Tadeusz Mazowiecki: On ne peut pas exclure les croyants de la construction européenne

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L´ancien premier ministre polonais commente la déclaration de Jean-Paul II

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ROME, lundi 14 janvier 2002 (ZENIT.orgAVVENIRE) – L´avertissement lancé par Jean-Paul II devant l´exclusion des communautés de croyants de la rédaction de la Convention européenne, doit être pris au sérieux, affirme Tadeusz Mazowiecki, ancien premier ministre polonais et grand promoteur de la nouvelle Europe.

Ami de Karol Wojtyla et premier chef d´un gouvernement démocratique dans un pays du bloc communiste en 1989, Tadeusz Mazowiecki a toujours regardé la construction de l´Europe avec beaucoup d´intérêt. Fondateur et actuel président de l´Institut Robert Schuman à Varsovie, il a jeté les bases de l´intégration de la Pologne dans l´UE. Il y a quelques mois, il était encore chef de la Commission parlementaire nationale pour l´intégration en Europe.

Dans cet entretien accordé au quotidien italien « Avvenire », Mazowiecki commente le discours du pape au Corps Diplomatique dans lequel le Saint Père dénonce le fait que les communautés de croyants aient été exclues de la rédaction de la Convention en décembre dernier, un texte qui devrait être décisif pour l´intégration en Europe.

— Pourquoi le pape a-t-il selon vous décidé de traiter le thème de la Convention de l´Union Européenne et de l´exclusion des communautés de croyants de la réflexion sur l´avenir de la Constitution européenne, dans un discours général sur l´état du monde actuel?

— Tadeusz Mazowiecki : Il n´y a rien d´étonnant à cela. Je crois que c´est même en parfaite harmonie avec tout l´enseignement de Jean-Paul II. Depuis le début de son pontificat il a toujours soutenu l´unité de l´Europe, non seulement comme entité économique ou politique mais aussi comme réalité spirituelle, une Europe qui comprend aussi la partie du continent sous la dictature communiste. Nous faisons partie de l´Europe. Nous l´avons toujours fait, disait-il lorsqu´il était évêque de Cracovie. Il l´a répété en juin 1999, devant le parlement polonais. Il est par conséquent évident qu´il suit ce qui concerne l´Union Européenne avec attention, je dirais presque avec passion. Certaines décisions comme celle du sommet de Laeken, l´attristent.

— Le pape parle dans ce cas d´ »injustice » et d´ »erreur de perspective »…

— Tadeusz Mazowiecki : Nous le savons bien, le pape Wojtyla est quelqu´un qui sait élever la voix lorsqu´il le faut. Et ici, c´est la marginalisation du fait chrétien qui est en jeu. C´est comme lorsqu´il protestait contre les régimes communistes qui étouffaient la liberté de professer sa foi. C´est toujours une question de liberté religieuse. Une liberté qui, comme il l´a souvent répété, est la première liberté fondamentale. C´est là que commence la défense des droits humains, que tout le monde reconnaît comme étant un leitmotiv du pontificat de Wojtyla. Nous ne devons pas l´oublier.

— La Charte des droits fondamentaux de l´Union Européenne ne parle pas des Eglises et des communautés religieuses. En tant qu´intellectuel et expert des thèmes européens, qu´est-ce que vous pensez de cette Charte?

— Tadeusz Mazowiecki : C´est le résultat d´un compromis politique entre différentes tendances présentes aujourd´hui en Europe. Tout le monde sait que les pressions françaises, visant à défendre une certaine idée de la laïcité, ont été très fortes. On est arrivé à ce texte de compromis. Je dois dire que ça a été un mauvais compromis.

— Croyez-vous qu´il soit encore possible de modifier cette Charte?

— Tadeusz Mazowiecki : Le texte sur les droits fondamentaux de l´Union Européenne a été, comme nous le savons, approuvé lors du sommet de Nice de décembre 2000. Je crois qu´il est encore possible d´apporter des modifications. Le travail de la Convention doit commencer, il y a tout le débat sur ce que devra être la nouvelle Constitution de l´Europe. Ce sera l´occasion de revenir sur certaines questions fondamentales.

— Le fait que Jean-Paul II en ait parlé aussi clairement aura-t-il un effet sur la Convention?

— Tadeusz Mazowiecki : J´espère que oui. Je voudrais toutefois rappeler une chose: le pape a parlé de l´Europe et de l´unification européenne en termes positifs, comme un motif de satisfaction. C´est très important, surtout pour la Pologne qui est en train d´essayer d´entrer dans l´Union Européenne. Et d´ailleurs, Jean-Paul II rejette les groupes anti-européens et ultranationalistes qui voient l´Union européenne comme le nouvel empire du mal. Il invite à davantage de compromis pas à un refus.

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ZENIT Staff

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