La crise des réfugiés et les négociations de paix au Moyen-Orient ont été au centre des entretiens du président turc Erdogan au Vatican, indique le Saint-Siège dans un communiqué publié en italien, anglais, et en espagnol.
Dialogue et droits humains
Le Président de la République de Turquie M. Recep Tayyip Erdogan, a été reçu en audience privée par le pape François, au Palais apostolique du Vatican, dans la bibliothèque des réceptions officielles, ce lundi matin, 5 février 2018.
C’était la première visite d’un président turc depuis 1959. L’entretien privé a duré plus de 50 minutes, en présence de leurs deux interprètes : plus qu’il n’était prévu. Le président a évoqué notamment le voyage du pape François en Turquie en 2014.
« Je vous remercie beaucoup de votre intérêt » a dit le président en saluant le pape à son arrivée, en présence de la presse, dans la salle du « Tronetto » : « Merci de votre visite » a répondu le pape.
Les mots-clefs du communiqué sont : « paix », « stabilité », « dialogue », « négociation », « droits de l’homme » et « légalité internationale ».
Le président turc a ensuite rencontré le cardinal Pietro Parolin, Secrétaire d’Etat, accompagné de Mgr Paul Richard Gallagher, Secrétaire pour les relations avec les Etats.
Au terme de ces discussions “cordiales”, le Vatican indique que “les relations bilatérales entre le Saint-Siège et la Turquie ont été évoquées”.
L’ange de la paix
Il a aussi été question, toujours selon la même source de “la situation du pays”, de “la situation de la communauté catholique”, de “l’engagement à accueillir les nombreux réfugiés” et des “défis qui y sont liés”.
Les entretiens se sont ensuite “centrés sur la situation au Moyen-Orient, en particulier sur le statut de Jérusalem”. A ce propos la Turquie et le Vatican sont opposés à la décision des Etats-Unis, annoncée en décembre dernier, d’installer leur ambassade à Jérusalem au lieu de Tel-Aviv. Le président turc avait alors parlé au téléphone avec le pape François.
Le Vatican ajoute ces conditions significatives: “soulignant la nécessité de promouvoir la paix et la stabilité dans la région par le dialogue et la négociation, en respectant les droits de l’homme et la légalité internationale”.
Les journalistes admis au « pool » dans le bureau ont constaté le climat « cordial ».
Au moment de l’échange traditionnel de cadeaux, le pape François a offert au président turc un médaillon de bronze représentant l’Ange de la paix embrassant les deux hémisphères du globe terrestre, et repoussant le dragon de la division. Le pape a commenté, avec l’aide d’un interprète : « C’est l’Ange de la paix qui étrangle le démon de la guerre : le symbole d’un monde fondé sur la paix et la justice. » Une oeuvre du sculpteur italien Guido Veroi (1926-2013), portant l’inscription : « Un monde de solidarité et de paix fondé sur la justice ».
Le pape a aussi offert au président une gravure représentant la basilique Saint-Pierre, son encyclique sociale « Laudato si’ » et son message pour la Journée mondiale de la paix 2018.
Le président, qui a notamment offert une céramique représentant Istanbul, était accompagné de sa femme, Mme Emine Erdogan, de leur fille Esra, et de leur gendre, Berat Albayrak, ministre de l’Energie et des ressources naturelles.
« De vous aussi, une prière »
Dans la suite présidentielle en tout quatre femmes voilées, et deux non-voilées, mais aussi , le ministre des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, le ministre de l’Economie, Nihat Zeybekci, le ministre de la Défense, Nurettin Canikli, le ministre pour les Affaires européennes, Omer Celik, et l’ambassadeur de Turquie près le Saint-Siège, M. Mehmet Pacaci, qui avait été rappelé en Turquie par le président en 2005, quand le pape François a désigné le massacre des Arméniens par la Turquie de 1915 comme « un génocide ». Le pape a échangé quelques mots avec l’ambassadeur lors des présentations protocolaires.
Au moment de se retirer, Mme Erdogan a dit en anglais « un plaisir de vous avoir rencontré ». Et au moment de l’au-revoir, le pape a certainement conclu par sa demande que l’on prie pour lui parce que le président a ajouté : « Nous aussi nous attendons de vous une prière ».
Après la rencontre avec le cardinal Parolin et Mgr Gallagher, le couple présidentiel a visité la basilique Saint-Pierre.
La veille, l’ambassade de Turquie en Italie avait évoqué des thèmes à l’ordre du jour : les relations entre la Turquie et le Vatican, Jérusalem, les « problèmes régionaux », la « tragédie humanitaire en Syrie », la « lutte contre le terrorisme, la xénophobie et l’islamophobie ».
Des heurts à Rome
Au moment de cette visite « historique », et depuis le 20 janvier 2018, de violents affrontements se poursuivent entre les forces turques et les combattants kurdes dans l’enclave d’Afrine, au nord-ouest de la Syrie, pilonnée par les frappes aériennes, et où les blessés continuent d’affluer dans les hôpitaux, selon les agences internationales, provoquant la fuite de quelque 15 000 civils, notamment vers Alep.
A Rome, à l’occasion de la visite, des heurts ont éclaté entre la police et quelque 150 manifestants, dont des Kurdes et des associations italiennes, dans les environs du Château Saint-Ange, au bord du Tibre. Des sources italiennes parlent du déploiement de plus de 3 000 membres des forces de l’ordre pour assurer la sécurité de la visite du président turc à Rome : il devait rencontrer dans l’après-midi le président Sergio Mattarella et le président du Conseil, Paolo Gentiloni.
C’est en 1959 que le président turc Celal Bayar s’était rendu au Vatican pour rencontrer le saint pape Jean XXIII, Délégué apostolique en Turquie de 1934 à 1943: Mgr Angelo Roncalli avait commencé à apprendre le turc à cette occasion.
Visite du président Erdogan 05/02/2018 © Vatican Media
Turquie: le président Erdogan au Vatican
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