expérience forte de la protection de Thérèse de Lisieux qu’il avait découverte à l’âge de 13 ans. Une amitié profonde les a liés et le Père Marie-Eugène est désormais compté « parmi ses disciples les plus importants au XX e siècle… et pour les temps à venir » (Mgr Guy Gaucher). Il a vu dès le départ que, sous des expressions toutes simples et parfois enfantines, elle a un message pour le monde, encore plus d’actualité en cette année de la Miséricorde : Thérèse a découvert que Dieu a de la joie à répandre sa Miséricorde. Toute sa vie a été une réponse à ce désir de Dieu ; elle s’est livrée à la Miséricorde et elle a enseigné comment le faire. Le Père Marie-Eugène a dégagé les axes spirituels qui permettent aux personnes les plus simples de marcher concrètement à la suite de Thérèse. Le petit recueil de conférences Ton amour a grandi avec moi présente bien cette spiritualité.
Son live « Je veux voir Dieu » est mondialement connu …
Ordonné prêtre en 1922, il est entré immédiatement au Carmel car il avait été saisi par la personnalité et la grâce de saint Jean de la Croix. Son contact avec sainte Thérèse d’Avila a aussi été décisif. En lisant ces trois grands Docteurs de l’Eglise, en vivant ce qu’ils enseignent, en plongeant dans la vie et le charisme du Carmel, il est devenu un contemplatif de haute volée, vrai connaisseur du mystère de Dieu. Quelques confidences de lui : « La paternité de Dieu, c’est ineffable » ; « Jésus, chaque minute qui passe me permet de t’aimer davantage » ; « Tout le monde a remarqué probablement, que quand je parle de l’Esprit Saint, ordinairement je m’enflamme assez facilement… (…) Je l’appelle ‘mon Ami’, et je crois que j’ai des raisons pour cela. Toute ma vie a été un petit peu basée là-dessus : sur la connaissance, sur la découverte de l’Esprit Saint ». La relation à Dieu conduit à se donner complètement à lui et à devenir docile sous l’action de l’Esprit Saint qui veut nous prendre tous pour construire l’Eglise avec lui. Le Père Marie-Eugène a cherché et trouvé comment unir contemplation et action dans la vie quotidienne. Il a écrit son maître ouvrage, Je veux voir Dieu, pour prendre ses lecteurs par la main et les conduire d’une manière pédagogique jusqu’à la sainteté selon la spiritualité des Maîtres du Carmel qu’il a enrichie de sa propre expérience. Je veux voir Dieu donne des clés précieuses pour la prière, pour la vie spirituelle en général, pour devenir apôtre et témoin de Dieu, pour participer à la mission comme collaborateur de l’Esprit. Ce livre, publié dans les années 50, a connu un succès notable. Il est aujourd’hui traduit en six langues. Au début de l’enquête diocésaine, le Général des Carmes a écrit que Je veux voir Dieu est une « somme de théologie spirituelle, (…) un chef-d’œuvre qui met l’auteur parmi les grands maîtres de spiritualité que Dieu a donnés à l’Église par le Carmel ».
Le Père Marie-Eugène, c’est d’abord un fondateur ?
Dès le début de sa vie religieuse, il a eu l’intuition qu’il lui fallait diffuser cet enseignement du Carmel qui correspond si bien à l’attente du monde moderne. En même temps la déchristianisation éloignait les gens des églises et des couvents. Il faut les rejoindre là où ils sont. C’est ainsi qu’est né l’Institut Notre-Dame de Vie : se plonger d’abord deux années dans une vie de prière intense pour faire l’expérience de Dieu et se laisser guider par l’Esprit, puis partir à la rencontre de nos contemporains, sur leur lieu de vie et de travail, pour témoigner que Dieu est vivant et qu’il veut le bonheur de tous, pour conduire chacun à la rencontre avec Lui et à la merveilleuse aventure de la mission sous sa lumière et sa grâce. Le fondateur a dit un jour : « des âmes qui cherchent Dieu, il y en a partout. Ah ! Comme je voudrais les rejoindre toutes et leur parler de l’Amour infini. »
Aujourd’hui, Notre-Dame de Vie, c’est un Institut séculier avec trois branches : féminine et masculine laïques, et sacerdotale, présentes sur quatre continents. C’est aussi un groupe assez consistant de foyers qui veulent vivre de cet esprit. Les membres vivent et travaillent de façon isolée ou bien ensemble. C’est ainsi que l’Institut dirige des écoles en divers pays et qu’il existe le Studium de Notre-Dame de Vie, près de Venasque, qui forme des prêtres d’origines diverses et donne aussi la licence canonique de théologie en lien avec la faculté romaine des Carmes, le Teresianum.
Fondateur, le Père Marie-Eugène est resté Carme jusqu’au bout : il a exercé de nombreuses responsabilités dans son Ordre, en particulier Vicaire Général en remplacement du Général qui était décédé. Il s’est beaucoup investi en faveur des Carmélites et a été nommé par Pie XII Visiteur Apostolique des Carmels de France en 1948. Le Pape lui a ensuite demandé de créer les Fédérations des Carmels de France.
Quelle est la « mission » aujourd’hui du futur bienheureux ?
Le Père Marie-Eugène est une personnalité extrêmement riche qui ressort assez bien de la biographie que Mgr Guy Gaucher a écrite de lui. Sa mission est celle d’un père et d’un maître. Un père d’abord, car sa vie de foi et de prière l’a fait entrer dans le cœur de Dieu où il s’est laissé transformer en bonté. Nous recevons d’innombrables témoignages de cette bonté de la part de personnes de tous pays, qui l’ont prié pour une impressionnante variété de besoins : vie spirituelle, vocation, baptême d’enfants, conversions, éducation des jeunes, problèmes de drogue ou d’alcool, problèmes de couple, naissance d’enfants, accidents, maladies, chômage et problèmes financiers, etc. etc. Combien d’enfants s’appellent Eugène ou Henri (son nom de baptême) à cause de lui. C’est un père car il est très proche des personnes, en particulier des plus petits et des plus pauvres. Je note aussi une proximité toute spéciale avec son terroir familial, l’Aveyron. Le miracle que nous avons présenté pour sa béatification est l’une parmi plusieurs guérisons étonnantes qui nous ont été communiquées.
Et c’est un maître. J’en ai déjà parlé. Son enseignement est pratique et universel. Il a su exprimer les réalités spirituelles de manière très simple, souvent imagée. Les témoignages que nous recevons sont unanimes : chacun peut s’y retrouver et recevoir la lumière dont il a besoin. C’est d’autant plus frappant que ces témoignages proviennent aussi bien de grands intellectuels que de personnes très simples, sans culture. En plus de Je veux voir Dieu, qui est abordable par tous, nous avons publié un certain nombre de conférences dont le style est vivant. Il est probable que l’impact qu’il exerce par son enseignement provienne en partie de sa correspondance avec celui du Concile. L’ancien Théologien de la Maison Pontificale, le cardinal Georges Cottier, l’avait noté dans la préface de la traduction italienne de Je veux voir Dieu : « Après pratiquement un demi-siècle, il n’a rien perdu de son actualité. Écrit à la veille du Concile Vatican II, il en anticipe pour ainsi dire l’enseignement. Je pense avant tout au chapitre V de la Constitution dogmatique Lumen gentium sur la vocation universelle à la sainteté dans l’Église ».
Propos recueillis par Anita Bourdin

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Louis Menvielle

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